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sur l'auteur

Je m'appelle Frédéric Faravel. Je suis né le 11 février 1974 à Sarcelles dans le Val-d'Oise. Je vis à Bezons dans le Val-d'Oise. Militant socialiste au sein de la Gauche Républicaine & Socialiste. Vous pouvez aussi consulter ma chaîne YouTube. J'anime aussi le groupe d'opposition municipale de gauche "Vivons Bezons" et je suis membre du groupe d'opposition de gauche ACES à la communauté d'agglomération Saint-Germain/Boucle-de-Seine.
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Gauche Républicaine & Socialiste

10 octobre 2014 5 10 /10 /octobre /2014 10:39

nouveau-logo-psEt si on respectait nos statuts autant dans leur esprit qu'à la lettre

Après le lancement par Jean-Christophe Cambadélis, premier secrétaire par intérim du PS, désigné le 15 avril dernier par le conseil national, la fédération du Val-d'Oise du Parti Socialiste a choisi d'approfondir trois thématiques pour contribuer à cette démarche :

1 - Comment faire progresser notre Europe ?

2 - Comment faire progresser notre démocratie ?

3 - Comment faire progresser notre Parti socialiste ?

D'autres thématiques avaient été évoquées par plusieurs camarades du comité de pilotage, avec la volonté d'aborder les questions économiques et sociales qui sont fortement discutées aujourd'hui au regard de la politique conduite par le gouvernement. Mais cette thématique n'est pas spécifiquement désignée dans la liste définie par le Secrétariat national. Pourtant, alors qu'elle n'est pas non plus présente dans la liste des thématiques abordées par les états généraux, la fédération abordera la question du fonctionnement du PS, avec un questionnaire militant, et l'espoir de recueillir plusieurs contributions sur le sujet. On notera qu'on peut donc adapter la liste des thématiques des états généraux en fonction des circonstances, mais faisons fi du mauvais esprit et contribuons sur ce sujet nécessaire, puisqu'il parle de la manière dont nous vivons ensemble dans notre organisation politique.

Alors que les statuts du Parti Socialiste impliquent de convoquer un congrès pour la fin de l'année 2014, ce dernier a choisi de repousser l'échéance sine diepour réunir des «états généraux», qui doivent selon lui «reformuler l'identité socialiste». Programme ambitieux s'il en est !

On peut s'étonner d'une telle feuille de route quand la déclaration de principes du PS a été réécrite et adoptée en 2008 ; la fédération du Val-d'Oise du Parti Socialiste s'était d'ailleurs largement impliquée dans le processus, en défendant dans les amendements qu'elle avait adoptés le souhait de conserver la référence à l'aspiration révolutionnaire des socialistes, qui y donneraient la traduction au travers de leur action réformiste (l'amendement avait été voté à l'unanimité par la convention fédérale présidée à l'époque par Dominique Lefebvre). Il ne s'agissait pas ici de sauvegarder une «vache sacrée», parallèle aux vieilles lunes du putsch révolutionnaire à la sauce bolchévique, mais de considérer que les grands principes de la Révolution Français, transcrits dans la devise de la République «Liberté, Égalité, Fraternité», conservaient leur portée révolutionnaire au sens plein du terme, c'est-à-dire dans la perspective de la transformation de la société, et que n'ayant toujours pas été réalisés dans les faits, ils avaient vocation à être encore et toujours revendiqués par le PS pour ce qu'ils représentaient.

Depuis avril dernier, le rôle du PS se limite à publier des communiqués dépités et sans effets, après chaque nouveau ballon d'essai libéral lancé par un ministre des gouvernements Valls (seuils sociaux, 35 heures, contrôle des chômeurs, à chaque fois derrière le paravent du dialogue social, alors que les confédérations syndicales n'ont rien demandé et se retrouvent ainsi mises sur la défensives face au patronat).

Si Jean-Christophe Cambadélis et le Parti avec lui prétenden résoudre la crise idéologique et culturelle qui étreint toute la gauche européenne, et au-delà, depuis 20 à 30 ans, en 3 mois d'états généraux du PS, ce serait faire preuve d'une naïveté confondante ; ou bien ce serait signer que les états généraux sont bien une stratégie occupationnelle de diversion.

Les militants socialistes doivent pouvoir reprendre la parole et s'exprimer sur les politiques conduites par le gouvernement qui s'éloignent chaque jour un peu plus des valeurs et des principes du socialisme démocratique.Ils doivent pouvoir le faire sans restriction et sans que l'on ne limite leur avis à quelques thèmes choisis pour détourner l'attention. En effet, les questions économiques et sociales, qui sont pourtant au cœur des divergences entre socialistes tant dans le Parti qu'au Parlement, sont volontairement écartées des sujets soumis aux militants dans le cadre des états généraux.

C'est donc un Congrès du Parti Socialiste que nous exigeons désormais de voir convoquer dans les plus brefs délais, dans le respect de ses statuts et de son fonctionnement démocratique !

En effet, comme nous l'avons déjà expliqué plus haut, les statuts du PS disposent clairement que « Le congrès national se réunit dans les six mois suivant les élections présidentielle et législatives. Il se réunit également à mi-mandat. » (Article 3.2.1 - Périodicité du congrès national) ; ainsi après avoir été convoqué régulièrement pour le mois d'octobre 2012, le congrès aurait donc dû être convoqué à nouveau deux ans plus tard en octobre-novembre 2014. C'était l'une des obligations de notre premier secrétaire par intérim qui aurait donc gagné en cohérence à faire de sa préparation la priorité de son début de « mandat ».

Accessoirement cette modification des statuts du PS, effectuée en 2012, lui permettait d'être compatible avec l'introduction des primaires citoyennes pour la désignation du candidat socialiste à l'élection présidentielle. Nous y reviendrons plus bas.

Opportunément, l'organisation des états généraux fournit ici un prétexte pour repousser la date du congrès sine die, une commission d'organisation du congrès est annoncée depuis plusieurs mois et devrait être constituée à l'occasion du Conseil National du dimanche 12 octobre. Là aussi, précisons le la commission d'organisation du congrès est régie par des règles précises : « Commissions de préparation du congrès - Une commission nationale de préparation du congrès est mise en place par le Conseil national. Une commission fédérale de préparation du congrès est mise en place dans chaque fédération. La composition des commissions de préparation du congrès est fixée par le règlement intérieur. La commission nationale de préparation du congrès a pour objet, sous le contrôle du Bureau national, de veiller au bon fonctionnement matériel des opérations et à l’égalité de traitement et d’accès aux facilités administratives entre toutes les contributions. » (Article 3.2.3 des statuts) ; l'article du règlement intérieur qui est signalé ci-dessus est le suivant : « Article 3.2.3 - Commissions de préparation du congrès - La Commission nationale de préparation du congrès a pour objet, sous le contrôle du Bureau national, de veiller au bon fonctionnement matériel des opérations et à l’égalité de traitement et d’accès aux facilités administratives entre toutes les contributions. Elle est mise en place par le Conseil national qui convoque le congrès, elle comprend le Premier secrétaire du parti, les Secrétaires nationaux concernés, désignés par le Bureau national et deux représentants par motion déposée au congrès précédent. »

Il conviendra donc de vérifier si cette fameuse et promise commission d'organisation du congrès respectera nos règles communes.

La date de notre congrès est, elle, soumise à de nombreux aléas depuis l'annonce des états généraux. Désormais, avec le changement de calendrier des élections départementales et régionales, elle est devenue incertaine et d'aucun – parmi les responsables nationaux du Parti, Luc Carvounas, sénateur et secrétaire national en charge des relations extérieures, proche du Premier Ministre – explique qu'un congrès en 2015 impliquerait une grave cacophonie. Ce type d'argument est reproductible à l'infini et l'on attend le moment où nous expliquera que la proximité de l'élection présidentielle n'est plus compatible avec la tenue d'un congrès. Or, tant du point de vue statutaire, donc juridique et administratif, il n'est pas acceptable que le congrès soit repoussé indéfiniment et que sa direction actuel soit prolongée sans vérifier que sa légitimité politique est valide.

Rien n'empêche aujourd'hui le Premier secrétaire de convoquer au printemps 2015 donc avec à peine plus de 6 mois de retard le prochain congrès du PS : le conseil national peut parfaitement sur sa proposition voter avant ou au lendemain des élections départementales la convocation d'un congrès qui se tiendrait au tout début de l'été, avec un vote des militants fin juin avant la fin de la période scolaire et un congrès national lors du premier week-end des vacances d'été.

Il est vrai que jusqu'ici les dirigeants du Parti Socialiste se sont arrangés avec la lettre des statuts du PS, comme l'ont démontré les récentes déclarations croisées du Premier secrétaire par intérim et de son secrétaire national aux relations extérieures : ce dernier indiquait qu'effectivement les primaires citoyennes étaient inscrites dans les statuts du PS depuis octobre 2012, mais qu'il n'y avait pas lieu d'en organiser puisqu'il n'y avait pas de candidats. Il est vrai qu'à deux ans de l'élection présidentielle, peu de candidats ont pensé à se déclarer. Ce qui est plus étonnant c'est que le Premier secrétaire par intérim a indiqué sur les radios qu'il n'y avait pas d'obligation à organiser des primaires citoyennes, car les statuts du PS ne seraient qu'indicatifs !?! On croit rêver. Les statuts du Parti ne sont donc rédigés que de manière indicatives et si c'est le cas il n'y aurait donc pas lieu de les appliquer quel que soit l'article !?! C'est sans doute ce que pourront répondre désormais aux responsables du parti, tous les élus socialistes qui sont en délicatesse avec son fonctionnement : pas besoin de reverser les indemnités d'élus, pas non plus besoin d'une discipline de vote et donc les menaces d'exclusion, très souvent émises ces dernières semaines, ne sont donc elles-mêmes qu'indicatives

Pourtant, dans toute association et organisation politique, les statuts sont la règle commune ; ils doivent être respectés et s'ils ne le sont pas par la direction, ses militants sont en droit d'en contester les décisions devant le tribunal administratif. Or, l'organisation des primaires est bel et bien inscrite dans nos statuts : «Article 5.3.1 - Principe des Primaires citoyennes - Le candidat à la présidence de la République est désigné au travers de primaires citoyennes ouvertes à l’ensemble des citoyens adhérant aux valeurs de la République et de la gauche et coorganisées par les formations politiques de gauche qui souhaitent y participer. Les candidats aux primaires doivent s’engager à soutenir publiquement le candidat désigné et à s’engager dans sa campagne. Au moins un an avant l’élection présidentielle, le Conseil national fixe le calendrier et les modalités d’organisation des Primaires.» Les statuts ne précisant pas si la situation est différente en présence d'un Président socialiste sortant, celui-ci doit donc s'y soumettre.

De fait, cette tendance à s'arranger avec les règles de notre parti (on l'a vu quand Harlem Désir a tenté de compter les absentions pour empêcher l'adoption des amendements au texte de la convention Europe de 2013) traduit une tentativede dévoiement du fonctionnement de notre parti : Jean-Christophe Cambadélis veut pousser à une nouvelle révision des statuts du Parti Socialiste. Celle-ci n'est par ailleurs pas autorisée hors d'un congrès ordinaire.

L'objectif du Premier secrétaire par intérim est implicitement de mettre à bas le système des motions et de thématiser les congrès du Parti : c'est un retour à la SFIO d'avant 1969 ! Sur quelles bases représenter la diversité de pensée du Parti Socialiste, si ce n'est la représentation proportionnelle fondée sur des textes de fond soumis au vote des militants ? Certains ont effectivement de plus en plus de mal à écrire des textes de fond, c'est leur problème ; notons que c'est aussi un problème de considérer que le Parti doit systématiquement être conduit par une majorité pléthorique dont le texte de référence n'a aucune structuration politique, comme c'était le cas de la motion 1 en 2012, et qui soumet ainsi le parti à n'être qu'un espace de gestion des prébendes de différents barons socialistes qu'ils représentent des territoires ou de très anciennes motions qui s'étaient confrontées au vote des militants pour la dernière fois en 1991.

Nous alertons les camarades pour rappeler que la suppression de la représentation proportionnelle des textes a été envisagée deux fois :

  • -> lorsque la SFIO s'est transformée en Section Française de l'Internationale Communiste (qui deviendra le PCF) en décembre 1920 soumettant les militants aux 21 conditions de Zinoviev, la minorité préférant autour de Léon Blum «garder la vieille maison» en conservant la représentation proportionnelle en son sein ;

  • -> aux lendemains de la Libération, en 1946, lorsque Léon Blum, Daniel Mayer et leurs amis – traumatisés par les débats entre tendances et surtout leur affrontement avec Paul Faure, le secrétaire général ultra-pacifiste qui finit par soutenir la Révolution Nationale – obtinrent sa suppression pour que la direction conserve l'intégralité du pouvoir dans le Parti. Mis en minorité dans le même congrès par les amis de Guy Mollet qui devint secrétaire général de la SFIO, ils furent systématiquement écartés de toutes les responsabilités. La SFIO passa les 23 années suivantes à exclure des militants minoritaires, à subir des scissions multiples, à perdre des adhérents et à fondre électoralement ! Ses erreurs politiques expliquent aussi ce chemin funeste, mais son incapacité interne à gérer ses débats et sa diversité ont accéléré l'enfermement et la dégringolade. La refondation du Parti Socialiste entre 1969 et 1974 s'est faite sur la correction de ces erreurs, en réintégrant différents clubs ou micro partis qui s'étaient éloignés de la SFIO (et qui étaient plus à gauche qu'elle) et en restaurant dès 1971 la représentation proportionnelle pour faire du nouveau PS un parti de rassemblement de tous les socialistes !

La représentation proportionnelle, affectée à un vote sur des textes d'orientation, doit donc être impérativement conservée. On ne comprendrait pas qu'au prétexte d'une «thématisation» des congrès, les responsables et dirigeants du parti soient choisis sur un mode incertain, à la tête du client ou en fonction de leur intégration dans une baronnie locale. Ce serait un retour en arrière terrible.

Des adaptations pourraient cependant être réalisées :

  • -> l'inscription dans les statuts du parti que la désignation des candidats du PS pour les scrutins de liste respecte la proportionnelle des motions, ce qui est une pratique courante dans nombre de fédérations mais que conteste encore le secrétaire national aux élections, Christophe Borgel ;

  • -> l'évolution des primaires citoyennes dans le sens du respect du vote militant lors de la consultation sur la rénovation organisée par Martine Aubry, lorsque celle-ci était Première secrétaire : en effet, les militants avaient voté pour deux modèles de primaires – le premier tel qu'elles ont été organisées à l'automne 2001, le second en y associant les autres partis de gauche. Les deux propositions avaient reçu la majorité des suffrages militants, mais c'est le deuxième modèle qui avait recueilli largement le plus grand nombre de votes. Il conviendrait donc que le PS modifie ses statuts pour y intégrer le principe de primaires citoyennes élargies à toute la gauche ;

  • -> la question du rapport au pouvoir de notre parti ressurgit régulièrement. Il est d'autant plus marquant aujourd'hui que le Parti ne joue pas pleinement son rôle depuis deux ans et que la politique gouvernementale tourne le dos au projet adopté en juin-juillet 2011, aux engagements du projet présidentiel de François Hollande et … au texte de la motion majoritaire du congrès de Toulouse. Il convient donc d'adapter nos règles à cette innovation politique : lorsque les actes et les choix politiques d'un gouvernement PS contredit à ce point l'orientation adoptée au congrès précédent, il doit être impératif de convoquer de manière anticipée le congrès du parti pour que les militants se prononcent.

Frederic Faravel 14-07-2012Notre parti a toujours été une organisation démocratique, foncièrement attachée au débat; nous ne pouvons plus entendre les appels au «débat dans le respect» quand ceux-ci visent uniquement à éteindre toute discussion ou délibération collective; nous ne pouvons plus entendre qu'il n'existe pas d'alternative à la politique menée lorsque le seul argument qui nous est opposé est celui de l'autorité institutionnelle et que chaque jour nous démontre l'inefficacité de la politique conduite et son injustice avérée. Si je reviens sur le cadre que certains tentent d'imposer au débat politique, c'est parce qu'il nourrit ce climat délétère chez les adhérents du Parti Socialiste, plusieurs agressions physiques ayant été récemment constatées dans certaines fédérations du parti.

Frédéric FARAVEL

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25 septembre 2014 4 25 /09 /septembre /2014 09:10

PS 95Une fois de plus, le Premier secrétaire fédéral du Val-d'Oise du Parti Socialiste a refusé de soumettre au vote du conseil fédéral une résolution politique qui était proposée par certains de ses membres.

Ainsi, la fédération du Val-d'Oise du PS ne s'est prononcée sur aucun sujet politique depuis les élections municipales et la terrible déroute subie par la gauche, et particulièrement par le Parti Socialiste. Les débats tournent en interne sans débouchés et sans vérification que la parole publique du Premier secrétaire fédéral représente bien l'avis de la majorité du conseil fédéral du PS95. C'est une manière d'appliquer au PS, parti de nature délibérative, parlementaire et régi par la représentation proportionnelle, la violence (symbolique) des institutions de la Vème République, qui soumet toute délibération collective au veto du chef.

Las, nous avons donc décidé de relayer dans toutes les sections socialistes du Val-d'Oise cette proposition de résolution, afin de confronter un petit groupe de responsables politiques qui n'ont plus d'autres arguments que celui de l'autorité à l'expression des socialistes à la base.

Nos camarades Adélaïde Piazzi, Léo Moreau et Sébastien Lombard représenteront également cette résolution lors du prochain secrétariat fédéral. Nous représenterons la résolution lors du bureau fédéral du 20 octobre.

Frédéric FARAVEL

APPEL DE LA SECTION DE ...
POUR LA CONVOCATION D'UN CONGRÈS DU PARTI SOCIALISTE

texte présenté par Pierre Blazy (CAS de Gonesse), Frédéric Faravel (bureau fédéral, Bezons), Xavier Morin (conseil fédéral, Argenteuil), Abdelkader Slifi (bureau fédéral des adhésions, Argenteuil) et Antoine Raisséguier (bureau fédéral, Franconville)

 

En 2012, après cinq années de Sarkozy, nous avons proposé un autre chemin aux Français : celui du redressement dans la justice sociale, qui implique des mesures fortes en matière de redistribution de richesses.

 

Ce n’est pas ce chemin qui a été emprunté.En effet, pas plus le "pacte de compétitivité" et son CICE, que le "pacte de responsabilité", c'est à dire la baisse massive des cotisations sociales financée par la baisse des dépenses publiques, ne figuraient parmi les engagements de campagne de François Hollande. Ils ne figuraient pas non plus dans le projet du PS adopté à l’unanimité en 2011. Le texte majoritaire du congrès de Toulouse n’évoque pas une seule fois le "coût du travail" et se garde bien de plaider pour des coupes sombres dans les dotations aux collectivités !

 

La ligne politique fixée par le Président au gouvernement, fondée sur une option idéologique largement contestable et longtemps contestée par les membres de l'exécutif eux-mêmes, ne peut que désorienter l'électorat de gauche et semer le doute dans la majorité présidentielle.

 

D'autant que les résultatsde cette "politique de l'offre" ne sont pas au rendez-vous et risquent de se faire encore attendre, si l'investissement et le pouvoir d'achat restent insuffisamment pris en compte, comme c'est hélas le cas aujourd'hui. De même, la réduction à marche forcée des déficits publics, dans un contexte de croissance quasi nulle, menace de comprimer un peu plus l'activité économique du pays.

 

Aux élections municipales et européennes,les socialistes ont été très durement sanctionnés. C'est dans ce contexte que des parlementaires socialistes, de plus en plus nombreux, ont tenté d'infléchir les textes gouvernementaux et de rééquilibrer la politique économique et sociale en faveur des catégories populaires et moyennes. Nous sommes à leurs côtés.

 

Mais le débat ne saurait se limiter au seul Parlement, surtout dans les institutions de la Vème République. C'est au sein du Parti Socialisteque se joue désormais l'essentiel de l'avenir de la gauche et de son action au pouvoir. Alors que ses statuts prévoient de convoquer un congrès pour la fin de l'année 2014, le Premier secrétaire par intérim a choisi de repousser l'échéance sine die pour réunir des « États généraux », qui, nous dit-on, doivent « reformuler l'identité socialiste ». La déclaration de principes du PS ayant été réécrite voici moins de 10 ans, on peut se demander si cette démarche est nécessaire et si elle est la solution aux défis de la gauche au pouvoir.

 

Le rôle du PS ne peut se limiter à publier des communiqués dépités et sans effet, après chaque nouveau ballon d'essai libéral lancé par un ministre (seuils sociaux, 35 heures, contrôle des chômeurs…). Les militants socialistes doivent pouvoir reprendre la paroleet s'exprimer sur des politiques qui s'éloignent des valeurs et des principes du socialisme démocratique. Ils doivent pouvoir le faire sans restriction, sans que leur avis ne soit sollicité sur un nombre limité de thèmes.

 

C'est pourquoi nous demandons qu’un Congrès du Parti Socialiste soit convoqué dans les plus brefs délais,dans le respect de ses statuts et de son fonctionnement démocratique. Nous appelons tous les militants socialistes à l'exiger avec nous et à saisir l'occasion de donner à notre parti une orientation politique dénuée d’ambiguïté. Les socialistes pourront alors retrouver la voie du rassemblement à gauche, qui a porté François Hollande à l’Élysée et qui permettra de mettre en œuvre la politique pour laquelle les Français ont élu le Président de la République.

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24 septembre 2014 3 24 /09 /septembre /2014 05:39

 

Un groupe de députés « frondeurs » à l’Assemblée, le jour du vote de confiance au gouvernement Valls, le 16 septembre. De profil, Barbara Romagnan (Doubs), Jérôme Guedj (Essonne) et Laurent Baumel (Indre-et-Loire).LE MONDE | 23.09.2014 à 19h19 • Mis à jour le 23.09.2014 à 19h26 | Par Hélène Bekmezian

 

Le soleil de l'après-midi tape fort, ce 16 septembre, dans le petit jardin attenant à la salle des Quatre-Colonnes de l'Assemblée nationale, où déambule, mains dans le dos, le député socialiste Laurent Baumel. Manuel Valls vient de terminer sa déclaration de politique générale, la deuxième en cinq mois, et l'élu d'Indre-et-Loire, coanimateur du collectif «Vive la gauche», songe au nombre de ses camarades, réunis le matin même à huis clos, qui ont annoncé vouloir s'abstenir lors du vote de confiance.

Encore deux heures et il saura combien de ces députés en désaccord avec la ligne politique du gouvernement ont réellement basculé. Mais il anticipe déjà un nombre moins important que prévu. Un peu abattu, il juge que le premier ministre a été plutôt bon, et évoque avec une pointe d'amertume la «passivité» de ses collègues, voire leur «résignation». A vrai dire, il s'interroge sur la suite de ce mouvement que la presse a surnommé «les frondeurs». Et maintenant ? Maintenant que le noyau dur de la contestation s'est cristallisé à une petite trentaine de socialistes – 10% du groupe –, comment perdurer ? Pris au piège des logiques de parti, des institutions et des ambitions personnelles, les frondeurs ont-ils un avenir ?

 « LIMITES DE L'EXERCICE »

Au surlendemain du vote, lors de sa conférence de presse, François Hollande a posé les bornes : rien n'empêche de «poursuivre le débat , mais «dans le cadre qui est fixé». Ce cadre, c'est la ligne politique du gouvernement mais aussi la Vème République, à laquelle le président a redit son attachement. «Les frondeurs confondent congrès et institutions. François Hollande épouse totalement les institutions et, dans la Vème, les députés n'ont pas le droit de changer le cours des choses», tranche le député socialiste Malek Boutih. L'ex-ministre de la ville, François Lamy, abstentionniste, est lui-même conscient des «limites de l'exercice» : «Le président l'a bien dit, on ne fait pas tomber un gouvernement sans en subir les conséquences, et elles ne se limitent pas à une démission du premier ministre.»

La menace permanente de la dissolution plane sur leur tête, qui serait intervenue en cas d'absence de majorité, comme l'a révélé le chef de l'Etat, mais aussi des armes plus légères, comme le 49-3 ou le 44-3, articles de la Constitution qui permettent de faire adopter un texte sans vote, ou sans amendement non désiré. L'exécutif finira toujours par l'emporter tant qu'ils resteront minoritaires. Quant à former un groupe parlementaire, si l'idée en séduit quelques-uns, ses inconvénients leur apparaissent aussitôt supérieurs à ses avantages.

 UN MOUVEMENT HYBRIDE

Au Parlement, les frondeurs commencent à tourner en rond. «Il fallait d'abord transgresser, installer une démarche politique. Maintenant, le risque est de s'enfermer dans le scaphandre parlementaire, d'être hermétique à l'opinion», prévient l'un des meneurs, Pouria Amirshahi. L'ancien président de l'UNEF-ID, le syndicat d'étudiants, a prévu une grande rencontre, le 27 septembre, avec des personnalités de la société civile, allant de l'acteur Philippe Torreton aux ouvriers de Fralib.

A l'université d'été de La Rochelle, la démonstration de force annoncée des mutins n'a pas eu lieu. Au sein du Parti socialiste, ils n'ont pas essaimé et il n'y a plus de place, Rue de Solférino, pour un mouvement hybride composé de proches de Martine Aubry, de Benoît Hamon, d'ex-strauss-kahniens et de quelques francs-tireurs. Au congrès de Toulouse, en 2012, les futurs frondeurs s'étaient répartis entre la motion majoritaire présentée par Harlem Désir et celle de «Maintenant la gauche», arrivée en deuxième position. Les cartes sont désormais rebattues mais l'exécutif, qui continue en sous-main à surveiller les affaires du parti, ne semble pas pressé de voir convoquer un congrès. Comme l'a annoncé le premier ministre, les élections cantonales devraient se tenir dans «180 jours» : «Ce calendrier électoral fait bien les affaires de l'Elysée, car il rend impossible la tenue d'un congrès et donc tout débouché possible pour les frondeurs», souligne l'un d'entre eux. Sans échappatoire de l'Assemblée, sans inflexion sur la ligne politique, «il n'y a que deux possibilités, assure Jérôme Guedj, l'un des piliers du mouvement. Soit continuer dans un baroud d'honneur, ce qui va finir par lasser tout le monde, soit passer le cap et voter contre». Fin juillet déjà, selon l'hebdomadaire Le Point, le chef de l'Etat confiait en privé : «Quand on fait la fronde, on doit gagner la guerre. On ne s'abstient pas. Sinon, on se retrouve petitement avec sa petite fronde et sa petite guerre.»

NI SÉCESSION NI LEADER
 

Mais la réelle sécession, quasiment personne ne l'envisage. «Nous ne sommes pas dans une logique de scission, notre problème est de peser le plus possible dans un espace dans lequel nous voulons rester», expose Laurent Baumel. A défaut de peser, ils flottent, sans point d'ancrage ni de chute. « Ils se tiennent chaud », ironise Malek Boutih qui, comme une bonne majorité du groupe PS, s'interroge sur leur devenir.

Spécialiste du PS, le chercheur en sciences politiques Rémi Lefebvre estime à un tiers le nombre de députés qui «reprochent aux frondeurs une aventure sans débouché politique». Sans leader, il leur manque une capacité d'entraînement, explique-t-il. Pouria Amirshahi l'admet : «Il est compliqué de faire vivre un mouvement sans candidat à la présidentielle de 2017.» Or Arnaud Montebourg, qui a tenté une approche des frondeurs après sa sortie du gouvernement, à la fin de l'été, n'a pas su les séduire.

«S'il devait y avoir un leader et une incarnation de la fronde, le risque est que chacun revienne à sa petite boutique», craint François Lamy, député de l'Essonne. Ce proche de Martine Aubry prévient qu'il ne faut pas attendre de la maire de Lille qu'elle prenne les rênes de la contestation, même si elle est la plus consensuelle parmi les députés qui lui doivent, pour bon nombre d'entre eux, leur investiture. «Elle n'a aucune envie de chapeauter quoi que ce soit et elle ne se résume pas aux frondeurs», assure-t-il, précisant que les réseaux de l'ex-première secrétaire peuvent et doivent se renforcer à l'intérieur du parti. Quant à s'étendre au-delà des frontières du PS pour former une gauche alternative avec des écologistes, voire des membres du Parti de gauche, c'est «une illusion», tranche un membre du gouvernement : celle de «l'union d'une petite gauche qui deviendrait la grande».

Au-delà des alliances stratégiques, les débats sur le fond risquent de tourner au piège pour les frondeurs. «Ils se sont laissés entraîner dans un débat idéologique de posture qui est un leurre. Le président se sert du débat clivant entre politique de l'offre et politique de la demande pour écarter le vrai débat», estime Malek Boutih. Ils s'enferrent dans des débats macroéconomiques à coups de milliards à redéployer, dans un sens ou l'autre. Eux-mêmes l'admettent, à l'instar du député de la Nièvre Christian Paul : «Il n'y a pas une fracture radicale au sein du PS.» Selon le président de l'Assemblée nationale, Claude Bartolone, c'est «leur vraie faiblesse : ils ne sont pas sur une ligne politique différente».

Sans compter, rappelle lui-même Pouria Amirshahi, qu'ils se divisent sur un certain nombre de questions ou ne les ont pas encore abordées, «comme l'immigration, les relations internationales, le terrorisme, l'écologie…». Désabusé, un ancien ministre du gouvernement de Jean-Marc Ayrault et cacique du PS déplore sous couvert d'anonymat «la fin des débats dans les fédérations et une certaine dépolitisation des députés».

L'avenir de ce phénomène de dissidence parlementaire, «complètement inédit sur le plan historique», à en croire Rémi Lefebvre, n'est pas écrit. A court terme, c'est probablement une bataille de tranchées sur le budget qui s'annonce à l'Assemblée. Mais ensuite, l'année 2015 et ses doubles élections locales (départementales et régionales) demeurent imprévisibles. Un avenir d'autant plus incertain que le fort renouvellement des députés en 2012 et l'arrivée d'un grand nombre de primo-députés dans la majorité ont bousculé les us et coutumes.

 «ON VA MOURIR DE TOUTE FAÇON»

«Ces jeunes élus n'ont pas l'habitude de la discipline parlementaire. Ils sont arrivés au Parlement sans en connaître les codes et ils sont donc d'autant plus enclins à s'en affranchir. Ils sont plus émancipés et donc plus imprévisibles», décrypte Rémi Lefebvre. L'historien rappelle que sur les vingt-neuf abstentionnistes du 16 septembre, vingt sont des nouveaux élus. Une grande partie de ces députés savent qu'ils ont été élus sur des circonscriptions fragiles, explique le chercheur. La plupart se sentent sur un siège éjectable et savent qu'ils ne résisteraient pas à un changement de majorité présidentielle en 2017. «Alors, ils pensent qu'en se démarquant, ils sauvent peut-être leur chance d'être réélus», poursuit-il.

Quelques-uns, comme Pouria Amirshahi, que l'un de ses complices traite désormais d'«illuminé», préfèrent s'accrocher avant tout à leurs idées : «Perdu pour perdu, au moins, j'assume mes convictions, je n'irai pas dans l'abîme avec eux. Je me fous totalement d'être réélu, moi je veux changer le monde», dit-il. Pour Laurent Baumel, «la question est de savoir si nous appartenons à la génération qui accompagne le naufrage historique de la gauche au pouvoir, ou si l'on se bat». Avant d'ajouter, sans illusions : «On va mourir de toute façon.  Kamikazes, les frondeurs ? «La notion de suicide, comme chez les animaux, n'existe pas chez l'homo politicus», assure Malek Boutih, qui jauge à une dizaine seulement le nombre de «députés de base prêts à brûler tous leurs vaisseaux». Une proportion sacrificielle acceptable pour l'appareil socialiste.


Parti socialiste : les frondeurs ont-ils encore... par lemondefr

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22 septembre 2014 1 22 /09 /septembre /2014 22:44

nouveau-logo-psLa seule réponse apportée à nos déroutes municipales et européennes a été d'imposer de l'extérieur la nomination de Jean-Christophe Cambadélis comme Premier Secrétaire par intérim. Alors que les statuts du Parti Socialiste impliquent de convoquer un congrès pour la fin de l'année 2014, ce dernier a choisi de repousser l'échéance sine die pour réunir des « états généraux », qui doivent selon lui « reformuler l'identité socialiste ». Programme ambitieux s'il en est !

On peut s'étonner d'une telle feuille de route quand la déclaration de principes du PS a été réécrite voici moins de 10 ans. Si cette démarche va jusqu'à son terme, nous l'investirons pour que ne soient pas éludées les débats économiques et politiques du moment. Mais nous restons convaincus qu'ils ne sont pas la solution aux défis de la gauche au pouvoir.

Depuis avril dernier, le rôle du PS se limite à publier des communiqués dépités et sans effets, après chaque nouveau ballon d'essai libéral lancé par un ministre des gouvernements Valls (seuils sociaux, 35 heures, contrôle des chômeurs, à chaque fois derrière le paravent du dialogue social, alors que les confédérations syndicales n'ont rien demandé et se retrouvent ainsi mises sur la défensives face au patronat).

Si Jean-Christophe Cambadélis prétend résoudre la crise idéologique et culturelle qui étreint toute la gauche européenne, et au-delà, depuis 20 à 30 ans, en 3 mois d'états généraux du PS, il fait preuve d'une naïveté affligeante pour un dirigeant politique de ce niveau ; ou bien il se moque des socialistes et signe là sa stratégie de diversion.

Les militants socialistes doivent pouvoir reprendre la parole et s'exprimer sur les politiques conduites par le gouvernement qui s'éloignent chaque jour un peu plus des valeurs et des principes du socialisme démocratique. Ils doivent pouvoir le faire sans restriction et sans que l'on ne limite leur avis à quelques thèmes choisis pour détourner l'attention. En effet, les questions économiques et sociales, qui sont pourtant au cœur des divergences entre socialistes tant dans le Parti qu'au Parlement, sont volontairement écartées des sujets soumis aux militants dans le cadre des États-Généraux.

C'est donc un Congrès du Parti Socialiste que nous exigeons désormais de voir convoquer dans les plus brefs délais, dans le respect de ses statuts et de son fonctionnement démocratique !

Car, il y a ici aussi une tentative de dévoiement du fonctionnement de notre parti : Jean-Christophe Cambadélis veut pousser à une nouvelle révision des statuts du Parti Socialiste. On a vu qu'il avait effectivement des difficultés pour respecter ceux que nous avons et qui ont pourtant été révisés grâce à un travail collectif et adoptés à l'unanimité lors du congrès de Toulouse en octobre 2012 ! L'objectif du Premier secrétaire par intérim est implicitement de mettre à bas le système des motions et de thématiser les congrès du Parti : c'est un retour à la SFIO d'avant 1969 ! Sur quelles bases représenter la diversité de pensée du Parti Socialiste, si ce n'est la représentation proportionnelle fondée sur des textes de fond soumis au vote des militants ? Certains ont effectivement de plus en plus de mal à écrire des textes de fond, c'est leur problème ; notons que c'est aussi un problème de considérer que le Parti doit systématiquement être conduit par une majorité pléthorique dont le texte de référence n'a aucune structuration politique, comme c'était le cas de la motion 1 en 2012, et qui soumet ainsi le parti à n'être qu'un espace de gestion des prébendes de différents barons socialistes qu'ils représentent des territoires ou de très anciennes motions qui s'étaient confrontées au vote des militants pour la dernière fois en 1991.

Nous alertons les camarades pour rappeler que la suppression de la représentation proportionnelle des textes a été envisagée deux fois :

  • -> lorsque la SFIO s'est transformée en Section Française de l'Internationale Communiste (qui deviendra le PCF) en décembre 1920 soumettant les militants aux 21 conditions de Zinoviev ;

  • -> aux lendemains de la Libération, en 1946, lorsque Léon Blum, Daniel Mayer et leurs amis – traumatisés par les débats entre tendances et surtout leur affrontement avec Paul Faure, le secrétaire général ultra-pacifiste qui finit par soutenir la Révolution Nationale – obtinrent sa suppression pour que la direction conserve l'intégralité du pouvoir dans le Parti. Mis en minorité dans le même congrès par les amis de Guy Mollet qui devint secrétaire général de la SFIO, ils furent systématiquement écartés de toutes les responsabilités. La SFIO passa les 23 années suivantes à exclure des militants minoritaires, à subir des scissions multiples, à perdre des adhérents et à fondre électoralement ! Ses erreurs politiques expliquent aussi ce chemin funeste, mais son incapacité interne à gérer ses débats et sa diversité ont accéléré l'enfermement et la dégringolade. La refondation du Parti Socialiste entre 1969 et 1974 s'est faite sur la correction de ces erreurs, en réintégrant différents clubs ou micro partis qui s'étaient éloignés de la SFIO (et qui étaient plus à gauche qu'elle) et en restaurant dès 1969 la représentation proportionnelle pour faire du nouveau PS un parti de rassemblement de tous les socialistes !

logo MLG 95Enfin, pour répondre à la légende qui voudrait que les états généraux aient connu un précédent constructif dans les 20 dernières années : Les États Généraux, c'était Rocard en 1993 et ça n'était que le préalable à un congrès au Bourget qui avait acté des réformes statutaires (les nôtres datent d'octobre 2012 cf. plus haut) et ce congrès devait ouvrir une série de conventions. Il n'y a pas eu d’états-Généraux sous Lionel Jospin mais il ouvrit 3 conventions nationales qui ont duré un an et demi ; Cambadélis nous propose deux mois et demi, effectivement on aura résolu tous les problèmes d'ici là.

Frédéric FARAVEL

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15 septembre 2014 1 15 /09 /septembre /2014 09:57

jaures.jpgCe n'est pas parce que le titre de cet article ressemble à celui d'une recette charentaise, qu'il faut immédiatement considérer que j'y parlerai «cuisine» politique. Non l'édition 2014 des universités d'été socialistes de La Rochelle, qui se sont déroulées du vendredi 29 au dimanche 31 août, ont été plutôt un bon cru. La Rochelle pour un socialiste, c'est l'occasion de se former en assistant et parfois en participant à des débats et à des ateliers – et contrairement à 2013, le PS avait cette année de nouveau fait l'effort d'inviter des intervenants qui ne fleuraient pas bon la consanguinité socialiste – à condition que le programme soit enthousiasmant. C'est aussi l'occasion de retrouver des potes de toute la France, qu'on ne voit que deux ou trois fois l'an et avec qui on a aujourd'hui la chance de rester en contact avec les réseaux sociaux ; se retrouver autour d'une table garnie si possible. C'est également la possibilité de discuter avec d'autres camarades socialistes, de débattre, de s'engueuler, si possible pas devant les caméras des chaînes d'infos en continu qui sont venues assister au festival de Cannes des socialistes (oui parce que pour quelqu'un qui fréquente comme moi régulièrement les UEPS depuis 1996, toutes celles qui sont intervenues depuis 1997 se sont transformées en partie en une sorte de plagiat de montée des marches sur lesquelles certains responsables politiques rivalisent de fausse coolitude ou autoritude). C'est enfin un moment important où en parallèle des rassemblements socialistes, les sensibilités et sous chapelles (il y en a énormément à la hauteur de la balkanisation de la motion dite majoritaire du parti) tentent de se compter ; c'est aussi le moment où le seul courant constitué du Parti – Maintenant la Gauche, courant de la gauche du PS – ayant reçu les suffrages des militants fait le point sur la situation politique.

La Rochelle 2014 méritait donc bien un petit compte-rendu chronologique et forcément subjectifah ben oui parce que j'avais oublié de dire que tout de même à La Rochelle on réfléchit et on discute de la situation et de l'avenir de la France, de l'Europe et du monde. Et rien qu'à regarder l'état de la première, on a eu de quoi faire cette année.

Jeudi 28 août 2014 (prolégomènes) :

Un peu plus de 25h nous sépare désormais du discours de Manuel Valls devant les participants de l'université d'été du MEDEF. Ohh, ce n'est pas la première fois qu'un premier ministre socialiste s'y rendait, Jean-Marc Ayrault himselfavait déjà fait le chemin. Mais il est vrai que Manuel a frappé fort : «J'aime l'entreprise !» a retenu la presse, dans ce qui était en fait une déclaration d'amour langoureuse aux revendications libérales du patronat, le Premier ministre confondant ainsi entreprises et entrepreneurs, capital productif et actionnariat et oubliant constamment que ces entreprises vivent car au quotidien des salariés s'échinent à les faire tourner, dans des conditions de travail pas toujours au top et sans aucun pouvoir réel sur la conduite des affaires. Ça promet La Rochelle déjà qu'avec la démission forcée de Montebourg, Hamon et Filipetti, pour une pécadille (pas très maline, c'est Henri des Landes qui l'a dit) qui ne leur aurait attirés aucune remontrance un mois et demi plus tôt, puis la nomination du gouvernement le plus social-libéral que le pays ait connu sous une majorité socialiste, on était servi

dylan_fred.jpgLe plus important n'est pas là pour le moment, mon pote Dylan vient d'arriver à la maison pour qu'on parte ensemble en covoiturage le lendemain. On partage le repas avec Clém c'est un moment agréable.

Vendredi 29 août 2014 (matin) :

Lever 6h, départ 6h37, on roule bien à l'aube en région parisienne à la fin du mois d'août. Avec quelques pauses, nous arrivons un peu avant midi à La Rochelle. Le temps de passer récupérer les petits colliers à fiches plastifiées qui nous identifierons tout au long du week-end comme des socialistes en goguette, et nous prenons le temps de déjeuner entre le village en bois et un des bassins du vieux port.

Vendredi 29 août 2014 (après-midi) :

Les choses sérieuses commencent pour moi dès 13h30 pour un premier briefing, salle Héron, du staff d'organisation de l'université d'été et des membres du collectif national des formateurs du Parti dont je suis. Outre les questions habituelles d'organisation, on évoque la grande nouveauté de ce week-end : les camarades socialistes lambda auront le droit de poser des questions lors des plénières. Ils sont évidemment sélectionnés avant la séanceet très sérieusement accompagnés dans leur démarche par le staff.

À 14h30, on se retrouve sur la terrasse des UEPS avec quelques camarades de Maintenant la Gauche, Bertrand, Dylan, Léo, Martine, Gérald, Charlotte, Genevièvepour faire le point sur les infos à transmettre à nos camarades sur les différents rdv du week-end. Ambiance détendue et organisée, on est content de se retrouver, on prend un verre ensemble, rien n'empêche de joindre l'utile à l'agréable. On commence à discuter de la situation politique et économique du pays, du remaniement, de la confirmation des errements libéraux et inefficaces du gouvernement. Une journaliste de France 2 vient se greffer à nos discussions, elle en tire finalement peu de choses, comme le font souvent (et ils le feront à plusieurs reprises durant le week-end) les journalistes avec des militants politiques : alors qu'on essaie d'aborder au fond les raisons des difficultés économiques du pays, les solutions qui existent, les mauvaises qui sont privilégiées, France 2 ne retiendra que des considérations électorales ou tactiques : «les socialistes n'ont pas fait campagne et voté pour cette politique, et nos électeurs non plus.» (retrouvez ici le reportage de France 2 dans le JT de 20h du vendredi 29 août 2014à partir de 6'57'')

On fait aussi un point avec nos camarades Marie-Noëlle Lienemann, Paul Quilès et Emmanuel Maurel sur le repas du courant le soir même à la Marée.

PSE FredLe reste de l'après-midi est gentiment chaotique toutes les 5 mn, on croise un camarade qui veut discuter et échanger sur nos impressions. Chourka m'accroche au stand du PSE pour le lancement de la nouvelle campagne des socialistes européens sur les réseaux sociaux #MyDemocracyMatters : «toi je sais que tu auras des choses à dire !» Voilà qui est fait, mes préoccupations démocratiques européennes : la relance économique plutôt que l'austérité, et préférer les citoyens européens aux gouvernements.

Dans l'après-midi, la presse nous apprend que parmi les signataires de l'appel très creux et ambigus des «200», beaucoup n'avaient pas été consultés, ou sur un texte différent ou avaient donné leur accord avant le remaniement et ont changé depuis d'avis, ou encore que les nouveaux ministres ou sous ministres avaient signé comme députés, mais que leurs suppléant(e)s ne partagent pas du tout leur avis. On apprend aussi que le SO a menacé de se mettre en grève ce week-end à cause des déclarations de Macron sur les 35h, forçant le premier secrétaire du PS par intérim à demander à Matignon de démentir... Matignon le fera avec ambiguïté «on n'y touchera pas sauf si les partenaires sociaux le demandent». Sournois.

17h15 : c'est l'heure de retrouver le collectif national des formateurs pour faire un point avec Émeric Bréhier, secrétaire national du PS en charge de la formation et de la rénovation politique (proche de Pierre Moscovici). Son projet n'est pas inintéressant, il veut muscler le secteur formation en accord avec le Premier secrétaire par intérim du PS et remettre la formation idéologique au premier plan, alors que nous sommes surtout sollicités aujourd'hui pour des formations techniques (prise de parole, conduite de réunion, direction de campagne électorale, communication écrite), donc on forme des militants de la « prise du pouvoir » mais on ne s'occupe jamais du message qu'ils ont à défendre. Il y a effectivement un malaise depuis longtemps pour moi et je partage l'ambition de notre SN sur le sujet. Mais comment déterminer le base idéologique commune minimum à transmettre alors que notre parti subit avec violence l'affirmation volontariste de politiques libérales par le gouvernement et surtout qui le détermine ? Émeric fera une réponse convenue mais finalement fuyante : on a une déclaration de principes et les états-généraux éclairciront le reste. Je trouve ça un peu court car je ne suis pas sûr que cela permette de répondre pour le contenu de toutes les formations proposées, que les états-généraux ne traiteront pas des questions économiques et sociales, et que cela ne garantit pas l'équité dans l'élaboration concrète des contenus des formations sujet sur lequel il ne m'a pas répondu.

La Maree Emmanuel camarades18h45 : je retrouve quelques camarades à l'entrée du restaurant La Marée pour accueillir les camarades de Maintenant la Gauche qui vont dîner ensemble. On attend 130 personnes, on sera finalement 150, et ça se presse déjà devant l'entrée dans une joyeuse désorganisation.

Emmanuel La MareeCoïncidence du soir, les amis de Martine Aubry se sont retrouvés pour un apéro sur la terrasse de La Marée, Gilles Pargneaux explique à ses ouailles la bonne nouvelle : «Martine va parler !», il suffit donc d'attendre qu'elle veuille bien le faire

19h15 : nous sommes installés, Emmanuel Maurel prend la parole avec combativité et détermination «nous ne laisserons pas le Parti Socialiste à ceux qui ne le sont plus !» La salle applaudit à tout rompre, évidemment elle est acquise, mais ça réchauffe de se retrouver ensemble.

Lever tôt et bagnole dans les pattes, je suis crevé, je rentre me coucher après avoir passé un bon moment avec les camarades.

Samedi 30 août (matin) :

encan bloque8h30, je suis scié ! Avant d'arriver à l'encan les CRS ont établi un barrage filtrant avant même les puces de mer ; les mecs du SO sont là pour faire entrer les militants badgés. Ils partagent avec moi la même sidération devant la disproportion du dispositif. Tout le parking en face de l'Encan est vidé, ni les Rochelais, ni les touristes, ni bien sûr d'éventuels manifestants ne peuvent circuler. Jamais cela n'avait été fait, ni sous Jospin ni sous Ayrault. La parano a dû s'emparer du staff de Manuel Valls pour qu'il exige un tel dispositif.

9h00 : j'ai décidé d'assister à la plénière «Qu'attend le mouvement social de la politique ?» La plupart des camarades de Maintenant la Gauche sont partis à l'université assister à la réunion de «Vive la Gauche !» avec Marie-Noëlle Lienemann et Jérôme Guedj. Bruno Le Roux et Emmanuel Maurel sont là pour le PS, aux côtés de toutes les syndicats de salariés. La plénière est animée par Karine Berger.

table ronde mouvement socialLe président du groupe PS s'interroge en plénière sur la représentativité des syndicats puis explique en plénière que les états généraux devront redéfinir la base idéologique des socialistes, eu ben non ça c'est le rôle d'un congrèsun grand blanc suit son intervention. Karine Berger doit demander aux militants présents de bien vouloir applaudir le camarade Bruno ; applaudissements polis mais très tièdes. Bruno est un peu pâle.

table ronde mouvement social EmmanuelEmmanuel prend la parole et rappelle que la thématique des rapports du mouvement social avec la politique pose la question profonde de l'identité du PS. «Faire vivre le dialogue social ce n'est pas réduire la représentation des salariés en changeant les seuils» deux phrases tonnerre d'applaudissements ! Comment expliquer qu'on nous annonce «une loi contre les seuils qui supprimerait des représentants du personnel alors qu'on déplore un manque de dialogue social !»

ecran Emmanuel mouvement socialIl répond au Premier ministre qui devant le MEDEF avait oublié les salariés : «Si nous aimons les entreprises c'est avant tout parce que nous sommes aux côtés des salariés.[] Les salariés sont d'autant plus productifs qu'ils sont bien protégés et correctement payés !» «Peut-être que le mouvement social n'a pas toujours raison mais on a toujours tort de ne pas le prendre en compte[] car la mission du PS c'est de donner un débouché politique au mouvement social» et non de transcrire sans recul des négociations sociales sous domination du MEDEF. À chaque fois, Emmanuel Maurel est chaudement applaudi, les syndicalistes sourient.

Le camarade de la CGT interviendra un peu plus tard pour rappeler que sa confédération et certaines autres comptent plus de 600 000 adhérents, soit plus que tous les partis politiques additionnés en France. Voilà pour la représentativité.

Nous quittons l'Encan pour retrouver sur le chemin les centaines de camarades qui reviennent de la réunion de «Vive la Gauche !» ; Marie-Noëlle Lienemann et Jérôme Guedj y ont défendu une position ferme face aux dérives de l'exécutif, les autres frondeurs sont encore un peu ambigus mais tous ont la volonté de porter une exigence de gauche au Parlement pour qu'il cesse d'être dominé et écrasé par un exécutif néo-libéral. On sait que la venue de Christiane Taubira a été chaleureusement accueillie par les quelques 800 militants présents, par sa présence elle a montré que le débat était indispensable, mais on sait pourtant que la presse ne retiendra que ce déplacement et écrasera toute question politique de fond dans son rapport.

Les camarades mettent du temps à rentrer car il faut faire tout le tour du bassin de l'encan pour relier l'université d'été à l'université de La Rochelle ; en effet, la passerelle qui enjambe le bassin a été opportunément relevée ce matin, il paraît que c'était pour des raisons de sécurité et pas du tout pour compliquer la tâche à certains.

CGTJe retrouve Gérald, Martine et quelques autres camarades qui rentrent avec Marie-Noëlle Lienemann et Jérôme Guedj. Ensemble nous décidons de traverser la place qui longe le quai de la georgette. Une imposante manifestation de la CGT s'y déroule depuis le matin. Les manifestants nous accueillent chaleureusement, ravis que des socialistes osent aller à leur rencontre, eux qui sont tenus à l'écart par un solide encadrement des CRS. Le débat s'engage, ils expriment le sentiment de d'incompréhension face à la politique conduite depuis 2 ans, le sentiment de trahison quant au détournement de leur vote du 6 mai 2012, la perplexité quant aux possibilités qui existent de redonner au Parti Socialiste sa mission première. Nous ne désespérons pas, nous expliquons notre volonté de peser pour réorienter la politique gouvernementale et rassembler enfin la gauche, que l'exécutif s'échine pourtant à désunir. Mes camarades repartent et je reste discuter plus longuement avec les militants syndicalistes, pour creuser avec eux les problèmes et les convaincre que rien n'est perdu. Certains sont aussi militants du PG ou du PCF, ils pensent que les querelles sur la stratégie aux municipales a profondément handicapé le Front de Gauche auprès des électeurs. Ils se font des idées, voilà bien une chose qui est à mille lieux des préoccupations de nos concitoyens. Je leur explique pourquoi selon moi la stratégie de Mélenchon est une impasse, qu'elle divise la gauche plus qu'elle ne permet de construire une «alternative» entre deux gauche supposées irréconciliables, alors que notre électorat est profondément unitaire. En quoi, pour le FN, le renfort d'électeurs de gauche dans le nord et l'est du pays est une menace grandissante qui se nourrit de la colère d'avoir vu leur vote de mai 2012 détourné, menace d'autant plus forte, que les électeurs socialistes choisissent toujours plus de s'abstenir. Enfin, que l'enjeu véritable n'est pas tué le PS qui serait irrémédiablement tombé dans les mains des libéraux comme Valls ou Collomb, mais qu'au contraire l'enjeu est dans le PS qu'il ne faut pas laisser à ceux qui ne sont plus socialistes.

Nous nous quittons avec sympathie ; il n'est pas dit que nous militerons ensemble prochainement mais nos discussions sont une base nécessaire pour maintenir les portes ouvertes.

Gerard Sebaoun12h45 : Nous nous retrouvons devant l'encan avec quelques camarades du Val-d'Oise : Jean-Pierre Blazy, Gérard Sébaoun (en photo ci-contre), tous deux députés, Maxime Lonlas, Antoine Raisséguier, Steven Dutartre. Nous décidons de partir ensemble pour rejoindre le gymnase Gino-Falorni, où se tient le pot des fédérations départementales socialistes d'Île-de-France. Après un quart d'heure de marche, nous arrivons dans une salle inadaptée, bruyante, surchauffée, sans suffisamment boissons pour accueillir les militants qui s'y pressent par centaines également. La sono rend l'âme avant même les prises de paroles ; nous n'attendons donc pas que Jean-Paul Huchon explique à l'assemblée pourquoi il veut à nouveau être candidat à la présidence de la Région Île-de-France. Nous regagnons le village en bois pour déjeuner en trouvant Dylan en route. Moment convivial où nous discutons de la manière de mieux faire connaître aux militants valdoisiens notre démarche commune, qui n'est pas la constitution d'un nouveau courant mais la volonté de ramener le parti à ses valeurs et le travail législatif en cohérence.

Samedi 30 août (après-midi) :

Je regagne la salle plénière. La table ronde sur l'égalité s'y tient, Benoît Hamon conclut : «on peut échouer parce qu'on a été empêché, qu'on rencontre des obstacles, qu'on est battu. Mais on peut aussi échouer parce qu'on a rien tenté ! Rien n'est perdu !» Je fais partie de ceux qui aurait aimé qu'il explique ce qu'il eut fallu tenter, mais le message est reçu par la salle qui applaudit à tout rompre. Christiane Taubira se livre ensuite à un exercice dans lequel elle est passée maître : émouvoir la salle aux larmes par la beauté et le lyrisme de son verbej'avoue ne pas avoir retenu si elle a voulu nous délivrer un message concret.

Lienemann partis17h00 : Arrive le moment attendu de la plénière qui doit réunir l'ensemble des partis de gauche du pays. C'est à Marie-Noëlle Lienemann qu'on a fait appel pour animer la table-ronde, ce n'est pas un hasard car elle reste l'une des rares dans le PS à être capable de faire parler et travailler ensemble les différentes composantes de la gauche. Elle rappelle qu'aucun progrès, rien de grand ne peut se faire dans ce pays sans le rassemblement de la gauche, que la menace de l'extrême droite peut être un facteur de rassemblement comme ce fut le cas pour le Front Populaire mais qu'il ne suffit pas à tenir ensemble nos familles si nous n'avons pas de projets communs.

Nous subissons les quatre premiers intervenants : Jean-Luc Laurent (MRC) trop long, Jean-Luc Benhamias (FDES) bordélique qui nous annonce que la raison d'être de son tout nouveau mouvement est uniquement de soutenir le Président de la République, Robert Hue (MUP) chaotique qui soutient le Président tout en dénonçant chaque élément de sa politique, enfin Jean-Michel Baylet (PRG) qui nous fait son numéro de tribun hâbleur franco-occitan et menace la direction du PS qu'il ne reste bientôt plus personne pour les accompagner si ce n'est eux.

Pierre Laurent partisArrive enfin Pierre Laurent, secrétaire national du PCF, il va faire un tabac ovationné debout à plusieurs reprises par la salle plénière, où n'en déplaise à Luc Carvounas qui se rassurait par un mensonge, les militants de Maintenant la Gauche étaient largement minoritaires : il a failli ne pas venir (il aurait eu tort) car «Le nouveau gouvernement, le discours devant le MEDEF, le détricotage de la loi ALUR, ça fait beaucoup pour la semaine». Pour chaque sujet abordé, il rappelle que «la politique menée par le gouvernement est minoritaire à gauche et dans le pays», que «le contrat[du 6 mai 2012] a été purement et simplement déchiré par François Hollande» mais que nous pouvons nous rassembler car «une autre politique est possible». Difficile pour Emmanuelle Cosse de réussir à enthousiasmer la salle après une telle énergie, pourtant elle va arriver à plusieurs reprises, exprimant une colère partagée par les militants socialistes quand elle a vu la veille le gouvernement céder aux lobbiesimmobiliers et enterrer la loi ALUR, une loi progressiste voulue par les socialistes, préparées ensemble et votées par toute la gauche ! Elle rappelle que nous avons déjà travaillé ensemble socialistes et écologistes pour bâtir un projet commun que François Hollande a depuis foulé aux pieds. Alors les écologistes restent disponibles pour un projet commun, mais s'il s'agit de mettre en œuvre le social-libéralisme il faudra se passer d'eux.

Derrière Jean-Christophe Cambadélis oscillera entre dérision et sermonnage pour tenter de garder une contenance devant la salle. Les leçons seront retenues pour le lendemain.

Samedi 30 août (soirée) :

Il est l'heure de rejoindre la salle municipale du quartier de Tasdon pour l'assemblée générale de Maintenant la Gauche. Nous sommes plus nombreux encore que le repas de la veille, le double assurément.

AG MLGEmmanuel a rappelé que nous sommes les seuls à exister en tant que courant structuré du PS, fort de deux années d’expression constante sur la politique gouvernementale et de contre-propositions. Il a également exprimé son scepticisme sur la pertinence des États Généraux, après la lecture du document officiel qui s’apparente plus à un QCM qu’à une réelle feuille de route.

La démarche est intéressante. Effectivement, nous devons prendre en compte l’évolution de la société, mais on peut cependant s'étonner d'une telle feuille de route quand la déclaration de principes du PS a été réécrite voici moins de 10 ans.

trio MLGSi le Premier Secrétaire par intérim prétend résoudre la crise idéologique et culturelle qui étreint toute la gauche européenne, et au-delà, depuis 20 à 30 ans, en 3 mois d’États généraux du PS, il fait preuve d'une certaine naïveté….à moins qu’il s’agisse ici, ce qui est plus vraisemblable, d’une stratégie de diversion.

Nous considérons qu'il ne faut pas bâcler cette démarche, qui exige que l’on prenne le temps de la réflexion et qui nécessite la contribution des militants comme celle d’intellectuels de gauche, dont l’apport peut être déterminant.

C’est un travail de longue haleine. Si le projet va jusqu'à son terme, nous nous y investirons pour que ne soient pas éludés les débats économiques et politiques du moment. Mais nous restons convaincus qu'ils ne sont pas la solution aux défis de la gauche au pouvoir.

Soyons clairs, l’urgence est de définir une ligne politique. Aujourd’hui, des conceptions divergentes traversent le Parti Socialiste. Nous le voyons bien avec la perception de la politique menée par le gouvernement.

Il nous parait donc essentiel d’intervenir en mettant en avant les questions/réponses créant clivage et qui doivent permettre au Parti Socialiste de parler haut et fort. Il doit dire quelle est la politique à suivre dans la période troublée que traversent la France et le monde.

Notre exigence reste avant tout la tenue d’un congrès dans les plus brefs délais, d’ailleurs fixé à mi-mandat présidentiel selon les statuts du Parti.

Gérard Filoche nous a alertés sur la nécessité d’être vigilants dans les débats internes et d’empêcher que se réalise ce que certains souhaitent, c’est-à-dire l’effacement du PS. Jérôme Guedj, Marie-Noëlle Lienemann et Paul Quilès ont répondu aux interventions de plusieurs camarades sur la position à adopter vis-à-vis de «Vive la gauche !» et sur les États Généraux. Il ne s'agit pas de construire un nouveau courant mais de rassembler les militants pour soutenir les parlementaires qui veulent redonner du sens à leur action face aux dérives d'un exécutif libéral.

La soirée se termine, avec Aurélie, Élodie, Sébastien², Léo et quelques autres camarades nous partons dîner dans un bar à tapas, rue de la chaîne, non loin de la Tour Saint-Jean de La Rochelle. Un vrai moment de détente et de convivialité, que nous poursuivrons dans un bar à Rhum, rue Saint-Jean.

repas samedi soirDepuis quelques heures, des autocars affrétés depuis l'Essonne venaient d'arriver à La Rochelle pour préparer la salle du lendemain, où dansent encore les participants des universités d'été des socialistes.

Dimanche 31 août (matin) :

9h00 : devant l'encan, se pressent déjà des centaines de camarades. Ceux-là n'ont visiblement pas fait la fête la veille au soir.

Quand on arrive dans la grande salle organisée pour accueillir quelques 3 500 auditeurs, tout a été préparé selon un rituel inédit : des petits drapeaux sont installés sur tous les sièges, fanions nationaux, drapeaux blancs au logo du PS, verts et roses du MJS. Le but est évident : mettre en condition l'auditoire pour en faire une foule de supporters et non plus de militants.

Les discours de Jean-Christophe Cambadélis et Manuel Valls dimanche matin, sans surprise, ont montré un écart alarmant entre leurs prises de position qui se voulaient inscrites dans la tradition progressiste de la gauche et la réalité des actes du gouvernement au quotidien. Le Premier Secrétaire par intérim a ainsi noyé le poisson avec un certain talent.

Mais c'est vers le discours du Premier Ministre que tout était évidemment fait pour converger. Personne ne déniera à Manuel Valls son habileté, mais il l'aura mise au service de la confusion et de la malice. Tout d'abord comment supporter que l'émotion du décès du Président du Conseil Régional de Languedoc-Roussillon soit utilisée pour gagner la salle à sa cause en introduction. Ensuite, Manuel Valls a fait une nouvelle démonstration de son adéquation avec Clemenceau plutôt qu'avec Jaurès, dont nous commémorions le centenaire de l'assassinat : il nous a assommé de rappel aux grands et généreux principes républicains, à la grandeur de l’État et à son autorité. Mais comme le disait Jaurès on ne peut séparer la République de l'idéal de justice sociale sans laquelle elle n'est qu'un mot. Et comme Georges Clemenceau, ces principes républicains généreux restent des mots creux quand il s'agit de la situation sociale des salariés du privé, des fonctionnaires, des chômeurs, qui sont les premières victimes de l'inefficacité économique et de l'injustice sociale de la politique de l'offre et de la rigueur budégaire excessive. Manuel Valls réduit la République à son seul mot. Il évite d'aborder précisément les problèmes de fond, la politique de l'offre qu'il défend depuis toujours et qui échoue aujourd'hui en France comme hier ailleurs. Quel socialistes pourrait le contredire quand il s'agit en principe de renforcer l'éducation nationale ? Mais comment supporter la description d'une entreprise où seuls comptent les dirigeants aux yeux du premier ministre, qui oublient les travailleurs qui eux créent véritablement la richesse, y souffrent et s'y voient priver d'un droit de regard efficient sur la conduite des affaires ? Manuel Valls fait de l'entreprise un autre mot creux à destination des médias, alors qu'une partie de la salle siffle sa conception tronquée du monde du travail et de la création, lui donne en pâture à ses suporters les militants socialistes qu'ils qualifient d'irresponsables parce que désormais combattre un patronat irresponsable serait en soi combattre l'activité économique !?!!!

La démonstration de sa volonté de piéger l'assistance, d'en détourner une partie contre l'autre et de tendre artificiellement les comportements, sera faite dans le dernier tiers de sa très longue allocution : il s'offusque des procès d'intention qui serait à de jeunes ministres récemment nommés et tout porte à croire qu'il décrit à la salle le très polémique Emmanuel Macronquand il cite finalement Najat Vallaud-Belkacem, nouvelle icône gouvernementale de jeunesse et de loyauté, pour offrir son visage ému aux grands écrans de l'encan. Évidemment, certains ont sifflé à l'idée de voir des lauriers tressés à l'ancien banquier et le Premier ministre se fait une joie de dénoncer à la foule de ses groupies ceux «qui ne prennent pas la peine d'attendre la fin de ses phrases».

Tout au long du discours, la tension et l'agressivité est montée dans la salle entre les auditeurs. Moi-même entourés de dizaines de supporters essonniens de Manuel Valls, je ne pouvais pas faire un commentaire sans être sermonné : «de toute façon c'est parce que vous avez voté Martine, vous n'avez toujours pas digéré sa défaite !» (?!!??) Et quand on me dit «le parti tu l'aimes ou tu le quittes !» je réponds «mon parti je l'aime et j'y reste ! Mais lui le déteste !» En effet, combien de fois Valls nous expliqué que le socialisme était une idée du passé et qu'il faudrait abandonner le Parti Socialiste.

Une fois, le discours définitivement terminé, les chaînes d'infos attendent les militants aux abords de la salle. Ceux qui répondent aux questions des journalistes et exposent un regard critique sont immédiatement violemment et verbalement agressés dans une ambiance hystérique devant les caméras. Je m'interposerai pour permettre à un jeune camarade (jamais vu) de terminer son propos ; le journaliste poursuivra avec moi, j'en ferai les frais de la même manière, au point de ne pouvoir entendre les questions qui me sont posées pendant un bonne minute.

C'est donc avec des sentiments mêlés que je quitte La Rochelle ; vendredi et samedi ont été riches en échanges. Le dimanche a été construit pour corriger la réussite des deux premiers jours et faire monter le conflit. C'est assez triste.

Dylan m'a trouvé deux passagers supplémentaires pour remonter à Paris ; nous nous réconfortons devant une côte de Bœuf avant de monter dans la 206.

Frédéric FARAVEL

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24 juin 2014 2 24 /06 /juin /2014 19:14

PS_95.jpg C'est le titre du projet de résolution fédérale qui a été présenté lundi 23 juin 2014 lors du conseil fédéral du PS Val-d'Oise. Elle a été élaborée et présentée par des membres des instances fédérales issues des différentes motions du Parti. Malheureusement, au terme d'un débat de deux heures sur les raisons de nos deux défaites électorales consécutives et la politique économique et sociale conduite par le gouvernement, la direction fédérale a refusé de soumettre le texte au vote du conseil fédéral.

Bq1u36UCEAE8uB7.jpgCette attitude est inexplicable et regrettable alors que deux mois après l'échec des municipales nos instances fédérales n'ont toujours pas officiellement pris position sur la situation politique et que le Premier secrétaire fédéral avait annoncé qu'une résolution serait soumise en ce sens lors du conseil fédéral (ce qui n'a pas été fait).

Les arguments d'autorité avancés pour refuser ce vote ont été médiocres, le pire étant "vous êtes la minorité, nous sommes la majorité, il n'y a pas de raisons de faire un vote" : il n'est pourtant pas contestable que les annonces de janvier 2014 et les déroutes électorales ont secoué tous les socialistes ; je suis convaincu que les membres du conseil fédéral auraient pu s'exprimer librement sans que leur conduite soit dictée par leurs chefs de motion ou qu'on leur refuse la possibilité de le faire.

Vous pouvez télécharger ici le texte de ce projet de résolution, je vous laisse vous faire une idée par vous-mêmes.

 

Frédéric FARAVEL
Mandataire départemental de Maintenant la Gauche
motion 3 du Parti Socialiste

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24 juin 2014 2 24 /06 /juin /2014 18:38

Logo_BVA.gifDès le petit matin du samedi 21 juin 2014, la presse et les chaînes d'information ont fait une partie de leurs titres sur deux sondages BVA réalisés pour I télé et Le Parisien/Aujourd'hui en France. Ces deux études d'opinion illustrent largement le piège de la phraséologie médiatique.

La première portait sur les « députés frondeurs » et l'identité des personnalités représentant le mieux la gauche. C'est la première thématique qui est importante.

En effet, tels qu'ils ont été présentés sur I télé et dans Le Parisien, les résultats de ce sondage indiquaient des chiffres contrastés sur le soutien de l'opinion aux « frondeurs », ces 41 parlementaires socialistes qui préférèrent s'abstenir sur la feuille de route économique présentée par le gouvernement le 29 avril dernier et qui avec une cinquantaine d'autres proposent des amendements visant à corriger le PLFR et PLRFSS soumis par Manuel Valls en ce début d'été.

  • - 52% des « sympathisants de gauche » les soutiennent contre 44 ;

  • - 61% des « sympathisants socialistes » les désapprouvent ;

  •  - les Français, toutes sensibilités confondues, seraient partagés : 47% désapprouvant, 45% soutenant.

Mais la question posée à l'échantillon de 952 Français majeurs les 19 et 20 juin, était-elle « soutenez-vous les députés frondeurs ? », comme le laissent entendre les médias ? Non, une lecture un peu sérieuse et honnête de la fiche de cette étude ne permet pas de faire une telle réponse.

Voici la question posée aux répondants :

« Une quarantaine de députés socialistes ainsi que des députés verts et communistes pourraient s’allier pour voter contre ou s’abstenir lors de l’examen des budgets rectificatifs et de financement de la sécurité sociale à l‘Assemblée nationale.

Vous personnellement, êtes-vous plutôt favorable ou plutôt opposé à cette alliance ? »

Ainsi, les agents de BVA ont, si l'on veut un peu pousser le trait, demandé aux Français interrogés et notamment parmi eux aux sympathisants socialistes : « soutenez-vous une démarche qui visent à mettre en minorité le gouvernement à l'Assemblée Nationale en montant dans son dos une alliance à rebours avec ses opposants de gauche ? » Voilà une formulation qui pourrait faire hérisser le poil à nombre de « sympathisants socialistes » et c'est exactement ce que l'on retrouve dans le résultat du sondage. En tout cas, la question est aussi honnête que si on avait posé celle-ci en miroir : « soutenez-vous les courageux députés frondeursqui proposent d'appliquer les engagements de campagne de François Hollande, que celui-ci semble avoir définitivement trahi en menant une politique sociale-libérale affichée avec Manuel Valls ? », sans fondement et contre-productif n'est-ce pas ?

Évidemment, une telle stratégie – si elle existait – peut convenir aux électeurs écologistes (71% favorables) ou du Front de gauche (80% favorables), puisqu'ils désapprouvent de plus en plus violemment l'orientation gouvernementale et même sa composition. La vraie information politique contenue dans ce sondage l'est donc par ricochet, puisqu'elle ne concerne ni les « frondeurs » ni ceux qui s'interrogent sur la portée de leur(s) initiative(s) dans l'opinion : c'est une bonne moitié des parlementaires écologistes (avec Jean-Vincent Placé et François de Rugy notamment) qui ont désapprouvé le départ de Pascal Canfin et de Cécile Duflot du gouvernement en avril et qui pestent contre les critiques de leur parti contre le pacte de responsabilité ; ces parlementaires écologistes sont donc non seulement en contradiction avec leur parti, mais ils le sont avec 71% des « sympathisants écologistes ». Pour une fois, il semble (en dehors d'un probable choix de conviction) que le parti EELV ait mieux compris les choix de son électorat que ses parlementaires.

LOGO.jpgDe fait, cette étude ne nous apprend rien d'autre sur la relation des « frondeurs » à l'opinion. Si la question avait été « Êtes-vous favorables aux propositions parlementaires de l'Appel des 100 ? » ou « Soutenez-vous la démarche des députés frondeursqui souhaitent déposer des amendements pour corriger le pacte de responsabilité du gouvernement ? », alors peut-être que l'on aurait pu gloser sur la nature et l'importance du soutien ou de la désapprobation de l'opinion à l'égard de ces parlementaires. Les sondés n'ont pas pu répondre à une question qu'on ne leur a pas posée.

Personne dans ces conditions ne peut afficher sérieusement que les « frondeurs » seraient donc soutenus par 52% des « sympathisants de gauche » ou désapprouvés par 61% des « sympathisants socialistes » (ces derniers représentant la moitié des premiers). S'il venait à l'idée des instituts Ipsos, Ifop, Harris ou BVA de faire un vrai sondage sur la question du soutien à cette démarche, il convient d'ici là que « l'appel des cent » fasse connaître plus largement ses propositions dans l'opinion.

Jusqu'ici le seul sondage grandeur nature qui est une signification, ce sont les deux cinglantes défaites essuyées par la gauche aux municipales puis aux européennes : si l'on fait une analyse sérieuse et détaillée des résultats, elles démontrent que l'électorat socialiste – celui de François Hollande au 1er tour de l'élection présidentielle – s'est abstenu massivement lors de ces deux scrutins ; elles démontrent également que l'électorat de gauche ne fait pas une distinction forte entre la gauche et les socialistes, la théorie des deux gauches irréconciliables de Mélenchon n'est donc pas valide aux yeux d'un électorat finalement unitaire. La gauche peut bien mourir comme le dit Manuel Valls, mais de la politique qu'il mène avec François Hollande.

C'est d'ailleurs ce que raconte la deuxième partie du sondage qui concerne les personnalités représentant le mieux la gauche selon les « sympathisants » de gauche : avec 33 et 32% Martine Aubry et Jean-Luc Mélenchon arrivent largement en tête. Ils représentent dans l'esprit collectif une aspiration plus ou moins fantasmée à une alternative politique à François Hollande et Manuel Valls (9 et 16%) ; les représentants de l'exécutif sont extrêmement bas, ce qui démontre le décrochage (peut-être irrémédiable) du propre électorat du Président de la République et malgré des premières fastes dans les sondages les raisons profondes du déclin annoncé du Premier Ministre.

Un mot encore sur le deuxième sondage BVA publié samedi matin. Ils visent prétendument à mesurer le rapport des Français aux « réformes ». La traduction rapide nous proposent que les Français souhaitent amplifier les réformes (74%, dont 67% à gauche et 84% à droite) mais ne veulent plus faire de sacrifices (63%).

Une fois encore c'est le contenu de ses réformes qui n'est pas explicité, ni dans les questions, ni dans le rapport fait dans les médias (ici I télé puisque le sondage était commandé par la chaîne d'infos). Il ne suffit pas de citer les dossiers sur lesquels il faudrait faire les réformes – « marché du travail, les retraites, les règles d’indemnisation du chômage » – encore faut-il s'interroger dans quel sens les Français de droite et de gauche (avec leur diversité) souhaiteraient aller. Cela éclairerait sans doute sur l'apparent hiatus entre le soutien à l'amplification des réformes à 74% et le refus à 63% de faire de nouveaux sacrifices pour « réduire le déficit de la France ». Les sujets sur lesquels sont notés les sacrifices à faire – « retraites, impôts, statut, services publics »– indiquent pour le coup que les réformes engagées précédemment sont vraisemblablement désapprouvées par les Français, notamment à gauche, et qu'au-delà de ces réformes antérieures c'est l'orientation générale sociale-libérale de la politique du gouvernement qui est en cause. BVA conclue son analyse sur une phrase à double sens : « La réforme n’est pas forcément synonyme de sacrificespour les Français. Ce mot peut même, pour certains, signifier qu’il faut réinjecter de l’argent public ». En effet, si l'on souhaite que le mot « réforme » regagne pleinement son acception positive, c'est peut-être en regardant du côté des « frondeurs » et d'une gauche unie que se trouve la solution.

Frédéric Faravel

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16 juin 2014 1 16 /06 /juin /2014 18:45

VallsSamedi dernier, notre nouveau Premier Ministre Manuel Valls a sévèrement mis en garde les socialistes lors du conseil national du PS sur les risques auxquels étaient confrontés la gauche et le pays : « La gauche peut mourir », « Elle n'a jamais été aussi faible dans l'histoire de la Vème République »,« Notre pays peut se défaire et se donner à Marine Le Pen ». Si toute la gauche peut s'accorder sur ces constats et ces risques, les divergences avec le diagnostic de leurs causes et les remèdes à lui apporter atteignent aujourd'hui un stade critique.

J'apporterai néanmoins un petit bémol à l'opération de communication politique du Premier Ministre en direction des militants socialistes : les européennes de 2014 – extrêmement graves – ne sont pas la pire des élections pour les forces de gauche depuis 1958. Le plus mauvais score de la gauche, coupable de n'avoir rien compris à Mai-68, ce sont les présidentielles de 1969 avec 32,22 % des suffrages exprimés. Par ailleurs, d'autres élections avec un plus fort taux de participation ont confronté la gauche à ses incohérences : les législatives de 1993 avec 38,63 % et plus encore les présidentielles de 2007 avec 36,44 %, notre candidate de l'époque particulièrement soutenue par le Premier Ministre d'aujourd'hui, nous promettant « d'autres victoires ». À la suite de chacune d'entre elles, le Parti Socialiste – sans aller à chaque fois jusqu'à la refondation de 1969-1971 – avait décidé de se ressourcer en réorientant son projet à gauche.

141051477La gravité de la situation de la gauche en 2014, c'est que la gauche, et plus particulièrement le Parti Socialiste qui en est encore la principale force, vient d'essuyer deux graves défaites consécutives et sans appel. Aux municipales, l'électorat de gauche – et notamment l'électorat socialiste (celui de François Hollande au premier tour) – a ostensiblement boudé les urnes, mettant en échec de nombreuses équipes municipales socialistes et ramenant le nombre de communes de plus 9 000 habitants dirigées par la gauche (toutes sensibilités confondues) au niveau de 1971, alors même que les sondages indiquaient à peine quelques semaines auparavant la popularité maintenue des maires de gauche. Aux élections européennes, le trait s'est amplifié aboutissant au plus bas score historique du PS, les électeurs socialistes déçus qui en 2009 avaient voté Europe Écologie désertant cette fois-ci le scrutin, le Front de Gauche ne tirant aucun profit des déconvenues socialistes et écologistes. Dans le Nord et le Nord-Est de la France, des électeurs socialistes ont franchi le cap en votant directement pour l'extrême droite (Vous pourrez retrouver ici des analyses détaillées des scrutins municipaux et européens, déjà mises en ligne sur ce blog).

L'explication donnée par l'exécutif et ses principaux soutiens est non seulement insuffisante mais inexacte pour décrypter ces déroutes et justifier les choix qui ont été opérés après coup : les résultats de mars et de mai 2014 seraient la conséquence d'une accumulation de situations locales et du temps (trop long) que mettraient les réformes engagées à donner des résultats. Il conviendrait donc d'accélérer la mise en œuvre de la politique choisie.

Sur le premier argument, pas la peine d'y revenir trop longtemps : à défaut de pouvoir le mesurer dans les villes déjà dirigées par la droite, l'opinion était favorable aux municipalités de gauche et à la politique qu'elle menaient. Ce sont donc essentiellement des raisons d'ordre national qui ont justifiée la « vague blanche » dans l'électorat socialiste.

Sur le second argument, il est symptomatique de constater que l'exécutif méprise à ce point sa base sociale en considérant qu'il est incapable de patience ou de comprendre la justesse des politiques menées dont la transformation en résultats prendrait du temps. La déconnexion avec notre électorat vient bien des interrogations et des désaccords de nos électeurs avec le cap économique et social proposé. Les Français sont déçus et parfois en colère par rapport à ce qu'on avait promis lors de la présidentielle en 2012. Cette déception et cette colère nourrissent le sentiment que leurs votes et la politique ne peuvent plus peser sur leur devenir, que le pouvoir réel est ailleurs, que les citoyens sont en incapacité de choisir en conscience leur destin collectif : c'est cela qui explique l'abstention massive et le basculement d'un certain nombre d'électeurs de gauche dans le vote FN lors des dernières municipales et surtout européennes (qui ne sont pas des élections secondaires).

Des choix politiques contestables sur le fond et non partagés

Laurent-Baumel.jpgLaurent Baumel, député d'Indre-et-Loire et un des animateurs de l'appel des 100, analysait ainsi le fond de l'intervention du Premier Ministre ce 14 juin : « Le discours était bon sur la forme, comme toujours avec Valls, mais intransigeant sur le fond. C'est le retour à un rocardisme débridé, c'est-à-dire la certitude d'être le seul à comprendre le réel. » Peut-être suis-je plus sévère que ce parlementaire, mais l'analyse défendue par l'exécutif démontre qu'il est loin de comprendre le réel et la société. Dans tous les cas, convaincu de sa propre révélation, Manuel Valls exhorte les socialistes à « tenir bon, dans la durée » sur les « réformes » et « les choix économiques qui sont les nôtres ». « Avec le président de la République, nous considérons que c'est le cap qu'il faut maintenir » Le choix de la politique de l'offre, il « l'assume » et il n'a « qu'une certitude : prendre un autre chemin nous conduirait à l'échec ».

Pourtant, ce sont bien les choix engagés depuis l'automne 2012 (et pas seulement depuis janvier 2014) qui risquent de conduire la gauche à mourir. Car ces choix ne sont pas partagés par nos concitoyens, ils nous l'ont déjà dit à plusieurs reprises et le rediront sans doute encore à l'occasion des prochains scrutins régionaux et départementaux en 2015.

Et, à propos, où ont été faits ces choix ? Ont-ils été élaborés collectivement dans notre famille politique et respectent-ils nos engagements ? Ni l'un, ni l'autreni la ratification du traité Merkozy sans modification, ni le Pacte de compétitivité, ni le contenu de l'ANI, ni la réforme des retraites, ni aujourd'hui le pacte de responsabilité ne sont cohérents avec les engagements de la campagne présidentielle de François Hollande. Ils sont même en contradiction flagrante avec les textes adoptés par le Parti socialiste que ce soit ceux issus (adoptés à l'unanimité) des conventions du parti avant les primaires citoyennes de l'automne 2011 ou celui de la motion majoritaire lors du congrès de Toulouse qui avait suivi la victoire de François Hollande.

Pour Thomas Legrand, dans sa chronique matinale et "intérienne" de ce 16 juin 2014, le débat au sein du PS dépasse donc désormais la question de savoir si l'on veut gouverner dans la durée ou marquer la société de son empreinte, mais porterait sur la politique économique et la justice sociale, les "frondeurs" se référant aux 60 engagements de François Hollande. Le Gouvernement d'aujourd'hui paierait ainsi l'inconséquence des responsables socialistes lorsqu'ils étaient dans l'opposition à ne pas avoir été "réalistes". Pour Carlos Da Silva, le Président de la République ne serait désormais pas comptable des engagements de campagne mais uniquement de la situation qu'il a trouvée en arrivant au pouvoir.

On peut tout de même s'interroger sur la pertinence de la politique menée pour gouverner dans la durée le pays, ce qui n'est d'ailleurs pas incompatible avec la volonté de marquer la société. Cela se croise avec la question du réalisme supposée de la politique économique conduite : cette politique de l'offre ne peut pas donner de résultats dans une économie anémiée où les carnets de commande des entreprises resteront d'autant plus vides que l'investissement public est handicapée par une vision malthusienne de l'économie. Alors que l'austérité est en échec dans toute l'Europe, qu'elle a nourri la défaite des partis conservateurs aux européennes, et la montée des partis europhobes et eurosceptiques, c'est précisément maintenant que la gauche au pouvoir choisit de renier sa nature profonde, sa mission historique, pour mettre en œuvre une politique vouée à l'échec.

L'intériorisation de la « monarchie républicaine »

Il ne reste donc plus face à la contestation qui monte à gauche et dans les rangs du PS que des arguments d'autorité et de discipline et qu'à effrayer les militants socialistes en pointant du doigt des « frondeurs » qui seraient eux et non pas la politique menée les fossoyeurs de la République, préparant par leur révolte l'arrivée de Marine Le Pen. La ficelle est grosse. « Il faut de la fermeté, de l'autorité pour gouverner la France ». Et avec une violence verbale terrible « la reparlementarisation à outrance des institutions n'est pas tenable. » Cette dernière phrase est une rupture de plus avec le socialisme démocratique, pour celui qui déjà préfère Georges Clemenceau à Jean Jaurès ou Léon Blum.

4438205_6_fc17_emmanuel-maurel-vice-president-ps-du_dd62870.jpgEmmanuel Maurel l'a dit avec précision dans son entretien au Mondedu samedi 14 juin : « le PSa toujours eu une lecture très critiquede la Vème République, dénonçant le risque de la personnalisation du pouvoir, la marginalisation du Parlement, l'insuffisante démocratieparticipative. Contrairement à la droite, la gauche ne croit pas au culte du chef et ne considère pas que tout doit procéder d'un seul homme, fût-il exceptionnel. Ces critiques, nous les avons oubliées et François Hollande s'est lovédans les institutions commeses prédécesseurs.Le désarroi actuel vient aussi de cela.Il est urgent de se désintoxiquer de la Vème! »

On ne saurait mieux dire la part et les conséquences de ce désarroi : Ce qui est arrivé « au bout de quelque chose », ce qui est à bout de souffle, ce n'est pas le socialisme démocratique comme semble l'avoir en tête le Premier Ministre, c'est la logique même de monarchie républicaine de la Vème République et la marque délétère qu'elle appliquée sur tous les partis de gouvernement et même au-delà : comme le disait Paul Quilès « avec un Premier ministre quiexécutela politique définie par le Président, une majorité parlementaire contrainte, un parti majoritaire sans marge d’initiative et peu écouté[qui] empêche qu’aboutisse toute expression déviante. » Cette dérive toujours aggravée des institutions de la Vème converge aujourd'hui sur une situation ubuesque, où le gouvernement a certes encore (mais pour combien de temps ?) une majorité parlementaire, mais plus de majorité politique dans le pays, car il a peu à peu produit « une base d'une telle étroitesse qu'on se demande sur quel équilibre elle maintient encore ». C'est le résultat d'un exécutif qui refuse à sa majorité tout rôle conséquent et qui décide seul des orientations du pays enfermés dans des certitudes pourtant contredites par les faits.

Un dialogue social de plus en plus inconsistant

Ainsi aboutit-on à l'échec du dialogue social, qu'avait tant mis en avant le candidat Hollande. Certes les syndicats n'ont pas toujours raison mais il est plus que contre-productif de supputer qu'ils auraient constamment tord. Le conflit actuel à la SNCF marque plus qu'un désaccord sur le fond – il suffirait de « peu de choses » notamment qu'on réponde sur l'unité réel du système ferré en France, sur l'avenir du fret et sur le financement de la réforme – mais trouve sa raison dans la perte de confiance dramatique entre le gouvernement de gauche et une partie toujours plus large de son électorat, perte de confiance qui amène à la radicalisation croissante d'une partie des agents.

4368564_7_9995_une-manifestation-d-intermittents-du-spectac.jpgL'entêtement et les contradictions exprimées sur l'accord du 22 mars concernant le régime des intermittents du spectacle démontre, s'il en était encore besoin, la conception en réalité minimaliste du dialogue social qui anime l’exécutif. Son agrément au 1er juillet par le gouvernement signerait une catastrophe culturelle pour notre pays, bien au-delà des risques d'annulation ou de perturbation des festival de l'été 2014, et surtout elle contribuerait à tendre plus encore le climat social qui n'avait jamais été aussi mauvais depuis 25 ans sous un gouvernement de gauche.

Si Manuel Valls veut l'épreuve de force (notamment avec la CGT, qui avait clairement appelé à voter Hollande), cela ne peut déboucher que sur l'échec politique de la gauche et l'affaiblissement des syndicats (déjà structurellement faibles en France) ; cela aboutirait à une insatisfaction et une instabilité sociale, qui se traduira peut-être pas dans des conflits sociaux spectaculaires, tant la lassitude des salariés est grande. Mais elle nourrira à coup sûr les désillusions qui fournissent les plus gros renforts à l'abstention et au vote FN.

Manuel Valls rentrerait alors dans l'histoire sociale du pays, comme l'équivalent français de Margareth Thatcher qui avait fondé sa stratégie politique sur la défaite et l'humiliation des Trade Unions : à long terme, les Travaillistes l'ont lourdement payé à la fin de leur mandat quand ils furent confrontés à la crise financière et sociale (leur base sociale n'était plus encadrée et les conflits qui existaient s'étaient radicalisés) ; on peut aussi y voir une des causes de l'irrésistible ascension des europhobes (seule voie de contestation encore possible dans le Royaume Uni). La France vivrait tout cela en accéléré.

Et le PS dans tout cela ?

Conséquence de la logique monarchique de la Vème République, le parti majoritaire ne participe pas à la définition de la stratégie politique du quinquennat. L'un des solutions auraient été que « le PS soit plus activement associé à l'élaboration des politiques publiques et redevienne le cœur battant de toute la gauche. » Pour cela, il eut fallu qu'il prenne le risque de parier sur une nouvelle pratique du pouvoir, et ne conçoive pas son précédent congrès comme une mise en coupe réglée de ses principaux responsables dans l'attente des consignes de l'exécutif. Maintenant la Gaucheet une partie de la motion 4 ont cependant tenu le rôle que certains avaient choisi d'abandonner volontairement comme contre-pouvoir. Portant, depuis près de 2 ans, on refusait d’entendre notre inquiétude face aux conséquences du régime infligé au pays, alors même que nous préconisions d’autres réponses à la crise. Et voici qu’aujourd’hui, nombre de ceux qui s’étaient faits discrets jusqu’ici et parfois même qui défendaient la ligne suivie au sommet, joignent leur voix aux critiques et aux demandes de ceux qui étaient fustigés hier et souvent traités d’irresponsables ou d’incompétents. La logique de la Vème République veut que cette révolté d'une centaine de parlementaires ne puisse pas déboucher.

3798841_cambadelis.jpgC'est donc au Parti Socialiste que revient à nouveau le nœud du problème. Samedi 14 juin, le premier secrétaire par intérim, Jean-Christophe Cambadélis, a proposé que des États-Généraux des socialistes travaillent en décembre prochain sur « la nouvelle carte d'identité du socialisme », qu'une université permanente de la transition écologique soit organisée avec les autres forces de gauche. Toutes ces initiatives ne peuvent être positives, mais elles restent extrêmement confuses dans leur présentation et elles ne seront pas soumises au vote des militants : bref, il s'agit de leur « rendre la parole » mais surtout de trancher. Et surtout pas de trancher les débats sur la politique économique qui sont aujourd'hui la principale source de leurs inquiétudes, et celle du peuple de gauche.

Pour débloquer le pays et pour débloquer la gauche, il est urgent que le PS ouvre un vrai congrès dont le premier secrétaire par intérim était incapable samedi de donner la date alors que statutairement nous sommes tenus d'en organiser un à la moitié du quinquennat, donc en décembre 2014 ou janvier 2015. La situation n'est pas figée : la volonté de changer est présente plus que jamais dans les rangs socialistes. Y compris au sein de ses instances : les soutiens du premier ministre se sont empressés d'expliquer aux médias que celui-ci avait reçu une standing ovationsamedi (déférence à sa fonction oblige !?) et que la contestation s'était calmée au Conseil National. Pour qui connaît cette instances très codifiée où les rapports de force sont souvent figés d'un congrès à l'autre, cette remarque était vraie pour les précédents CN où ne remuait que l'habituelle « aile gauche ». Le samedi 14 juin y a vu ses thèses soutenues par au moins la moitié des représentants socialistes, tant à l’applaudimètre que dans les interventions, et ce malgré la demande de la direction du Parti d'inviter largement les simples adhérents parisiens à remplir les travées de la Maison de la Chimie.

Henri-Emmanuelli-Pierre-Laurent-Guillaume-Balas-Laurent-Bau.jpgLe prochain congrès du PS est donc ouvert, que tous ceux qui veulent voir renaître la gauche décident de nous rejoindre maintenant. C'est après que comme le disait Emmanuel Maurel, on pourra « proposer un nouveau pacte majoritaire aux écologistes et aux communistes. Mais ce pacte ne peut naître qu'après un débat sur le fond et sur la base d'une nouvelle orientation. Je suis optimiste, tout peut encore bouger, mais à condition d'écouter et de changer. Le président est paraît-il quelqu'un de pragmatique. Il a l'occasion de le prouver, en renouant avec cette belle ambition de sa campagne, celle du rêve français. »

Frédéric FARAVEL

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28 mai 2014 3 28 /05 /mai /2014 08:39

Les résultats français des élections européennes du 25 mai 2014 marquent une profonde rupture du jeu électoral hexagonal. Jamais les partis de gouvernement (du PCF jusqu'à la droite de l'UMP) n'ont été aussi faibles : ils ne rassemblent que 69,1% des suffrages exprimés, contre 81,9% en 2009 ou encore 81,2% en 1994.

Le Front National est évidemment le principal vainqueur du scrutin ; il recueille près de 25% des suffrages – 4.711.339 voix avec une abstention de 57,57% (contre 6.421.426 voix avec une abstention de 20,5% aux présidentielles) ; le parti d'extrême droite enverra 24 eurodéputés (soit le tiers de la délégation française au parlement européen).

Le Parti socialiste subit sa pire défaite électorale, 13,98% sous le résultat qui avait coûté à Michel Rocard sa "carrière politique" en 1994 (14,49%). Sa délégation au Parlement européen – 13 députés – sera la plus faible jamais envoyé à Bruxelles et Strasbourg (15 en 1994).

Alors que la participation a légèrement progressé depuis 5 ans (+2 points), ce scrutin européen reste complexe et doit s'analyser au niveau européen, comme au niveau national, et au sein de chaque famille politique, pour comprendre notamment d'où vient cette progression de 15 points du vote en faveur du Front National.

La défaite du Parti Socialiste français participe de celle du candidat du PSE à la présidence de la Commission européenne mais elle n'en est pas la seule responsable.

Martin Schulz 2La candidature et la campagne de Martin Schulz, qui marquait le passage du PSE (comme les autres grandes familles politiques européennes) à une volonté de politiser l'élection des députés européens et de faire de la présidence de la Commission un enjeu démocratique, dans une interprétation très optimiste des traités.

Elle marquait un clivage réel et en tout cas plus fort avec la logique de cogestion avec les conservateurs du PPE qui dominait jusqu'ici la vie du Parlement européen. La volonté de mettre en place des eurobonds, de suspendre la négociation sur le traité de libre-échange transatlantique, de relancer l'investissement européen et donc d'en finir avec la logique d'austérité marquait sa campagne plus à gauche malgré la difficulté évidente à construire une coalition avec la Gauche radicale européenne très divisée sur la question.

France_Info_sondage_14-05-2014-copie-1.jpgLe recul attendu des partis conservateurs au pouvoir dans presque tous les pays d'Europe allait évidemment profiter aux partis populistes eurosceptiques ou europhobes, mais les sondages laissaient espérer une nette progression du PSE et de ses alliés au sein du groupe S&D. Les derniers sondages quelques jours avant le vote plaçaient S&D autour de 200 eurodéputés (stabilité), la gauche radicale à 55 eurodéputés (+20), les écologistes à un peu moins de 50 eurodéputés (-7/-10). La légère progression de la gauche européenne toutes sensibilités confondues (insuffisante pour une majorité) contrastait avec les fortes pertes attendues pour le PPE : on lui promettait 205 à 210 eurodéputés (-63/-68) ; le groupe libéral ALDE était également en recul avec 55 eurodéputés espérés contre 83 dans le parlement sortant. Dans cette configuration, une majorité de gauche, même étendue aux Libéraux semblaient plus stables qu'une majorité de droite conservatrice et libéral‪… la première condition était cependant que le PSE arrive en tête, et pour cela, la différence pouvait se faire en France, seul État-membre dont le gouvernement soit à direction socialiste sans coalition avec des forces de droite ou du centre.

Même si les sondages n'étaient pas encourageants, avec 14 députés élus en 2009 toute progression en France permettait de se rapprocher de l'objectif. Martin Schulz a particulièrement labouré notre pays dans cet espoir. Avec 13 eurodéputés, le PS français fait encore moins que ce qui est attendu – les slogans contre l'austérité en Europe ce sont fracassés contre la perception qu'ont les électeurs de la politique gouvernementale – mais l'écart s'est encore plus creusé à l'échelle européenne : le PSE n'atteint que 189 sièges, la gauche radicale progresse moitié moins qu'attendu, les écologistes et les libéraux perdent moins que prévu. La décrue du PPE correspond aux prévisions. C'est donc du côté droit de l'euroscepticisme et de l'europhobie que s'est jouée l'élection européenne.

BokSGmiCQAEIEar.jpgLe PS français n'est pas le seul à avoir fait moins qu'attendu et sa baisse entre deux scrutins européens ou par rapport aux sondages n'est pas la pire subie au sein de la famille socialiste européenne, bien qu'au regard des moyens politiques et institutionnels dont ils disposent nos camarades sociaux-démocrates ont de quoi être étonnés par notre situation.

Plusieurs partis socialistes européens étaient attendus à des niveaux plus importants :

  • - les sociaux-démocrates lituaniens recueillent avec 23% près de 15 points de moins que ce que lui octroyait les enquêtes d'opinion ;

  • - le SMER-SD du gouvernement slovaque -14 points ;

  • - le PS portugais -7 points (essentiellement au profit des communistes de la CDU) ;

  • - le PS bulgare -9 points ;

  • - le PSO luxembourgeois -9 points

  • - le PSOE -6 points (au profit de la gauche communiste, des «indignés» ou des républicains catalans) ;

  • - le SAP suédois -6 points ;

  • - le SDS slovène -2 points ;

  • - le SLD polonais -2 points ;

  • - les SD danois -2 points ;

  • - le Labour britannique -2 points ;

  • - le PS belge et son homologue flamand du sp.a : -2 points ;

  • - le SDE estonien -2 points...

Évidemment, ne pas recueillir les deux points attendus n'a pas les mêmes conséquences entre la Pologne et ses 40 millions d'habitants ou la Slovénie. Ou encore la Grande Bretagne. Idem si on compare la Bulgarie ou le Luxembourg.

exit poll NL Ipsos-NOS 22-05-2014Ces déconvenues ne peuvent pas être compensés par les résultats meilleurs que prévus en Italie (+1), en Roumanie (+3) ou en Croatie (+5). D'une manière générale, la social-démocratie européenne n'est pas en grande forme, si aux Pays-Bas les résultats sont relativement conformes aux sondages et ne relèvent pas de la mauvaise surprise qui nous auraient coûté la présidence de la Commission, le PvdA fait seulement 9,4% ce qui est catastrophique pour un parti gouvernemental qui avait recueilli près de 25% des voix aux législatives de 2012.

D'une manière générale, les partis du PSE paient les politiques libérales qu'ils mènent nationalement de leur propre chef ou en coalition avec des libéraux (France, Pays-Bas, Danemark) ou peinent à retrouver la confiance de leurs électeurs qui ont subi des politiques d'austérité quand ils étaient au pouvoir (Grande-Bretagne, Espagne, Portugal) ou carrément l'échec économique (Pologne, Hongrie) ; ils sont les premières victimes du désintérêt des électeurs pour les élections européennes (80% d'abstention en République tchèque, 87% en Slovaquie, 71% en Hongrie).

Enfin, dans certains pays, la faiblesse relative des partis socialistes ne profitent pas suffisamment à la gauche radicale qui se présentait en listes concurrentes (Portugal) ou "souffre" de la concurrence de petites listes de gauche (Espagne), ou encore fait moins qu'espéré (France, République tchèque, Pays-Bas, Belgique).

En France, un score historiquement bas de toute la gauche

europeennes_1999-2009-2014.jpgLe PS n'est pas la seule victime du scrutin européen. Avec 34% des suffrages, l'ensemble des voix portées sur les partis de gauche (extrême gauche comprise) sont en recul de près de 1,4 million d'électeurs et de 10,9 points par rapport à mai 2009, alors même que la participation a progressé de 2 points et de 1,73 million d'électeurs.

Les élections de 1994, 2009 et 2014 sont les pires années électorales pour le PS et la comparaison est plutôt aisée car le nombre de suffrages exprimés et le nombre de suffrages portés sur le PS sont assez proches.

2014 introduit une nouveauté déplorable ; les deux autres scrutins, le PS avait beau faire de mauvais scores, les autres listes de gauche compensaient la défaite : MRG/Tapie et MDC en 1994, Europe Écologie en 2009.

En 2009, on sait parfaitement qu'une partie des 2 millions de voix perdues par le PS (il avait recueilli 4,96 millions de voix en 2004 – année exceptionnelle) s'étaient portées vers les listes Europe Écologie par dépit et pour sanctionner l'image déplorable que le PS avait donné de lui à l'occasion du congrès de Reims. Si on rapporte à des rapports de force plus classiques que ceux de 2004, en 1999, le PS avait recueilli 3,87 millions de voix et les Verts 1,7 million : on retrouve le système de vase communiquant sur 10 ans le PS perd 1 million de suffrages au profit des écologistes.

De 2009 à 2014, le PS ne perd que 180.000 suffrages, mais il les perd alors que la participation progresse, et que les écologistes tombent à des niveaux bas de représentation classique de leur famille politique aux élections européennes : 1,7 millions de suffrages (-1,1 million), 9% des exprimés. Entre les deux élections, le PS n'a donc pas profité de l'augmentation de la participation ou du retour des écologistes à leur étiage habituel, et loin de récupérer ceux de ses électeurs qui avaient voté écologistes en 2009, il perd encore des voix.

Alors que le Front de Gauche maintient son électorat entre deux scrutins européens (on y reviendra), c'est bien la preuve renouvelée du phénomène qui a frappé la gauche aux élections municipales : les électeurs socialistes ont sanctionné le PS et le gouvernement, non pas en votant pour un de ses partenaires (comme en 2009 lorsque tous étaient dans l'opposition) mais en s'abstenant massivement. Une fois de plus c'est l'électorat de François Hollande au premier tour de la présidentielle qui décroche du parti dont est issu le Président de la République (quel que soit le niveau d'abstention). On verra que sur certains territoires, cela peut être pire encore.

L'électorat d'extrême gauche subit également les "désillusions" de son électorat. Celui-ci semble avoir fait le deuil de l'extrême gauche dans sa capacité actuelle à peser sur le jeu politique traditionnel (les plus « électoralistes » de leurs cadres sont partis au Front de Gauche) et plus encore aux Européennes, perçues par eux comme un scrutin inutile pour une parlement fantoche : l'extrême gauche perd 700.000 voix et passe de 6,1% à 1,6% des suffrages.

Il faut remarquer le score de Nouvelle Donne. Ce parti est sans doute un feu de paille, mais en moins d'un an ce mouvement fondé de bric et de broc rassemble 600.000 voix et plus de 3% des suffrages. Ceux-ci viennent sans doute des 180.000 voix perdues par le PS, du million de voix socialistes perdues par les écologistes entre 2009 et 2014 et peut-être de la hausse de la participation.

Le Front de Gauche est le dindon de la farce des élections européennes. Il paye à la fois la stratégie agressive de Jean-Luc Mélenchon et les effets du découpage régional couplé à la règle de la proportionnelle.

statut_26-05-20104_Pierre_Laurent.pngEn effet, on pouvait imaginer que la présidentielle de 2012 et les 11% de Mélenchon ne soient pas passés par pertes et profits. Avec 6,3% des suffrages, le Front de Gauche fait à peine mieux qu'en 2009 et ne gagne que 160.000 voix en 5 ans. C'est la preuve de la déconnexion complète entre le discours irascible fondé sur la croyance en l'existence de deux gauches irréconciliables de Jean-Luc Mélenchon et la perception de l'unité de la gauche par son électorat. L'effet finit par être démobilisateur sur un électorat qui s'étaient pourtant fortement remobilisés depuis 2009 grâce à la dynamique du Front de Gauche. Celle-ci est en passe d'être gâchée et le co-président du PG fait subir au PCF les conséquences de ses propres turpitudes : le FdG perd un eurodéputé passant de 4 à 3 sièges alors même que la représentation française progresse de 2 sièges. Le recul de la liste de Jacky Hénin dans le Nord-Ouest, l'éparpillement des suffrages et l'écrasement du vote FN dans cette circonscription entraîne la perte d'un eurodéputé communiste.

Sans doute faut-il voir ici l'une des raisons pour lesquelles Pierre Laurent a lancé le lundi 26 mai après-midi un appel au nom du PCF à dépasser le Front de Gauche pour créer un nouveau Front populaire, avec tous ceux qui sont «malheureux à gauche» que la gauche se soit «trop éloignée de ses valeurs».

La droite républicaine s'effondre également

Le soir des résultats, responsables de l'UMP expliquait que les 20,8% réalisés par leur parti étaient certes un mauvais résultats mais qu'il fallait y ajouter les 9,93% des listes UDI-MODEM pour le comparer aux résultats des listes de la majorité présidentielle UMP-NC en 2009 (27,88%).

Cette analyse ne tient puisqu'en 2009 on comptait des listes MODEM qui ont rassemblé 8,46% des suffrages exprimés et 1,45 millions de voix. Les résultats du centre se projettent donc d'un scrutin à l'autre avec une progression de 430.000 voix (que l'on peut attribuer effectivement à celles des centristes qui avaient voté majorité présidentielle en 2009). On est loin des 850.000 perdus par l'UMP de 2009 à 2014. Ces suffrages perdus ne se retrouvent pas dans les listes divers droite qui perdent elles-mêmes 30.000 voix.

C'est une véritable défaite pour l'UMP qui n'apparaît pas aux yeux des Français comme une alternative crédible à la gauche pour gouverner et invalide un peu plus la fable de la «vague bleue» perçue par Jean-François Copé au sortir des élections municipales.

Vague blanche croisée et vague brune, les véritables enseignements du scrutin de mai 2014

Le FN passe de 1,09 million de voix en 2009 (année basse – 2004 : 1,7 million ; 9,8%) et 6,3% à 4,7 millions de voix en 2014 (24,85%).

Si l'on considère que les 1,2 millions de voix issues de la participation supplémentaire entre 2009 et 2014 ou les 450.000 perdues par la droite républicaine sont toutes passées au FN, il reste encore 1,9 millions de suffrages à trouver pour expliquer le score du parti d'extrême droite en 2014. La gauche a perdu 1,35 million de voix entre 2009 et 2014, si toutes sont passées au FN, il faudra encore plus de 550.000 voix pour faire le compte.

France_2009.jpgIl est peu probable que toutes les voix perdues par la droite républicaine et la gauche soient passées au FN directement. Cela signifie qu'il y a eu un mouvement croisé d'électeurs de gauche et de la droite républicaine choisissant de s'abstenir et que le nombre d'abstentionnistes de 2009 venus voter en 2014 est largement supérieur au chiffre de 1,2 million que nous offre la lecture brute de la participation lors de ces deux scrutins. C'est donc en nombre important que ce sont déplacés en 2014 pour voter FN des électeurs qui avaient choisi de s'abstenir en 2009.

Il paraît cependant indéniable que de nombreux électeurs de gauche ait sauté le pas de voter FN en mai 2014.

La comparaison des cartes de 2009 et 2014 est éclairante même si on regarde uniquement les listes arrivées en tête du scrutin par commune. La comparaison des deux cartes montre des phénomènes de basculement très clair de gauche à l'extrême droite dans des régions du nord, de l'est et du centre de la France avec parfois également des effet dans le sud-ouest.

France_2014.jpgDans le Nord, la gauche perd 84.293 voix quand le FN en gagne 150.000 et multiplie son score par 3,5 ; une telle progression ne s'explique pas sans que la majorité des voix perdues par la gauche et notamment le PS (-52.400) se soient portées sur le FN.

  • - Idem dans le Pas-de-Calais : -48.000 à gauche, + 120.000 au FN score x 3,5.

  • - Idem dans la Moselle -25.000 à gauche, +64.000 au FN score x 4,2

  • - en Meurthe-et-Moselle cependant une partie des voix de gauche perdues par le PS et EELV (-17.400) a pu se retrouver sur le Front de Gauche (+4.200), le FN +45.500 score x 5

  • - idem dans la Nièvre : FdG (+850), PS-EELV -8.200, FN +15.000 score x 5

  • - Allier : -7.000 à gauche, + 12.300 au FN score x 4,7

  • - dans l'Aude phénomène comparable à la Meurthe-et-Moselle et à la Nièvre : +2.200 FdG, -6.600 PS-EELV, + 30.900 FN score x 4,6

A contrario dans le Lot, les pertes et les gains à gauche s'équilibrent : +850 FdG, +530 PS, -1.400 EELV, FN + 8.500, la droite républicaine perd 5.000 voix. C'est vraisemblablement l'électorat de droite qui s'est porté sur le FN.

Tirer les leçons de la désaffection de notre électorat et parfois de son basculement

François Hollande n'a pas voulu comprendre le message des Français aux élections municipales, il a décidé d'accélérer les politiques libérales avec Manuel Valls et a organisé une désignation d'opérette au PS pour remplacer Harlem Désir par Jean-Christophe Cambadélis. Les mêmes causes produisent les mêmes effets : les sondages sur l'esthétique des dirigeants politiques n'y changent rien.

Preuve est faite également que les Français ne font toujours pas de différence entre les différents partis de gauche,l'échec provoqué par les fautes politiques du gouvernement plonge toute la gauche dans la défaite : PS+EELV+FDG font à peine 30%. Il convient désormais de tous nous interroger et de réviser nos copies et nos stratégies : assez d'anathèmes méluchiens, assez d'abdication devant les libéraux et les réactionnaires.

La gauche doit se rassembler et elle ne pourra le faire que sur une orientation résolument progressiste qui rompe clairement avec les logiques libérale et austéritaire en France et en Europe.

Sur le plateau d'I-télé, M. Sportouche de L'Express expliquait après l'intervention du chef de l’État qu'en mettant le FN en tête les Français avaient tout autant désavoué les politiques sociales-libérales françaises et européennes que celles proposées comme une alternative à gauche par la gauche du PS et les « frondeurs » notamment. Les Français ont voté FN selon lui et non Front de Gauche.

La réalité est plus complexe : les électeurs de gauche et tout particulièrement ceux de François hollande au premier tour de la présidentielle ont massivement choisi de s'abstenir pour manifester leur incompréhension et aussi leur désaveu des politiques gouvernementales. Dans l'électorat de gauche commence à s'installer l'idée que F. Hollande et donc les socialistes auraient trahi le mandat qu'ils leur avaient confié. C'est un schéma comparable aux municipales.

Une partie de ces électeurs déçus voire écœurés ont même sauté le pas comme on le pressentait dans les législatives partielles et certaines municipales en votant FN. Il n'est pas trop tard pour que ce vote d’écœurement ne se consolide pas. D'autant qu'il y a d'autres moyens de répondre aux attentes de ces Français qui souffrent de se sentir abandonnés face au chômage et la baisse de leur pouvoir d'achat. Partout où la République recule ce sont les communautarismes et les logiques d'exclusion qui prennent sa place ; or la République s'incarne d'abord dans la solidarité nationale et les services publics. Si la puissance publique cesse de mener des politiques conduisant à leur démantèlement par l'austérité, si elle démontre sa capacité à agir directement sur les préoccupation majeure des Français par la relance de l'investissement, de l'innovation et de la politique industrielle, donc avec des conséquences évidentes sur les créations d'emplois et sur les salaires, alors les Français ne seront pas tentés d'écouter et de croire ceux qui, sous un verni léger d'anti-libéralisme de circonstance, ne font que désigner une partie de la population comme le bouc émissaire à leur désarroi.

Si la pression devient trop forte par l'action conjuguée des syndicats, des partis de gauche et du parlement, on peut encore espérer contraindre l'exécutif à revoir sa copie. Mais cela signifie deux choses :

  • -> être en mesure d'assumer le rapport de force et de l'emporter dans le PS (congrès anticipé ?) et dans le groupe parlementaire socialiste (en renforçant et élargissant les solidarités fondées par «l'Appel des Cent» ?) ;

  • -> être conscient que cela implique peut-être une crise politique grave dans laquelle le Président de la République s'affronte avec le parti dont il est issu et sa majorité parlementaire.

capture-ecran-president-francais-francois-hollande-adressan.jpgIl y a cependant urgence François Hollande éloigne chaque jour un peu plus de lui son électorat de 2012 et va convaincre de voter FN en 2017 «parce que c'est les seuls que l'on n'a pas encore essayé». Son intervention du lundi 26 mai était à ce titre désastreuse : commençant par «partout, les partis européens ont progressé» alors qu'il voulait parler des eurosceptiques, il a enchaîné les phrases creuses sur la crise et les bienfaits de l'Europe en réclamant une réorientation de la construction européenne et en concluant par sa volonté d'accélérer avec autorité (seul argument qu'il reste à ses soutiens) les réformes libérales dénoncées par son électorat.

Non seulement il fait un diagnostic erroné sur les attentes du peuple de gauche, mais celui-ci est désormais convaincu de son double discours sur la réorientation de l'UE : les électeurs de gauche pensent qu'il a cédé dès les premiers sommets européens devant Merkel et qu'il ne dispose aujourd'hui plus des moyens politiques et électoraux (majorité en difficulté) lui permettant d'être crédible face à ses pairs au Conseil européen, si tant est qu'il en ait la volonté.

Dans ces conditions, il ne paraît difficile que François Hollande reste notre candidat aux élections présidentielles ; les socialistes doivent s'exprimer en congrès puis avec des primaires et le plus vite sera le mieux pour éviter d'être encore confondus longtemps avec le Hollandisme.

Frédéric FARAVEL

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13 mai 2014 2 13 /05 /mai /2014 15:32

Mediapart.fr - 13 mai 2014 | Par Mathieu Magnaudeix

Mediapart_paroles_de_deputes_PS_13-05-2014.jpgCe sont des députés socialistes discrets, ceux qu'on ne voit pas à la télé. Ça ne les empêche pas d'avoir, eux aussi, leur avis sur la politique du gouvernement et de François Hollande. Certains se sont abstenus lors du vote du 29 avril sur le plan Valls de 50 milliards d'économies. Paroles de députés que l'on n'entend jamais.

en photo ci-contre : Geneviève Perrin-Gaillard

Parmi les 41 députés socialistes qui se sont abstenus mardi 29 avril sur les 50 milliards d'économie du gouvernement, il y a des élus de l'aile gauche du PS. Mais aussi des députés d'autres tendances qui s'abstenaient pour la première fois. Et ceux qui, tout en ayant voté ce plan, se posent beaucoup de questions. Ce lundi 12 mai, Manuel Valls a promis que les nouveaux foyers imposables allaient sortir de l'impôt sur le revenu, une revendication de nombreux députés très souvent interpellés à ce sujet par leurs électeurs. Et pour retisser les liens avec une majorité en colère, François Hollande pourrait bientôt recevoir les parlementaires pour une «opération papouilles», selon le porte-parole des députés PS, Thierry Mandon.

Chaque mardi matin, la centaine de parlementaires qui avaient signé l'appel des 100 pour un «nouveau contrat de majorité» au soir de la défaite des municipales vont se réunir afin d'infléchir la ligne du gouvernement. L'un d'eux, Christian Assaf, se dit même «prêt à discuter avec Mélenchon, mais sur un programme d’union».

Mediapart a tendu le micro à des socialistes que les Français ne connaissent pas beaucoup. Ils ne courent pas les plateaux télé, ne sont d'ailleurs pas toujours à l'aise avec les caméras. Mais ça ne les empêche pas de dire leurs doutes.

Télécharger ici l'article en pdf

Chantal Guittet (PS. Finistère).
Sa circonscription est celle de l'ex-abattoir Gad (Lampaul-Guimiliau).

Votes précédents :
TSCG (9 octobre 2012) : oui
Accord emploi (9 avril 2013) : abstention

Réforme des retraites (15 octobre 2013) : oui
Discours de politique générale de Manuel Valls (8 avril 2014) : oui
Plan de 50 milliards (29 avril) : oui

« La trajectoire n'est pas la bonne. Une politique de l'offre seule est profondément récessive. Je ne crois pas à la phrase de François Hollande, empruntée à l'économiste Jean-Baptiste Say, selon laquelle l'offre crée la demande. C'est faux. Devant les ministres il y a deux semaines, après l'annonce des mesures de Manuel Valls, j'ai parlé “brut de décoffrage” : j'ai ma liberté de parole, je ne suis pas du sérail. J'ai dit que reculer le plan pauvreté était inadmissible, que le projet de François Hollande, le discours du Bourget, ce n'était pas la politique de l'offre à tout prix. Il y a eu un virement, il faut bien l'admettre. Ont-ils raison ? Fondamentalement, je pense que non, même si l'économie n'est pas une science exacte.

« Avant le vote, j'étais le cul entre deux chaises, angoissée, ce n'est pas la première fois d'ailleurs. Je n'ai pas forcément passé une semaine tranquille. Ça m'a travaillé, ça me travaille encore. Je n'arrête pas de voir des gens qui ne mangent pas à leur faim, c'est insupportable, je me pose plein de questions sur les décisions que nous prenons. Mais j'ai voté pour. Je ne me voyais pas mettre le gouvernement en minorité, il y avait un risque. Et même s'il se trompe sur la trajectoire, celle des autres en face est pire encore.

« On me dit “vous êtes rentrés dans le rang pour sauver votre siège”. Mais je ne suis pas entrée en politique pour avoir un siège. Je suis venue à la politique par hasard, j'étais professeur de gestion à l'université, on m'a dit pourquoi “tu ne vas pas aux législatives” ? J'ai trouvé ça loufoque, et puis dans cette circonscription de droite, j'ai mis en 2007 le candidat UMP en difficulté au second tour, ça n'était jamais arrivé. Et en 2012, j'ai gagné. Mais si je ne suis pas réélue en 2017, c'est la démocratie. De toutes façons, je suis contre le cumul des mandats dans le temps et dans l'espace.

« Il y a beaucoup de choses que je trouve étranges dans le débat politique. Par exemple qu'on ne parle que de 2017 et du retour de Sarkozy, jamais de la pauvreté et pas beaucoup de sujets importants comme les travailleurs détachés. Quand on parle de milliards, ça ne dit rien à nos électeurs. J'aimerais qu'on mesure les conséquences concrètes de ces économies pour les ménages, et ça s'adresse aussi aux journalistes.

« Maintenant, il faut Bac +5 pour comprendre un discours politique, c'est devenu trop compliqué. Il faudrait davantage former nos concitoyens au droit et à l'économie. Les lois sont devenues incompréhensibles. Notre travail à l'Assemblée nationale lui-même est d'un autre siècle. On n'arrive pas à mobiliser les médias sur les sujets de fond que nous suivons au Parlement.

« Nos concitoyens, eux, c'est sur des choses très concrètes qu'ils fondent leur jugement. La fiscalisation rétroactive des retraités ayant eu une famille nombreuse, par exemple (elle a été votée dans le budget 2014, ndlr), c'est choquant surtout que nous avons reculé l'âge de la retraite. La demi-part des veuves supprimée, je suis d'accord mais alors il fallait augmenter les petites retraites. Quand je rencontre des veuves, seules quinze dans la salle sont imposables mais toutes pensent que ce gouvernement leur a volé quelque chose ! Tant qu'on ne remettra pas la fiscalité à plat, on aura toujours ce genre de problèmes.

« Dès maintenant, on pourrait être plus radical sur certains sujets. On ne devrait plus tolérer par exemple les dépassements d'honoraires des médecins. On devrait revaloriser le salaire des enseignants, des greffiers, des infirmiers, etc. J'espère qu'une fois qu'on aura apuré les comptes du pays, il y aura une nouvelle répartition des richesses. »

Philippe Noguès (PS. Morbihan).
Réclame une loi contre la sous-traitance anarchique des multinationales.

TSCG : oui
Accord emploi : oui
Réforme retraites : oui
Discours de politique générale de Manuel Valls : abstention
Plan de 50 milliards : abstention

« Avant le vote du plan Valls, il y a eu des pressions assez phénoménales. Des collègues nous en voulaient. On nous menaçait d'une dissolution. Depuis mon élection en 2012, je n'avais jamais vécu ça.

« Si je me suis abstenu, comme sur le discours de politique générale, c'est parce que la politique de François Hollande ne correspond pas à celle pour laquelle il a été élu. Mes votes ont eu des impacts en Bretagne, où les “hollandais” sont très implantés. La fête de la rose de la fédération socialiste du Morbihan qui devait se tenir chez moi a été annulée dix jours avant. J'ai organisé à la place un repas républicain, il y avait plus de monde ! Nous avons créé un vrai espoir à gauche, chez les gens qui ne se sont pas déplacés aux municipales.

« Je n'imaginais pas qu'on en serait là au bout de deux ans de pouvoir. Je veux bien perdre en 2017, mais dans ce cas sur mes valeurs, pas sur une politique de droite. Je regrette par exemple d'avoir voté le traité européen à l'automne 2012 : je venais d'être élu, on nous a promis que ce serait “un oui exigeant”, on voit aujourd'hui sa traduction concrète : la rigueur d'Ayrault est devenue sous Valls une politique d'austérité. Dans le plan de 50 milliards, ce sont juste les mesures les plus à droite qui ont finalement été gommées.

« Je suis entré au PS en 2006. Pour les législatives 2012, j'ai été choisi par les militants contre le candidat officiel. Je ne suis pas un apparatchik, j'ai été élu pour la première fois en 2012 après 35 ans de carrière dans le privé.

« Ces abstentions m'ont libéré. Maintenant, j'ai envie de faire comme je l'entends, avec la conscience de ma responsabilité. Je vais travailler sur les textes budgétaires à venir. Je ne songe pas encore à quitter le groupe PS. Mais pour l'avenir, je ne m'interdis rien. Si j'ai un jour le sentiment d'être face à un mur, si on n'arrive pas à infléchir la politique de l'intérieur, il faudra peser d'une autre manière et restera cette solution de sortir du groupe. Cela traverse l'esprit de plusieurs députés, c'est clair. Attend-on du groupe majoritaire qu'il soit un troupeau de moutons bêlants ? Le président doit se préoccuper de sa majorité. On est vraiment au bout de cette Vème République où le seul qui détermine la politique est le chef de l'État. »

Florent Boudié (Gironde), “hollandais”.

TSCG : oui
Accord emploi : oui
Réforme des retraites : oui
Discours de politique générale de Manuel Valls : oui
Plan de 50 milliards : oui

« J'étais au “club Témoin” de Jacques Delors et François Hollande pendant mes études à Sciences-Po Bordeaux dans les années 1990 : c'est dire si je suis “hollandais” de longue date. Cette ligne sociale-démocrate me correspond. Mais le discours de politique générale tenu par Manuel Valls aurait dû l'être dès 2012. Nous serions déjà passés à une autre phase du quinquennat. S'il y a un échec, c'est de ne pas avoir mis à profit la campagne présidentielle pour tenir un discours de vérité. Ce quinquennat risque d'être très déséquilibré, avec une seule phase de rigueur ponctuée de mesures de justice sociale.

« Les municipales ont été un électrochoc. Ça nous a porté un coup au moral. Des élus avec un très bon bilan se sont fait bananer. Les ravages sont profonds. Il y a une déception sur le rythme des réformes, sur l'exercice du pouvoir et aussi une demande de justice sociale. Mais nos concitoyens veulent aussi moins de dépenses et plus d'efficacité. Il est paradoxal de dire qu'ils veulent plus de gauche alors que c'est la droite et l'extrême droite qui profitent de nos faiblesses actuelles.

« Nous n'avions pas assez mesuré l'impact de la hausse de la fiscalité. En septembre 2012, Jean-Marc Ayrault a dit que 9 Français sur 10 ne seraient pas touchés par les hausses d'impôt, c'était le contraire ! Puis il y a eu la hausse de la TVA début 2014, qui avait été balayée d'un revers de la main pendant la campagne. C'est là que le système s'est grippé dans l'opinion. Sans compter ces “couacs” qui ont montré un problème profond d'exercice quotidien de la responsabilité publique.

« François Hollande n'avait pas un programme « étincelant » comme il dit, mais il avait donné, au Bourget notamment, le sentiment qu'il ferait ce qu'il avait promis. Nous avons fait le non-cumul, la retraite à 60 ans pour ceux qui ont commencé tôt, etc., mais tout ça s'est effacé. Le plan de 50 milliards d'économies, je l'assume pleinement, tout comme la réforme des collectivités territoriales, la plus ambitieuse jamais essayée. Maintenant, il va falloir courber l'échine pendant au moins six mois. Les défaites (européenne, sénatoriale) vont s'ajouter à l'impopularité.

« Dans cette situation, nous ne devons pas paraître divisés. Nous ne sommes pas à la veille d'un congrès du PS. Parmi les 41 abstentionnistes, beaucoup ont voulu sincèrement sonner l'alerte mais d'autres avaient des stratégies plus personnelles, ça m'agace. Nous ne sommes pas là pour être des godillots, il faut des débats, mais dans la Cinquième République, la rébellion parlementaire est inutile. Chacun à notre niveau, nous sommes tous de petits caporaux : nous assumons collectivement la responsabilité. »

Suzanne Tallard (Charente-Maritime).
Proche de l'aile gauche du PS tendance Marie-Noëlle Lienemann.

TSCG : abstention
Accord emploi : oui
Réforme des retraites : abstention
Discours de politique générale de Manuel Valls : abstention
Plan de 50 milliards : abstention

« C'est l'injustice sociale qui motive mes votes. La réforme des retraites fait travailler les gens jusqu'à 67 ans : c'est impossible. Toucher les petites retraites, reculer le plan pauvreté, geler le point d'indice des fonctionnaires etc. : ces mesures prévues au départ dans le plan d'économies du gouvernement n'auraient même pas dû être proposées par la gauche. Manuel Valls est revenu dessus, c'est bien le moins.

« Mais sur le fond, le premier ministre n'a pas répondu à l'interpellation des cent députés dont je faisais partie. Le gouvernement mène une politique de droite atténuée. Donner des centaines de millions d'euros à la grande distribution sans contrepartie avec le crédit d'impôt compétitivité (CICE), c'est une injustice sociale flagrante aux yeux, par exemple, des petits retraités, et je crains que nos concitoyens ne s'en souviennent.

« Quand je me suis abstenue sur la déclaration de politique générale de Manuel Valls, avec dix autres socialistes, je m'attendais à ferrailler avec les militants. Ils m'ont dit “ne t'excuse pas”, ils m'ont même remerciée. Certains m'ont dit que notre vote les avait dissuadés de rendre leur carte du PS. Les européennes ? On connaît déjà le résultat. Le PS sera en troisième position, on va reculer, on le sait, comme on a perdu les municipales. Si le gouvernement avait mené une autre politique, on n'en serait peut-être pas là.

« Avec le gouvernement, nous sommes désormais dans un rapport de force. Ça me désole, mais c'est ainsi. La politique menée devrait être en accord avec les promesses de François Hollande : redresser la France dans la justice, le message de la campagne présidentielle, je suis à 200% pour. Nous continuerons, au sein de la majorité, à travailler pour démontrer qu'une autre politique est possible. La façon dont le gouvernement accueillera nos propositions décidera de nos votes.

« Je suis militante socialiste depuis 2002 et la défaite de Jospin. J'étais élue locale, je me suis dit alors : “faut y aller”. Le PS n'était pas en grande forme… aujourd'hui, je veux croire que ce parti reste ma maison. Je reste car j'ai l'espoir de le faire bouger. Je suis très triste. J'ai reçu une lettre d'une personne que je connais bien, me disant : “Suzanne, je ne voterai plus jamais socialiste.” C'est le genre de courrier qu'on n'oublie pas. Je sais que pour une personne qui m'écrit, il y en a cent qui pensent ça. Je me demande si nous n'avons pas déjà perdu 2017. »

Geneviève Gaillard (Deux-Sèvres).
Maire de Niort battue aux municipales.

TSCG : oui
Accord emploi : oui
Réforme des retraites : oui
Discours de politique générale de Manuel Valls : oui
Plan de 50 milliards : oui

« Les municipales ont été une violence, un choc. Il y a beaucoup de raisons à une telle défaite : le PS local qui a soutenu mes adversaires, les travaux dans le centre-ville, le fait que les écologistes et le PG soient partis seuls, cette fausse rumeur partie de l'extrême droite selon laquelle je faisais venir des hordes de populations noires dans ma ville. J'ai aussi été une victime du genre : quand elle prend des décisions, une femme est forcément autoritaire, alors qu'un homme, lui, est courageux.

« Et puis, bien sûr, il y a la politique nationale. Les électeurs nous ont passé des messages : “gauche et droite c'est pareil”, “Hollande a fait des promesses qu'il n'a pas tenues”, “vous faites la même politique que Sarkozy”. Des gens de gauche nous ont dit que certaines positions, par exemple celle du premier ministre actuel sur les Rroms, les ont choqués.

« Je fais partie des députés qui avaient signé la lettre pour une autre politique. Je ne suis pas sûre que cette politique de l'offre qui oublie la demande donne autant de résultats qu'on le dit. C'est vrai, la gauche doit évoluer, le monde a changé, on ne peut plus raser gratis. Mais j'aurais aimé que François Hollande soit plus offensif sur l'Europe, qu'on n'enterre pas la réforme fiscale, qu'on lance la réforme territoriale sans tous ces atermoiements. Dans les mois à venir, la suppression de la majoration retraites pour les parents de familles nombreuses va être calamiteuse, tout comme les effets de la suppression de la demi-part pour les veuves. Je suis pour une Sixième République, on n'en entend plus parler, c'est dommage. J'étais députée sous Jospin, on était mieux traité. Il paraît que ça va changer.

« Fallait-il voter le pacte Valls ? J'ai hésité, jusqu'au dernier moment. Mais je ne voulais pas mettre le gouvernement en difficulté. Je ne suis pas sûre que les électeurs trouveraient leur compte si la droite revenait au pouvoir. J'ai la faiblesse d'être collective et loyale. Je ne quitterai pas le PS, où je suis depuis trente ans. Pour faire quoi ? Le Front de gauche, c'est non. Les écolos ? C'est autant le bordel chez eux que chez nous. Je préfère travailler de l'intérieur. Mais pourquoi le PS n'écoute-t-il pas plus les gens qui ont des choses à dire, les économistes atterrés ou Pierre Larrouturou, le fondateur de Nouvelle Donne ?

« Parfois je me dis que tout ça est un immense gâchis. On avait tout, les régions, les départements, les communes, vous vous rendez compte du tabac qu'on aurait pu faire ? Tout est anéanti. Et on peut même aller encore plus bas. Pour 2017, je pense que tout est possible. Y compris changer de candidat. Mais qui peut dire aujourd'hui quelle sera la situation à ce moment-là ? »

Stéphane Travert (Manche).
Député de Flamanville (aile gauche du PS, tendance Hamon)

TSCG : abstention
Accord emploi : non
Réforme des retraites : abstention
Discours de politique générale de Manuel Valls : oui
Plan de 50 milliards : abstention

« C'est parce que les leçons des municipales n'ont pas été suffisamment tirées que certains d'entre nous se sont abstenus sur le plan d'économies. Je suis d'accord pour être pragmatique, parler aux entreprises. Mais ça n'empêche pas d'avoir des convictions de gauche et de parler à notre électorat. Aux municipales, ce sont bien souvent trente ans de travail militant qui ont été mis par terre.

« Nous avions rassemblé notre camp à la présidentielle. Mais aux municipales, la gauche ne s'est pas déplacée et la droite s'est beaucoup mobilisée. Notre électorat est déstructuré, les gens sont déçus et rejettent la classe politique. Nous devons désormais reconstituer notre base électorale en poussant le curseur. La population ouvrière de Flamanville, les petits retraités, c'est à eux que je m'adresse sur le terrain. Nous devons expliquer ce que nous faisons, même si on n'y est pas toujours aidé quand des gens comme Cahuzac, ou récemment un conseiller du président de la République, viennent détruire le travail militant et trahir l'idéal de République irréprochable.

« Pour les européennes, je fais campagne pour que notre camp se déplace. En 2005, j'ai milité pour le “non” au référendum, et dans mon département il l'a emporté largement. C'est difficile d'expliquer ce que fait l'Europe, dont les fonds soutiennent pourtant des secteurs importants dans ma circonscription, comme la pêche.

« Dans le nord-ouest, chez moi, Marine Le Pen est candidate pour le Front national. Elle met en avant des propositions qui ne vont pas dans le sens du rapprochement des peuples, de la cohésion sociale et républicaine. Elle n'a jamais vraiment pris position sur la question des travailleurs détachés, elle ne travaille pas au Parlement. C'est plus facile de dire comme elle le fait que l'Europe est la cause de tous les maux, d'en appeler à de vieilles lunes. Pour nous, la campagne n'est pas facile. »

Kheira Bouziane-Laroussi (Côte-d'Or)

TSCG : oui
Accord emploi : non
Réforme des retraites : oui
Discours de politique générale de Manuel Valls : oui
Plan de 50 milliards : abstention

« Les 41 abstentionnistes, on nous a traités de “djihadistes"… mais si nous nous sommes abstenus, c'est au nom du progrès social promis en 2012. Je suis économiste de formation, je connais l'entreprise. Mais le patronat français est un vrai enfant gâté : ce n'est jamais assez.

« Je l'ai dit à François Hollande : si vous voulez rapprocher les deux sensibilités de la majorité, il suffit que le pacte de compétitivité comporte des contreparties. On a déjà fait le CICE sans contreparties. Les grandes surfaces vont en bénéficier alors qu'elles ne sont pas soumises à la concurrence internationale, c'est un scandale. On demande aux Français de faire des efforts mais en face, il y a quoi ? Les 50 milliards d'économie vont se traduire par des réductions dans les collectivités, l'investissement public, la sécurité sociale. J'attends avec inquiétude de savoir où on va couper : les hôpitaux sont déjà en difficulté !

« Lors des municipales, les électeurs de gauche nous ont passé un message clair : “ce qui se passe au niveau national ne nous plaît pas”. Ils vont le redire aux européennes. Les Français sont prêts à faire des efforts, ils sont réalistes, même les plus modestes d'entre nous… mais si c'est juste pour satisfaire les 3%, ça ne leur parle pas. Il nous faut un peu d'utopie, c'est ça qui manque ! Comment voulez-vous que les gens qui tirent la langue et cherchent du travail ne trouvent pas honteux de voir les salaires que s'octroient les grands patrons ?

« On a voté de belles lois, le mariage pour tous, l'égalité femmes-hommes, les avancées sur les stages… Mais tout ce travail n'est pas visible parce que la croissance n'est pas là et nos concitoyens tirent la langue. Et puis il reste beaucoup à faire pour améliorer le système éducatif, les retraites. On savait que ça allait être difficile, mais à ce point… J'ai parfois des moments de découragement, pourquoi le nier ? Mais je ne suis pas résignée. Les attentes des Français étaient très fortes, c'est difficile de les satisfaire. »

Jean-Patrick Gille (Indre-et-Loire).
Spécialiste des questions d'emploi.

TSCG : oui
Accord emploi : oui
Réforme des retraites : oui
Discours de politique générale de Manuel Valls : oui
Plan de 50 milliards : abstention

« Quand vous êtes parlementaire sous la Vème République, vous êtes soit godillot soit trublion. Je ne suis ni l'un ni l'autre. Le vote du 29 avril était l'occasion de faire un vote sur le pacte de responsabilité, et nous avons saisi l'occasion. Nous avons dit que l'exécutif devait avoir un débat avec son Parlement, comme dans toute démocratie normale. Nous avons ce problème dans nos institutions d'un président de la République qui s'occupe de tout, la guerre au Mali, les sommets européens, la crise en Ukraine, le chômage, il répond à Bourdin à la radio et gère l'affaire Leonarda, ce n'est pas possible !

« Notre rôle, c'est aussi de représenter les électeurs. Leur demande est contradictoire ; ils veulent à la fois plus de gauche et qu'on aide les entreprises. C'est notre boulot de gérer les contradictions, sinon ça part en vrille.

« Je ne suis pas au RSA mais je ne vis pas sur l'Olympe non plus, je connais la vie des gens. Et en ce moment, ils ne se sentent pas représentés à gauche, même s'ils l'expriment souvent en nous disant qu'on est coupés de leurs réalités ou qu'on est des salauds. Globalement, les 60 propositions de François Hollande ont été tenues, mais à une exception majeure : la politique sociale et économique. On ne fait pas la grande réforme fiscale, à cause de Bercy comme d'habitude. On avait dit que le coût du travail n'était pas un problème majeur, avec le CICE on change de politique en quelques jours, par amendement. D'ailleurs, je n'avais pas voté “pour” ce jour-là.

« Et maintenant on nous parle d'exonérations massives dans le pacte de compétitivité, des exonérations qui ne sont jamais évaluées. Il y a une soumission à une doxa techno-libérale portée par Bercy. Ceux qui sont au sommet de l'État n'arrivent pas à résister. Est-ce l'effet de caste ? La promotion Voltaire ? En attendant, il y a un renoncement politique.

« Je suis pour la réduction des déficits, pour des comptes sociaux à l'équilibre pour maintenir notre protection sociale, voire des gels temporaires de progression des retraites ou du salaire des fonctionnaires. Mais à la longue, c'est récessif. Et puis quelle efficacité de la politique dans laquelle on s'engage ? Total et Sanofi, qui affichent des profits conséquents, vont recevoir des chèques très importants dans le cadre du CICE.

« Quant à l'exonération totale des charges sur le Smic (annoncée par Manuel Valls dans son discours de politique générale, ndlr), c'est la fausse bonne idée par excellence. On donne 10 milliards d'exonérations supplémentaires sur les entreprises, c'est l'équivalent du budget de la politique de l'emploi en France, hors la formation professionnelle ! Et ça revient à dépenser 45 000 euros par emploi créé. Ça fait cher ! Pour créer 200 000 emplois, autant faire des aides ciblées attribuées aux entreprises qui ont embauché des salariés supplémentaires pour éviter les effets d'aubaine ! L'argent englouti là-dedans ne sera pas mis dans la réduction des déficits ou dans les investissements. Sans compter le risque de créer des pièges à bas salaires. »

Catherine Beaubatie (Haute-Vienne)

TSCG : oui
Accord emploi : oui
Réforme retraites : oui
Discours de politique générale de Manuel Valls : oui
Plan de 50 milliards : oui

« Limoges, ma ville, était à gauche depuis 102 ans. Elle est passée à droite. Nous avons décroché de 26 points au premier tour. Dix points sont sans doute dus au contexte national. En plus des divisions, il y a aussi une certaine usure de la municipalité, une envie d'alternance. Mais au fond, tous les socialistes ont perdu car Limoges est une ville emblématique du socialisme. Nous devons évidemment nous poser des questions.

« Après, on ne gagne jamais contre son camp : nous faisons des choix, nous devons les assumer. On peut débattre, mais à un moment il faut trancher et c'est la décision de la majorité qui s'applique. Comment peut-on accorder la confiance à Manuel Valls le 8 avril et s'abstenir moins d'un mois après ? C'est laver plus blanc que blanc et faire passer les autres pour des godillots. Je ne suis pas béate. Bien sûr, la militante socialiste que je suis a parfois envie de renverser la table.

« On nous dit “vous n'êtes pas allé assez loin sur la réforme bancaire, la fraude fiscale, la finance”. Je l'entends. Mais la France n'est pas seule au monde. Et puis il y a la dette et le déficit. Tant que nous avons ces boulets aux pieds, la confiance ne reviendra pas. Les Français sont inquiets, ils ont peur de l'avenir pour eux, leurs enfants, leurs petits-enfants et veulent du pouvoir d'achat en plus. Nous sommes dans une situation jamais connue de crise économique et nous devons gouverner le pays avec des Français désabusés et qui n'ont plus de repères. Je plaide pour une vraie réforme fiscale. Des gens à petits revenus sont imposés alors qu'ils n'auraient jamais dû l'être.

« Bien sûr, je ne vais pas vous dire que je suis à l'aise dans mes baskets quand je vois et que j'entends ce que nous disent les électeurs. Mais justement Manuel Valls a envie d'aller au bout des réformes économiques, de la réforme territoriale. Il a du courage. Nos concitoyens nous jugeront dans trois ans. »

Richard Ferrand (Finistère)

TSCG : oui
Accord emploi : abstention
Réforme retraites : oui
Discours de politique générale de Manuel Valls : oui
Plan de 50 milliards : abstention

« Je ne suis pas un gauchiste exalté. Mais avant de mobiliser 50 milliards d'euros, on peut quand même savoir comment cibler au mieux, surtout quand l'État n'a pas un rond ! Qu'on fasse le CICE, qu'on aide les entreprises, 1000 fois oui. Mais pourquoi en faire bénéficier la grande distribution, des assurances, les banques qui ne sont pas des entreprises de production ? Ça n'a pas de sens et on n'a jamais pu en débattre.

« Je veux bien entendre des arguments mais pas obéir à des ordres. Le contrat de majorité que nous demandions s'est transformé en ordre de mission. Et puis il y a ce fétichisme des 3% de déficit, alors que même la Banque centrale européenne s'inquiète des risques de déflation ! Je m'inquiète de l'impact asthénique, récessif des mesures que nous prenons. On ne peut pas ajouter de l'injustice à l'inefficacité.

« Je me rappelle que j'ai été élu dans la continuité du discours du Bourget. Mais récemment, un électeur m'a dit “Quand Hollande au Bourget parlait de son ennemi, je ne pensais pas que c'était de moi qu’il parlait.” C'est vrai que François Hollande paraît désormais très déterminé dans sa volonté de mener sa politique, c'est assez courageux. Mais je ne n'oublie pas sur quoi nous avons été élus. En Bretagne ces derniers mois, il m'est arrivé de sonner le tocsin (Richard Ferrand s'était inquiété du climat social en Bretagne avant les Bonnets rouges, ndlr), je ne voudrais pas sonner le glas ! L'ADN de la gauche, c'est réduire les inégalités, pas "faire des gestes" de justice sociale. La gauche qui fait des gestes, c'est moi qui ai envie de lui en faire, des gestes. On ne peut pas continuer avec ces mesures qui ont abouti à rendre imposables des gens qui n'ont pourtant pas gagné un centime de plus.

« Pour les européennes, je suis assez inquiet. Parviendrons-nous à faire comprendre l'enjeu de cette élection ? Que desserrer l'étau européen peut nous permettre de travailler différemment ? Ça sent la rebelote après les municipales, même si le pire n'est jamais sûr.

« Je ne désarme pas. Après les municipales, rien ne peut être comme avant. Il faut que l'exécutif nous entende. Si le gouvernement veut que nous devenions les VRP de sa politique, il doit nous convaincre de la qualité de sa politique. Nous ne demandons pas de faire la révolution, nous demandons de discuter.

« Je n'ai pas envie de quitter le groupe PS. Je crois à l'intelligence collective des socialistes. C'est là que nous devons être féconds. Manuel Valls doit écouter et pas rejeter : nous voulons qu'il réussisse, avec nous tous ! François Hollande, mieux que quiconque, nous connaît très bien. Un bon manager utilise toutes les qualités de ses troupes. J'ai encore confiance dans notre exécutif, pourvu qu'il passe plus de temps avec ceux qui “sentent” et proposent qu'avec ceux qui "savent” et disposent... avec le succès que l'on sait.

« Mais je n'accepterai pas qu'on nous dise indéfiniment “vous devez voter ça”, et que face à nos réticences le gouvernement se contente de montrer les dents. Les esprits libres ont toujours nourri la force de la gauche. Les fan-clubs ont toujours fini en clubs fanés. »

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