La France est progressivement entrée le vendredi 13 mars 2020 par la fermeture des écoles, bars, cafés et restaurants, puis le mardi 17 mars pour l'ensemble de la population, dans la stratégie du confinement pour tenter de contenir la contamination et les décès qui en découleraient.
Or la crise du CoVid-19 a d’abord percuté nos sociétés parce que nous avions collectivement baissé tous les niveaux de prévention et tous les outils dont nous disposions avant la cure néolibérale pour y faire face. Le confinement a été ordonné non parce que c’était la seule manière de lutter contre l’épidémie mais parce que nous n’avions plus d’autres choix après l’incurie des choix politiques des 20 dernières années.
La baisse des moyens de l’hôpital se traduisant par la baisse du nombre de lits de réanimation et de lits en général nous laissait collectivement vulnérables face à une vague qui aurait pu submerger l'hôpital public. La délocalisation des industries pharmaceutiques – non qu'elle ait été décidée par les gouvernements eux-mêmes mais qu'ils n'ont rien fait pour l'empêcher – nous a également rendus vulnérables aux ruptures de chaînes d'approvisionnement, nos importations de médicaments et de principes actifs provenant essentiellement d'Inde et de Chine, pays tous deux fortement touchés par l'épidémie. Une large « littérature » tant parlementaire que professionnelle existait avant la pandémie sur les causes, les risques et les effets des pénuries de médicaments ; nous en avons fait les frais de manière ô combien dramatique ces dernières semaines, les stocks des hôpitaux fondant comme neige au soleil avec la plus grande peine pour les renouveler.
Ces défaillances révélées par la crise sanitaire actuelle sont évidemment la conséquence de choix politiques ; ce sera aux citoyens le moment venu de dire quelles conclusions ils en tirent et s'ils sanctionnent le gouvernement actuel et sa majorité parlementaire qui, dans la continuité des gouvernements précédents, ont choisi de poursuivre l'austérité en matière de politique de santé et de mener une politique industrielle défaillante.
Si elle est également le résultat d'une absence de politique industrielle, la pénurie de masques (de tout type) et le manque de réactivité dans les dispositifs de tests de dépistage ne relèvent pas du même ordre que les considérations précédentes.
Le gouvernement n'avait pas de manière transparente informé les Français et leurs représentants de l'abandon de la stratégie de prévention décidée progressivement de 2003 à 2010 sous les ministères de Philippe Douste-Blazy, Xavier Bertrand et Roselyne Bachelot (qui en parallèle avait posé les bases des difficultés de l'hôpital public dont nous faisons les frais aujourd'hui... qu'elle ne se sente pas exonérée de toute responsabilité) lors des précédentes menaces épidémiques : à partir du quinquennat de François Hollande, puis sous celui d'Emmanuel Macron, les gouvernements de Manuel Valls et d'Edouard Philippe – Marisol Touraine puis Agnès Buzyn étant ministres de la Santé – ont abandonné le renouvellement des stocks de masques chirurgicaux et FFP2. En 2011, la France pouvait compter sur un stock de 600 millions pour les seuls masques FFP2 ; en février-mars 2020, elle n'en avait plus au maximum que 100 millions, ce qui était très largement insuffisants pour affronter l'épidémie même en les réservant aux soignants. Parallèlement le choix de s'en remettre à l'importation pour répondre aux besoins provoquait l'effondrement des commandes de l'Etat aux entreprises françaises ; c'est par exemple une des raisons pour lesquelles Honeywell a décidé de fermer en 2018 l'usine de Plaintel dans les Côtes-d'Armor qui produisait en 2010 quelques 200 millions de masques FFP2 par jour et qu'on a aujourd'hui le plus grand mal à relancer (https://bit.ly/2WmPkii ; https://bit.ly/2SxTcvQ ; https://bit.ly/2zWfyk6).
De même, l'entretien donné au Monde le 17 mars 2020 par Agnès Buzyn (https://bit.ly/2WmRi1X) jette un certain trouble lorsqu'elle affirme qu'elle avait prévenu le gouvernement de la gravité de la situation et qu'elle savait que les élections municipales ne pourraient se tenir. Si ces déclarations sont sincères, plusieurs questions se posent : d'abord sur le sens des responsabilités personnelles de Mme Buzyn, puisque, bien que « sachant » la gravité de la situation, elle indique dans le même entretien avoir réclamé de conduire les listes LREM à Paris pour prendre la suite de Benjamin Grivaux, tout en sachant donc que les municipales n'iraient pas au bout (!?). Or donc si le gouvernement était informé de la situation, Agnès Buzyn aura donc menti sciemment et publiquement à plusieurs reprises en niant la gravité de la situation ; le gouvernement et le président de la République auront menti jeudi 12 mars 2020 aux responsables des partis représentés au parlement en expliquant qu'il n'existait aucune contre-indication à tenir le premier tour des élections municipales le dimanche 15 mars ; les membres du gouvernement auront menti tout au long des mois de janvier à avril en indiquant aux Français que les stocks de masques étaient suffisants et que les masques pour l'ensemble de la population n'étaient pas utiles, alors qu'un rapport de l'Inspection Générale de l'Administration préconisait le contraire dès 2005 (https://bit.ly/2SAz5gt) – ce même rapport servant de base aux politiques de précaution mises en œuvre par la suite.
Ces mensonges dans l'action publique ne pourront évidemment pas uniquement se solder par une éventuelle sanction électorale ; il est plus que probable que de nombreuses procédures juridiques seront engagées pour mesurer et sanctionner le cas échéant. Nous ne sommes pas encore dans ce temps, mais dans celui où, confrontés aux différents mensonges du gouvernement, les citoyens français – déjà terriblement sceptiques vis-à-vis des responsables politiques – éprouvent une défiance désormais radicale à l'égard de la parole publique.
La stratégie de confinement n’a sans doute pas sauvé plus de personnes que si nous avions choisi de conserver les moyens dont nous disposions auparavant, mais c'était sans doute la seule qui restait pour éviter une submersion des hôpitaux en l'absence de masques pour tous et de tests massifs.
Désormais l’absence de confiance des citoyens dans l’action et la parole publiques rend même le déconfinement difficilement gérable car le gouvernement a généré un effet de panique irrationnelle dans la population. Cette défiance implique que chaque information rassurante est mise en doute ou peu intégrée – comme celle qui expliquait voici quelques jours que les enfants souvent porteurs sains n'étaient finalement pas fortement contagieux ; par contre, le lendemain, l'annonce par l'hôpital Necker d'une vingtaine de cas en Île-de-France d'affection enfantine similaire au syndrome de Kawazacki et d'un lien possible avec le CoVid-19 (lien confirmé depuis), après des alertes semblables en Grande-Bretagne, a provoqué une sorte d'angoisse généralisée par le biais des réseaux sociaux, entraînant une hausse de la revendication populaire de reporter la réouverture des écoles primaires ou d'avoir la droit de ne pas amener ses enfants à l'école à partir du 11 mai 2020.
Aucun argument rationnel n'est audible encore aujourd'hui à ce propos : le syndrome de Kawazacki est rare ; les cas d'affections similaires sont plus nombreux que d'habitude puisque la contamination au CoVid-19 semble favoriser chez certains patients son apparition, mais ces cas restent très peu nombreux et statistiquement les enfants de moins de 14 ans continuent d'être une population qui développe extrêmement rarement des formes avancées et encore moins graves du CoVid-19... rien n'y fait, même rabâchés, les arguments rationnels ne passent plus.
Un autre élément a été de nature à nourrir la défiance civique, c'est la manière choisie par le président de la République pour annoncer un processus progressif de déconfinement à partir du lundi 11 mai 2020. Emmanuel Macron avait fait de l'avis des scientifiques, érigés en comité à ses côtés, l'alpha et l'oméga de ses prises de décision depuis la mi-mars. Que les informations scientifiques doivent nourrir la décision politique, c'est une évidence ; en faire un horizon indépassable revient tout à la fois à déresponsabiliser et rendre impuissant tout arbitrage politique. Ainsi au moment d'annoncer un processus progressif de déconfinement sans plus faire référence à l'avis du comité scientifique, qu'il avait érigé pourtant en critère absolu, le Prince Président a décrédibilisé sa parole et le processus qu'il entendait engager, alors même que cela aurait pu être a contrario interprété comme un sain retour à la responsabilité de l'arbitrage politique.
Plus inquiétant sur ce que cela nous apprend de l'exercice de l'Etat par Emmanuel Macron, il semble de plus en plus probable que le président de la République ait annoncé le processus progressif de déconfinement sans s'appuyer sur un début de stratégie réfléchie en amont. En clair, Emmanuel Macron a dit à son gouvernement « j'ai annoncé le 11 mai, débrouillez vous maintenant pour ne pas me faire mentir. » Ainsi a-t-on vu dans les jours qui ont suivi un cafouillage généralisé, avec un ministre de l'éducation nationale incapable d'expliquer quelle était la stratégie de son ministère pour permettre le retour des élèves à l'école, au collège et au lycée ; ainsi a-t-on découvert qu'aucune concertation en amont n'avait été engagée avec les administrations concernées et les représentants des agents appelés à assurer ce retour des élèves ; ainsi a-t-on attendu pendant près de 10 jours une explication de la stratégie gouvernementale, sans avoir d'assurance sur les masques et les tests pour la population à déconfiner, sans même parler de la présentation laborieuse, et parsemées d'erreurs, des premières cartes des départements rouges et verts (mais aussi oranges)…
Emmanuel Macron l'avait promis : il n'y aurait pas de faillites et l'État agirait pour l'hôpital et les entreprises « quoi qu'il en coûte ». C'est d'abord pour les salariés qu'il en a coûté : les soignants furent parfois contraints de se « fabriquer » des sur-blouses de fortune en sacs poubelle ; les salariés de première ligne eurent le plaisir de voir leurs droits et protections réduits par la mise en sommeil de pans essentiels du droit du travail (durée et temps de travail, jours de congés, RTT, médecine et inspection du travail) pour une durée qui excède largement ce que l'on peut imaginer être celle de l'état d'urgence sanitaire, tout cela sans se voir garantir des conditions de protection sanitaire minimales. Pour les autres, le recours à la seule stratégie sanitaire encore possible pour contenir l'épidémie les a condamnés au chômage partiel et à assister de chez eux semaine après semaine à la concrétisation des menaces de faillite et de « plans sociaux » à venir (sans compter ceux pour qui le télétravail n'a pas forcément permis de sauver leur entreprise).
L'exécutif s'est également déchargé de ses responsabilités sur les citoyens. En annonçant que le retour à l'école des élèves à partir du 11 mai 2020 se ferait également sur la base du volontariat des familles, il a alimenté la psychose dans la population qui y a vu la justification de ses propres angoisses. En République, s'il n'y a que l'instruction qui est obligatoire, il est de la responsabilité de l'État de garantir à tous la même qualité d'accueil et d'enseignement scolaire. Face à la perspective du déconfinement, il revenait donc à l'Etat d'assurer aux parents que les élèves seraient tous accueillis dans les mêmes conditions en tout point du territoire national et en garantissant leur sécurité sanitaire : la reprise de l'école sur la base du volontariat place les parents d'élèves dans un état de panique morale et intime proprement invivable, depuis lequel ils doivent arbitrer seuls entre les incertitudes de la sécurité sanitaire, le bien être scolaire et psycho-social de leurs enfants, et la pression de leurs employeurs qui ne manqueront pas dans la situation de dépression économique d'arbitrer entre ceux de leurs salariés qui auront choisi « la mort dans l'âme » de reprendre le chemin du travail et les autres.
L'exécutif se défausse sur les enseignants puisqu'il a indiqué que les élèves dont les parents refuseraient le retour dans les établissements à partir du 11 ou du 18 mai recevraient le même suivi de la part de leurs enseignants que celui qu'ils ont reçu depuis le 16 mars. Les enseignants se verront donc non seulement contraints d'assurer la classe dans des conditions extrêmement dégradées et d'assurer en plus en fin de journée ou quand ils le pourront la continuité pédagogique avec les élèves qui ne seront pas retournés en classe.
L'exécutif s'est enfin défaussé de ses responsabilités sur les collectivités et sur les Maires. En effet, n'ayant pas préparé en amont la stratégie de sortie progressive du déconfinement annoncé au débotté par le président de la République, les dix jours d'improvisation totale qui suivirent laissèrent évidemment libre champ à de nombreux maires qui voyaient difficilement comment mettre en œuvre la réouverture des écoles dans un temps si court et sans information précise d'un point de vue sanitaire. Le gouvernement aurait alors dû tenir un discours rassurant (aurait-il été seulement reçu vu le passif exposé plus haut ?) sur l'amélioration de la situation sanitaire et les informations scientifiques plus rassurantes, sur le fait qu'il était en train de réunir les conditions pour réussir la réouverture des établissements scolaires. Las, le gouvernement a laissé la charge aux collectivités d'assurer seules la responsabilité de la réussite matérielle de l'opération, face à l'inquiétude des habitants ; il a mis également un terme au peu de cadre national qui existait en concédant – aveu de son incapacité à garantir des moyens et le matériel de protection – que l'avis négatif des maires dans les départements en zone rouge serait fortement pris en compte.
Au-delà de la médiocrité des membres de l'exécutif, on peut s'interroger sur leurs possibles arrières-pensées politiques. L'essentiel des collectivités territoriales sont dominées par leurs adversaires politiques qu'ils mettent donc au défi de résoudre la quadrature du cercle. Le niveau de préconisation négative du protocole de déconfinement des établissements scolaires est tellement restrictif que sa mise en œuvre est parfaitement irréaliste ; la mobilisation quotidienne en terme de nettoyage et de désinfection des locaux implique souvent des moyens dont la plupart des communes ne disposeront pas. De plus, de nombreux agents territoriaux et enseignants qui sont des gens comme les autres et soumis à la même angoisse que le reste de la population ne souhaitent pas reprendre le travail alors que le gouvernement est incapable d'avoir un discours clair et crédible sur les conditions sanitaires et épidémiques. De même, la majorité des parents refusent aujourd'hui d’envoyer leurs enfants, mais la pression des patrons va monter ; le chantage à l’emploi sera plus fort que jamais.
La première manœuvre de l'exécutif vise ici à se désengager des risques juridiques vis-à-vis des parents pour la partie qui relève de l’Etat en cas de contamination avérée.
La seconde est de mettre les Maires dans la situation intenable de prendre seuls la responsabilité de refuser la réouverture des écoles et le fiasco d'un mauvais protocole gouvernemental. Une partie des parents d'élèves sous pression économique de leur employeurs finira bien par chercher un bouc émissaire et le gouvernement dira alors que c’est la faute politique des collectivités.
Après avoir détruit la confiance avec les Français, le gouvernement est en train de détruire le lien avec les territoires de la République, ce qui ne peut qu'être source de graves désordres pour l'avenir. Dans ces conditions, la lettre ouverte au gouvernement publiée par 329 maires d'Île-de-France pour demander un rééchelonnement du processus de déconfinement est parfaitement rationnel (https://bit.ly/2YzmXjw) ; leurs revendications sont encore mesurées, il s'agit :
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« De ne pas faire reposer sur les maires la responsabilité juridique, politique et morale de la réouverture des écoles, mais de les associer dans une concertation avec le Préfet de département, qui doit assumer l'entière responsabilité de sa décision prise sur proposition du maire ». En effet, quel maire pourra dire à ses administrés que l'école rouvre parce que le gouvernement en a décidé ainsi mais qu'il refusera d'assurer ce qui relève de sa responsabilité directe à savoir la restauration scolaire, l'accueil périscolaire et le nettoyage des locaux ? Là encore il s'agit d'une revendication de restauration d'un cadre national de l'action publique ;
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« De demander à votre gouvernement de prioriser clairement les enfants qui pourront/devront reprendre le chemin de l'école en Île-de-France en tenant compte du contexte familial de chaque enfant et en suivant un impératif de justice et d'équité ». La politique d'éducation doit être nationale, elle ne peut se faire au doigt mouillé. On voit donc encore une fois cette demande de cadre qui est aujourd'hui défaillant ;
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« Que des moyens financiers suffisants soient conférés aux communes pour qu'elles puissent assurer l'accueil périscolaire dans le strict respect du protocole sanitaire, qui induit nécessairement un coût et une mobilisation de personnel supplémentaires ». Pas besoin de commenter ;
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« De faire en sorte que s'arrêtent des logiques administratives incompréhensibles en termes d'équipements du personnel éducatif, et de privilégier un équipement pour tout le personnel d'une école par l'Education nationale, alors que de nombreuses communes pallient actuellement le manque de masques et de sur-blouses depuis le début du confinement en distribuant gracieusement leurs stocks aux professeurs qui n'en ont jamais reçu par leur ministère de tutelle ». Pour illustrer ce propos, certains parents d'élèves ont pu recevoir des courriers électroniques de certains chefs d'établissements indiquant qu'après consultation de leurs inspecteurs, c'était aux collectivités d'assurer le matériel de protection et de désinfection pour l'ensemble des adultes (enseignants compris) quand il avait été pourtant assuré que ce serait évidemment de la responsabilité de l'Etat.
mise sous plis par les agents municipaux des masques commandés par la Ville Bezons pour envoi aux Bezonnais, le mardi 5 mai 2020
Résumons : une stratégie de confinement parce que nous n'avions plus d'autres choix après les années de sape contre notre système de santé ; une communication en partie mensongère et totalement hasardeuse pour tout le reste ; une absence totale de méthode et d'organisation ; une défiance et une panique généralisée dans la population… L'action gouvernementale face à la crise sanitaire a sans doute limité la casse en termes de morts du CoVid-19, mais elle a commencé à détruire notre économie et va provoquer une crise sociale sans précédent, dont les effets seront sans doute plus durables et délétères que la maladie elle-même.
On voit à quel point la confiance est atteinte tant du point de vue de la parole de l'exécutif que de son action concrète. La majorité de l'Assemblée nationale et celle du Sénat lui ont pourtant permis d'être délesté dès le 23 mars 2020 de tout contrôle parlementaire avec l'état d'urgence sanitaire. L'avis négatif du Sénat ce lundi 4 mai 2011 sur le plan de déconfinement du gouvernement (accepté par l'Assemblée nationale) ne rachètera pas vraiment sa faute originelle.
Plutôt que d’exiger par un nouveau projet de loi la prorogation de l’état d’urgence sanitaire sans véritable contrôle parlementaire, l’exécutif – présidence de la République et gouvernement – ferait mieux d’assumer pleinement leurs responsabilités : ils doivent rendre possible le déconfinement, donc assurer à toutes et tous masques et tests, et non se défausser sur les collectivités, les salariés et les parents. La France doit pouvoir retrouver une activité normale aussi vite que possible sauf à être confrontée à un effondrement économique et social dont les conséquences seront pires que celles de l’épidémie. Jusqu’ici l’exécutif n’a pas fait preuve que les pouvoirs exceptionnels dont il dispose étaient justifiés par l’efficience de son action.
Comment sortir de l'impasse ? Plusieurs responsables gouvernementaux sont discrédités ; l'action gouvernementale et la parole de l'Etat gagnerait également à ce qu'ils soient mis de côté et le président de la République – qui a déjà en tête l'élection présidentielle – gagnerait également à entamer une cure de silence, tant il brouille l'action publique. Il est peu probable qu'un gouvernement d'union nationale puisse être mis en place, tant les dissensions politiques étaient déjà fortes et se sont accentuées ses dernières semaines.
Il faudrait donc trouver une solution pour créer un consensus qui assure l'action publique du soutien minimal qui permettrait le retour d'un minimum de confiance y compris parmi nos concitoyens. Il conviendrait pour cela que l'exécutif s'engage sur des mesures importantes, qui permettent aux forces républicaines de se parler à nouveau : garantir une priorité humaine et financière durable à l'hôpital public et à l'ensemble de notre système de santé, mettre fin à la suspension du droit du travail, annoncer l'abandon définitif des réformes de l'assurance chômage et des retraites, assumer enfin que l'Etat prenne des mesures de réquisition et de réorientation des productions pour affronter les nouveaux besoins prioritaires… Sur ces bases, et en y associant les forces sociales, on peut alors envisager un comité de suivi républicain qui associe l'ensemble des partis républicains représentés au Parlement qui puissent fonctionner par consensus pour établir une stratégie collective de sortie de crise.
Alors que certains à gauche ne pensent qu'à se projeter dans le monde d'Après, sans voir que le risque est grand qu'il soit pire qu'avant, il y a pourtant urgence à réellement se préoccuper de se qui va se passer et qui doit se passer dans un « monde Avec »... avec le CoVid-19.
Nous ne pouvons rester confinés durant les 18 ou 24 mois pendant lesquels le CoVid-19 continuera vraisemblablement d'être actif. Nous ne pouvons pas continuer de priver nos enfants d'une instruction publique normale – on a mis un siècle à sortir les enfants des familles pour l'instruction publique ce n'est pas pour considérer aujourd'hui un retour contraint à la maison sous couvert d'un vernis « continuité pédagogique » comme un progrès. Nous ne pouvons laisser les Français sombrer dans le chômage du fait d'un effondrement économique qui pourrait bientôt obérer si l'on ne réagit pas toute capacité de rebond. Il en va de leur sécurité économique et de leur sécurité sociale. Il en va du devenir de notre pays et de la pérennité du cadre républicain et démocratique qui nous fait vivre ensemble.
Frédéric Faravel