"Ça existe à Berlin, où parfois 150 citoyens tirés au sort et indemnisés sont regroupés sur un thème. Pendant deux jours, ils procèdent à des auditions avant de rédiger un rapport et de le remettre aux élus qui sont obligés de communiquer dessus", récite un destinataire. Tout le monde n'avait pas été mis au courant. Pas même dans l'entourage proche de Mme Royal.
Pressé d'éclaircir quelques-unes des positions de la candidate, le président du groupe socialiste de l'Assemblée nationale, Jean-Marc Ayrault, s'est trouvé embarrassé pour répondre, dimanche soir 22 octobre, au Grand Jury RTL-Le Figaro-LCI.
Au point de faire l'aveu qu'il lui "arrive de découvrir", comme tout un chacun, les positions de Mme Royal... "C'est quelqu'un à qui on ne dicte pas ses positions et qui garde totalement sa liberté, témoigne Gaëtan Gorce, l'un des conseillers. A nous de nous adapter."
Le député de la Nièvre reconnaît que le fonctionnement de la candidate "défie parfois un peu les règles de la rationalité", mais dit s'en réjouir car "sa liberté fait sa force".
Pour d'autres, c'est un peu plus compliqué. "On ne discute pas toujours très en amont parce qu'elle entretient un lien étroit avec les sondages, analyse un membre de son équipe. Lorsqu'elle a pris connaissance de celui du Cevipof, dans lequel 60% des Français jugent les responsables politiques "plutôt corrompus", elle a choisi aussitôt d'y faire écho avec les jurys citoyens."
Un autre soupèse les avantages : "Comparé à la machine de guerre de Sarko, cette organisation un peu floue permet une plus grande réactivité."
A leur arrivée dans l'équipe, les responsables du PS ralliés découvrent le système Royal : des réseaux politiques, amicaux ou d'experts, cloisonnés ou accumulés comme des mille-feuilles, sans définition précise, et des réunions éparses.
"Chacun prend la place qu'il juge utile", affirme Arnaud Montebourg. Le député de Saône-et-Loire fait partie, avec Jean-Louis Bianco et Gilles Savary, des 3 porte-parole nommés par Mme "mandataire" de la candidate et chargé, à ce titre, de la représenter dans le parti. Julien Dray occupe à lui seul, en raison de ses liens d'amitié anciens avec la candidate, une place à part. Christophe Chantepy préside l'association Désirs d'avenir et coordonne les travaux des experts. Royal. Il faut y ajouter 3 conseillers, Gaëtan Gorce, Christophe Caresche et Eugène Caselli, et aussi Patrick Mennucci.
Les "nouveaux", comme Vincent Peillon, eux, s'insèrent tant bien que mal dans ce dispositif où personne ne sait très bien qui fait quoi. Beaucoup font le parallèle avec le cloisonnement cher à François Mitterrand. Jean-Louis Bianco, ancien secrétaire général de l'Elysée s'amuse à dire qu'il "retrouve une seconde jeunesse".
Le système a toutefois ses limites. Mardi, le cercle des "Hollandais" ralliés, François Rebsamen, Bruno Le Roux, Jean-Marc Ayrault et Jean-Pierre Bel, devait fusionner avec le groupe, plus ancien, des porte-parole et conseillers. Et s'il n'est toujours pas question de nommer un directeur de campagne avant la désignation, Mme Royal devait officiellement charger M. Rebsamen, numéro deux du PS, de coordonner l'équipe politique. "Avant, les réunions donnaient le sentiment qu'il n'y avait que des électrons libres", s'amuse un participant.