J'ai lu ici ou là sur Facebook des gens qui saluaient le courage de Raphaël Enthoven allant porter la contradiction à la "Convention de la droite", en fait rassemblement de néo-pétainistes à peine voilé. Certains ajoutant même que comme disait Chirac les couilles étaient le dernier truc qu'on n'arrivait pas encore à greffer.
Désolé, je n'ai pas la même lecture de que ces gens là. Non qu'il ne faudrait pas affronter sur le fond néo-pétainistes ou national-populistes de tout genre, mais que les arguments développés par le "philosophe" étaient spécieux, et on ne peut pas les éluder [vous trouverez ici le discours en question].
Tout comme Patrick Buisson, le chroniqueur radio estime que désormais le clivage droite-gauche est dépassé et que le clivage actif et structurant pour le long terme se situe entre "Libéraux" et souverainistes/nationalistes... Enthoven nous vend donc comme d'autres que pour éviter le fascisme, il faudrait "voter banquier". Vous ne voulez pas des National-populistes ? Vous reprendrez bien une louche de Libéral-populistes...
Or il n'interroge pas les conséquences du Libéralisme (sous toutes ses formes) en termes de justice sociale et d'égalité réelle : pour les Libéraux ces notions sont accessoires ; pour les néo-pétainistes et les national-populistes, la réponse se trouve dans la préférence nationale, la xénophobie et la guerre des "civilisations". Pour la gauche, la question sociale est centrale ; c'est d'ailleurs parce qu'elle est devenue accessoire pour les dirigeants du PS que ce dernier finit part s'effondrer, d'abord dans les classes populaires puis tout court. Pour répondre aux militants de ce parti qui me reprocherait d'en remettre encore une louche sur le quinquennat Hollande, je me permets de préciser que cet abandon est progressif - comme une grenouille qui s'habitue à l'eau qui chauffe avant de mourir cuite - et antérieur ; d'aucun dirait - même dans le PS actuel - que cela date de 1983.
C'est parce que la gauche - en général pas uniquement les partis, mais aussi ses intellectuels, etc. - a choisi de mettre en premier l'individu ou les questions sociétales (attention ! il faut aussi les traiter) en oubliant la question sociale et en considérant ne plus pouvoir agir sur l'économie qu'elle a habitué les citoyens au défaitisme du camp de l'égalité et permis à l'extrême droite de reprendre ces thèmes à son compte et de les immerger dans la question identitaire.
Si on ajoute que les conséquences des politiques libérales nourrissent néo-pétainistes et national-populistes, on voit bien que le "Libéralisme" n'est pas la solution aux réactions qu'ils suscitent.
La gauche fut rendue inaudible par l'oubli de sa raison d'être : elle doit réinventer un volontarisme économique, essentiel à la souveraineté populaire, et une ambition égalitaire, indispensable à la cohésion nationale.
Frédéric Faravel
NB : pour Enthoven souverainiste = nationaliste... donc son expression est simplement une oeuvre de politesse à l'égard de ses contradicteurs du jour, tout en introduisant une confusion volontaire de sa part entre les souverainistes et les nationalistes d'extrême droite. Le clivage central qu’il promeut c’est bien celui nationaliste contre libéral... Evidemment, il considère que libéral = progressiste, c’est toute la rhétorique du macronisme. Si j’évoque la souveraineté à la fin c’est parce que pour ma part je la place au bon endroit avec deux concepts complémentaires : souveraineté populaire / cohésion nationale... Libéral-populistes et National-populistes abîment l’une comme l’autre.
Enthoven sait très bien ce qu’il dit et fait ; il connaît la différence entre souverainisme et nationalisme et s’il utilise l’un pour recouvrir le second c’est à dessein ; il est très politique dans son propos et d’ailleurs sa démarche d’aller à ce rassemblement est une logique d’auto promotion politique personnelle.