Les primaires citoyennes ont débouché sur un résultat clair et incontestable. 56% pour François Hollande, et un peu plus de 43% pour Martine Aubry. La Première Secrétaire qui avait mené une campagne de convictions va retrouver la direction de la Rue de Solférino et aura pour tâche de conduire les socialistes dans le combat présidentiel derrière le candidat des socialistes et des radicaux de gauche, François Hollande.
Je ne cacherai pas que je suis déçu et même amer. Celle qui a accouché du projet socialiste, qui a relevé le PS et l'a remis au travail pendant 3 ans, celle qui a permis l'exercice des Primaires Citoyennes, en ait la perdante. Les Français de gauche ont tranché, il n'y aura donc pas d'alternative. Cependant, il faut noter que le nouveau candidat socialiste avait bénéficié d'un traitement médiatique particulièrement bienveillant (invention du "pacte de Marrakech", campagne sur la "candidate par défaut", instrumentalisation de sondage sur les primaires alors que seuls auraient dû compter les intentions de vote pour les présidentielles, relais complaisant des "agressions" aubrystes, silence tout autant complaisant sur les propos de Vincent Peillon ou François Rebsamen particulièrement odieux à l'attention de Martine Aubry et de ses soutiens : "label Marine Le Pen", "fascistes", etc.). Il y aura sûrement des enseignements à tirer de cette campagne, le camp de la Maire de Lille a sûrement commis des erreurs : ne pas suffisamment jouer sur les médias, préférer une campagne de réseaux plutôt qu'une campagne grand public, ne pas réellement chercher à organiser une primaire de toute la gauche alors que les militants avaient plébiscité cette option... En fait, nous avons sûrement tous douté que les primaires mobilisent autant de gens : on ne fait pas campagne en direction d'un million d'électeurs ou de trois.
Les Français de gauche ont donc suivi ce qui leur a été dit et ce qu'ils ont entendus : François Hollande doit gagner parce qu'il va gagner. Passons à autre chose, dirons-nous, mais encore quelques mots tout de même avant de sacrifier à l'union et au rassemblement.
Les Français attendent beaucoup de la gauche. Oui évidemment, ce qui transparaît le plus fortement c'est une envie de se débarrasser de Nicolas Sarkozy qui a cassé la France et la République. Mais les Français veulent plus : ils ont été meurtris fortement ces dix dernières années, plus encore sous Nicolas Sarkozy. Il va falloir réparer les dégâts et pas simplement changer de président. Près de 3 millions de Français ont voté, cette attente est fortement démontré, si jamais nous créions une déception, ce serait déflagrateur.
Or ce n'est pas en promettant peu ou en promettant du sang et des larmes que l'on ne crée pas d'illusions qui feraient naître les désillusions. Virer Sarkozy, réparer la République sociale, voici ce que les Français attendent d'un président de gauche et si on ne s'attaque qu'à la dette par l'Austérité, les désillusions seront au rendez-vous.
Les candidats d'Europe-Ecologie/Les Verts ou du Front de Gauche voient dès lors se dégager un nouvel espace politique, qui aurait été en partie préempté par Martine Aubry. Et le rassemblement de la gauche sera plus difficile à faire quand la sortie du nucléaire n'est plus au programme (on l'aura compris) et que l'élargissement de la majorité au centre l'est (il faudra élargir "à tous ceux qui ne sont plus de droite mais qui ne savent pas encore s'ils sont de gauche").
Alors pour éviter quelques dégâts, autant rappeler quelques fortement propositions que le candidat Hollande devra reprendre de Martine Aubry :
- la clarté sur la "règle d'or" budgétaire ;
- le "Juste échange" ;
- la transformation de l'Europe pour faire de l'UE une terre d'innovation mais aussi de protection contre le dumping fiscal, social et environnemental ;
- le retour de la politique industrielle pour relocaliser les entreprises et l'emploi, en engageant la transition écologique et énergétique ;
- la refondation de l'école publique ;
- la réforme profonde de la "médecine de ville" et la renaissance de l'hôpital public ;
- le retour d'une politique salariale offensive ;
- l'égalité réelle femme-homme ;
- la rénovation profonde des institutions françaises avec la parité et le non-cumul des mandats pour les parlementaires dès 2012...
Il est nécessaire de rassembler la famille socialiste sur le fond plus encore que dans la forme, nous serons quelques uns à le rappeler pour éviter certains de grimper sur leurs nuages ou pour prévenir certains coupeurs de têtes que la direction du PS n'a pas besoin d'être modifiée pour être responsable et unitaire... d'autant que comme en 2006, les faveurs de la presse se retourneront bientôt.
Frédéric Faravel
Secrétaire fédéral du PS Val-d'Oise aux relations extérieures