La Chancelière conservatrice Angela Merkel, après une conférence des chefs de partis allemands, prend un virage à 180° en rétablissement la perspective de 2022 comme sortie définitive du nucléaire. Elle revient en cela à ce qu'avait déjà décidé la coalition rouge-verte dirigée à l'époque par Gerhardt Schröder, alors qu'en septembre dernier elle avait prolongé la durée de vie des plus anciennes centrales allemandes.
Les détracteurs de cette décision – qui ont pourtant une inclinaison forte vers les solutions allemandes- rétorqueront qu'elle fera de la République fédérale le passager clandestin de l'énergie européenne et tout particulièrement de l'énergie française. La France qui grâce à ses 58 réacteurs nucléaires se verrait promettre un avenir radieux de dispensateurs d'électricité pour toute l'Europe. Ils argueront qu'en l'état actuel des moyens de productions d'énergie en Allemagne, les responsables allemands tombent volontairement du Charybde nucléaire au Scylla carboné. Ils diront également que l'Allemagne étant moins dépendante du nucléaire le pari allemand est plus simple à remplir.
Or sortir d'une logique électrique dépendante du nucléaire pour 20 % en 11 ans, est-ce franchement plus facile que sortir de 70 % en 25 ou 30 ans ? Par ailleurs, l'Allemagne avait entamé sa transition dès la fin des années 1990 en subventionnant très largement la production d'énergie renouvelable, quand la France cahote sur ce chemin et qu'elle préfère encore subventionner l'énergie nucléaire par les impôts des Français : il faudra faire le point sur la réalité des coûts ; si les prix de l'électricité française sont bas, c'est parce que l'État a largement investi et subventionné l'énergie nucléaire. Ils ne paient pas uniquement par l'intermédiaire d'EDF mais également par la fiscalité.
L'Allemagne vise donc à se constituer une position économique incontournable et inexpugnable sur le marché européen en matière technologique et d'énergie renouvelable. L'avance économique et industrielle énorme dont elle dispose aujourd'hui ne fera alors que s'accroître et nous serions dépendant de sa puissance si nous tardons à décider la transition énergétique.
En décidant d'atteindre à la fois les objectifs de réduire les émissions de carbone et de gaz à effet de serre et de sortir du nucléaire, l'Allemagne vient de se fixer une obligation de résultat dans la recherche et la mise en œuvre de technologies avancées. La Gauche française doit prendre conscience de l'ampleur de l'enjeu. Il est temps que Martine Aubry et Cécile Duflot fassent entendre raison aux archaïques barons de la gauche française.
Frédéric Faravel