L'économie américaine a fait une "overdose"
LE MONDE | 05.10.07 | 15h06 • Mis à jour le 05.10.07 | 15h06
La BCE reste focalisée sur les risques d'inflation (qui l'empêchent de baisser les taux d'intérêt). Or, des taux élevés contribuent à ralentir l'économie. Tant que la BCE maintiendra cette politique, elle ne pourra pas répondre aux problèmes de cette crise financière. D'autant qu'il n'y a pas de sérieuses tensions inflationnistes en Europe.
Faudrait-il que la BCE baisse radicalement les taux d'intérêt comme l'a fait la Réserve fédérale américaine (Fed) ?
In fine, la Fed a surtout aidé les établissements de crédits hypothécaires pour éviter qu'ils ne fassent faillite. Ces derniers ont été à l'origine de la crise car ils avaient prêté démesurément en prenant des risques inconsidérés. Ce ne sont pas eux qu'il fallait soutenir. Il faudrait plutôt aider les ménages qui sont aujourd'hui menacés de perdre leur logement.
La crise peut-elle s'aggraver ?
La dynamique de l'économie américaine est négative. Et la question actuelle n'est pas de savoir si il y aura, oui ou non, un ralentissement de la croissance aux Etats-Unis, mais quelle sera son ampleur.
La croissance américaine est tirée par la consommation depuis plusieurs années. Celle-ci a été soutenue par l'octroi de crédits, en particulier des crédits hypothécaires. A force, on a fini par prêter à des ménages qui ne pouvaient pas se le permettre. Les Américains ont ainsi vécu au-dessus de leurs moyens.
Les crédits hypothécaires ont agi comme des stéroïdes pour doper la croissance américaine. Mais il y a eu overdose. Les ménages peu solvables n'ont plus été en mesure de rembourser. Et l'Amérique est aujourd'hui en cure de désintoxication.
Pour l'économie, les conséquences ne seront sans doute pas brutales mais progressives et longues. Le ralentissement de l'économie devrait durer au moins douze à dix-huit mois. Cette année, la croissance sera inférieure à 2%.
Pourtant les marchés boursiers repartent à la hausse...
Les marchés d'actions ne reflètent pas toujours la réalité de l'économie. Aujourd'hui, les investisseurs réagissent surtout à la baisse des taux de la Fed. Mécaniquement, quand les taux baissent, les actions montent. Les marchés sont aussi sans doute excessivement optimistes. Ils ne réalisent pas le rôle primordial des crédits hypothécaires dans l'économie américaine.
Au niveau mondial, l'économie est moins vulnérable qu'il y a quinze ans. Elle est plus diversifiée car elle reste soutenue par la croissance des pays émergents. Mais ces derniers seront fragilisés par les difficultés de l'économie américaine, la plus importante au monde. Une grande partie de la croissance chinoise est liée à ses exportations vers les Etats-Unis.
Article paru dans l'édition du 06.10.07