"Grâce à Dieu, nous avons gagné", a déclaré M. Correa, âgé de 43 ans, devant une foule de sympathisants, à Quito, la capitale équatorienne. "Après des années de politiques sociales et économiques d'exclusion qui ont provoqué la tragédie appelée l'immigration, ils n'ont pas réussi à nous voler l'espoir. Nous avons gagné", a-t-il lancé. Sa victoire, avec 56,9% des voix, avait été annoncée peu auparavant, selon des projections réalisées à partir d'échantillons représentatifs.
3 sondages de sortie des urnes ont également donné M. Correa, ancien ministre de l'économie, vainqueur du scrutin, avec une avance moyenne de 14 points sur son adversaire.
Le magnat de la banane Alvaro Noboa, 1ère fortune du pays, ne recueille pas plus de 43,2% des suffrages, selon ces sondages publiés juste après la fermeture des bureaux de vote. Dans une conférence de presse à Guayaquil (Sud-Ouest), M. Noboa a déclaré qu'il "n'acceptait pas les résultats car il n'y a pas de résultats officiels. C'est un scénario qui a été préparé" en faveur de Rafael Correa, a-t-il jugé.
Les résultats officiels ne sont pas attendus avant mardi ou mercredi, a annoncé le Tribunal suprême électoral (TSE).
"UN CUBA DE PLUS"Un concert de klaxons a salué l'annonce de la victoire du candidat nationaliste dans les rues de la capitale équatorienne.
Alvaro Noboa, qui votait à Guayaquil, s'était déclaré "certain de gagner cette élection avec un bon pourcentage". Alors que les derniers sondages donnaient une nette avance à son rival, il a assuré qu'ils lui étaient favorables. "Les sondages d'hier me donnaient favori. Je suis le gagnant, c'est Dieu qui m'a aidé", a-t-il proclamé face à la foule, brandissant une bible.
La perspective d'un duel serré avait créé un climat de tension et de suspicion dans tout le pays. Noboa n'avait cessé d'accuser son concurrent de vouloir instaurer "un Cuba de plus" en plongeant le pays dans "la guerre civile" avec l'aide d'Hugo Chavez.
Redoutant des violences, le TSE avait exhorté les médias à attendre les résultats officiels et à s'abstenir de publier des projections de sortie des bureaux de vote au cas où les deux candidats seraient au coude-à-coude.
L'Organisation des Etats américains, qui a envoyé une mission de 80 observateurs, avait également souhaité que "les candidats et les Equatoriens respectent avec calme le résultat" quel qu'il soit.
Près de 80 000 militaires et policiers ont été mobilisés dans tout le pays pour surveiller les 36 607 bureaux de vote.
"CHAVEZ EST MON AMI PERSONNEL"Les candidats ont multiplié, avant le second tour, injures et accusations mutuelles, tout en rivalisant de promesses mirifiques. La presse a régulièrement dénoncé "la sale guerre" et "les coups bas" entre les deux rivaux cherchant plus à discréditer l'adversaire qu'à proposer un véritable programme de gouvernement. Ainsi, M. Noboa a achevé sa campagne avec des discours messianiques, implorant Dieu de lui "donner la présidence et de battre son rival, le roi de l'enfer". M. Correa, pour sa part, a comparé le milliardaire à un dictateur et l'a qualifié de "fondamentaliste d'extrême droite", accusé d'exploiter des enfants dans ses bananeraies, de mener une politique antisyndicale brutale et de "voler l'Etat".
L'ex-ministre de l'économie, qui prône la fermeture de la base américaine de Manta et refuse de signer un traité de libre-échange avec Washington, était régulièrement accusé par Alvaro Noboa d'être le valet de M. Chavez. "Chavez est mon ami personnel mais, dans ma maison, ce ne sont pas mes amis qui commandent ; celui qui commande, c'est moi", a-t-il dit, dimanche soir, à la presse, après l'annonce de sa victoire. "Je ne suis pas une nouvelle version de Chavez ou de Fidel Castro", a-t-il poursuivi, indiquant cependant qu'il "coopérerait avec Caracas sans compromettre la souveraineté du pays".
Ce "serait merveilleux si le gouvernement de Caracas pouvait aider l'Equateur à éponger sa dette extérieure de 11 milliards de dollars". "Toutefois, a-t-il ironisé, si le président américain George W. Bush [est disposé] à offrir les mêmes avantages, je serai bien sûr prêt à conclure des marchés avec lui dans notre intérêt mutuel."