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sur l'auteur

Je m'appelle Frédéric Faravel. Je suis né le 11 février 1974 à Sarcelles dans le Val-d'Oise. Je vis à Bezons dans le Val-d'Oise. Militant socialiste au sein de la Gauche Républicaine & Socialiste. Vous pouvez aussi consulter ma chaîne YouTube. J'anime aussi le groupe d'opposition municipale de gauche "Vivons Bezons" et je suis membre du groupe d'opposition de gauche ACES à la communauté d'agglomération Saint-Germain/Boucle-de-Seine.
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Gauche Républicaine & Socialiste

1 juin 2015 1 01 /06 /juin /2015 15:30
Alexis Tsipras, premier ministre de la Grèce, à Athènes, le 15 mai. Petros Giannakouris / AP

Alexis Tsipras, premier ministre de la Grèce, à Athènes, le 15 mai. Petros Giannakouris / AP

Le 25 janvier, le peuple grec a pris une décision courageuse. Il a osé contester la voie à sens unique de l’austérité rigoureuse du Mémorandum, afin de revendiquer un nouvel accord. Un nouvel accord qui permette à la Grèce de retrouver le chemin de la croissance dans l’euro avec un programme économique viable et sans renouveler les erreurs du passé.

Ces erreurs ont été payées cher par le peuple grec. En cinq ans, le chômage a grimpé à 28 % (60 % pour les jeunes), et le revenu moyen a diminué de 40 %, tandis que la Grèce, conformément aux statistiques d’Eurostat, est devenue l’Etat de l’Union européenne (UE) ayant l’indicateur d’inégalité sociale le plus élevé.

Pis encore, malgré les coups durs qui ont été portés au tissu social, ce programme n’a pas réussi à redonner à l’économie grecque sa compétitivité. La dette publique a flambé de 124 % à 180 % du PIB. L’économie grecque, malgré les grands sacrifices de son peuple, est toujours piégée dans un climat d’incertitude continue engendrée par les objectifs non réalisables de la doctrine de l’équilibre financier, qui l’astreignent à rester dans un cercle vicieux d’austérité et de récession.

Mettre fin au cercle vicieux

Le principal but du gouvernement grec au cours des quatre derniers mois est de mettre fin à ce cercle vicieux et à cette incertitude. Un accord mutuellement bénéfique, qui fixera des objectifs réalistes par rapport aux excédents tout en réintroduisant l’agenda du développement et des investissements – une solution définitive pour l’affaire grecque – est actuellement plus nécessaire que jamais. Par ailleurs, un tel accord marquera la fin de la crise économique européenne qui a éclaté il y a sept ans, en mettant fin au cycle de l’incertitude pour la zone euro.

Aujourd’hui, l’Europe est en mesure de prendre des décisions qui déclencheront une forte reprise de l’économie grecque et européenne en mettant fin aux scénarios d’un « Grexit » (Grèce exit). Ces scénarios empêchent la stabilisation à long terme de l’économie européenne et sont susceptibles d’ébranler à tout moment la confiance tant des citoyens que des investisseurs en notre monnaie commune.

Cependant, certains soutiennent que le côté grec ne fait rien pour aller dans cette direction parce qu’il se présente aux négociations avec intransigeance et sans propositions. Est-ce bien le cas ?

Etant donné le moment critique, voire historique, que nous vivons, non seulement pour l’avenir de la Grèce, mais aussi pour celui de l’Europe, j’aimerais rétablir la vérité et informer de manière responsable l’opinion publique européenne et mondiale sur les intentions et les positions réelles du gouvernement grec.

Après la décision de l’Eurogroupe du 20 février, notre gouvernement a soumis de nombreuses propositions de réformes visant à un accord qui associe le respect du verdict du peuple grec et celui des règles qui régissant le fonctionnement de la zone euro.

Nous nous engageons notamment à réaliser des excédents primaires moins élevés pour 2015 et 2016 et plus élevés pour les années suivantes, étant donné que nous attendons une augmentation correspondante des taux de croissance de l’économie grecque.

Une autre proposition importante est l’engagement à accroître les recettes publiques par le biais de la redistribution des charges à partir des citoyens à revenus moyens et faibles vers ceux qui ont des revenus élevés et qui, jusqu’à présent, s’abstenaient de payer leur part pour affronter la crise, étant donné que dans mon pays ils étaient protégés tant par l’élite politique que par la troïka, qui « fermait les yeux ».

D’ailleurs, dès le premier jour, le nouveau gouvernement a montré ses intentions et sa résolution par l’introduction d’une mesure législative pour faire face à la fraude des transactions triangulaires en intensifiant les contrôles douaniers et fiscaux, afin de limiter la contrebande et l’évasion fiscale. Parallèlement, pour la première fois après de nombreuses années, les dettes des propriétaires des médias leur ont été imputées par l’Etat grec.

Privatisations

Le changement de climat dans le pays est clair. Il est également prouvé par le fait que les tribunaux accélèrent le traitement des dossiers pour que les jugements soient rendus dans des délais plus brefs lors d’affaires liées à l’évasion fiscale. Les oligarques qui étaient habitués à être protégés par le système politique ont toutes les raisons de perdre le sommeil.

Il n’y a pas seulement les orientations générales, il y a aussi les propositions spécifiques que nous avons soumises lors des discussions avec les institutions qui ont couvert une grande partie de la distance qui nous séparait il y a quelques mois.

Précisément, le côté grec a accepté de mettre en œuvre une série de réformes institutionnelles, telles que le renforcement de l’indépendance de l’Agence grecque de la statistique (Elstat), les interventions visant à accélérer l’administration de la justice, ainsi que les interventions dans les marchés de produits, afin d’éliminer les distorsions et les privilèges.

De plus, bien que nous soyons diamétralement opposés au modèle des privatisations prôné par les institutions, parce qu’il n’offre pas de perspectives de développement et n’opère pas de transfert de ressources en faveur de l’économie réelle, mais en faveur de la dette – qui n’est de toute façon pas viable –, nous avons accepté de poursuivre avec quelques petites modifications le programme des privatisations, faisant ainsi preuve de notre intention d’aller vers un rapprochement.

Nous sommes également tombés d’accord pour réaliser une grande réforme de la TVA en simplifiant le système et en renforçant la dimension de redistribution de la taxe, afin de réussir à augmenter tant le taux de recouvrement que les recettes.

Nous avons déposé des propositions concrètes pour des mesures qui conduiront à une augmentation supplémentaire des recettes (contribution exceptionnelle sur les bénéfices très élevés, taxe sur les paris électroniques, intensification des contrôles des grands déposants-fraudeurs, mesures pour le recouvrement des créances arrivées à échéance en faveur de l’Etat, taxe spéciale sur les produits de luxe, appel d’offres pour les concessions de radiotélévision) qui ont été oubliées, comme par hasard, par la troïka (Commission européenne, Banque centrale européenne et Fonds monétaire international) pendant cinq ans, etc.

Ces mesures visent à augmenter les recettes publiques, tout en évitant de contribuer à la récession puisqu’elles ne diminuent pas davantage la demande effective et n’imposent pas de nouvelles charges aux faibles et moyens revenus.

Nous nous sommes mis d’accord pour mettre en œuvre une grande réforme du système de sécurité sociale avec l’unification des caisses d’assurance sociale, la suppression de dispositions autorisant à tort l’octroi de retraites anticipées, en augmentant de cette façon l’âge réel de la retraite.

Nous devons tenir compte du fait que les pertes des caisses d’assurance sociale, qui ont conduit au problème de leur viabilité à moyen terme, sont principalement dues à des choix politiques dont la responsabilité incombe à la fois aux précédents gouvernements grecs et, surtout, à la troïka (la diminution des fonds de réserve des caisses de 25 milliards d’euros en raison du « Private sector involvement » en 2012 et surtout le taux de chômage très élevé, dû presque exclusivement au programme d’austérité extrême appliqué en Grèce depuis 2010).

Finalement, malgré notre engagement de rétablir immédiatement les normes européennes en matière de droit du travail, qui a été complètement détricoté durant les cinq dernières années sous prétexte de compétitivité, nous avons accepté de mettre en œuvre une réforme du marché du travail après consultation du Bureau international du travail, et validée par lui.

Ne plus toucher aux retraites

En tenant compte de tout ce qui précède, on peut à juste titre se demander pourquoi les représentants des institutions persistent à dire que la Grèce ne présente pas de propositions.

Pourquoi continuer d’arrêter de fournir des liquidités monétaires à l’économie grecque, alors que la Grèce a démontré qu’elle veut respecter ses obligations extérieures, avec le paiement depuis août 2014 de plus de 17 milliards d’euros en principal et intérêts (environ 10 % de son PIB), sans financement extérieur ?

Finalement, quel est l’intérêt de ceux qui font fuiter dans la presse que nous ne sommes pas proches d’un accord, alors que celui-ci permettra de mettre un terme à l’incertitude politique et économique ressentie au niveau européen et mondial, qui se prolonge à cause de la question grecque ?

La réponse non officielle de la part de certains est que nous ne sommes pas près d’un accord parce que le côté grec maintient ses positions pour rétablir les conventions collectives et refuse de diminuer davantage les retraites.

Sur ces points, je dois fournir certaines explications : en ce qui concerne le premier, la position de la Grèce est que sa législation du travail doit correspondre aux normes européennes et ne peut pas violer de manière flagrante la législation européenne. Nous ne demandons rien de plus que ce qui est en vigueur dans les pays de la zone euro. Avec le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, nous avons fait une déclaration en ce sens.

La Grèce est présentée comme le mauvais exemple que les autres Etats et peuples européens désobéissants ne devraient pas suivre

 

 

En ce qui concerne le second point, celui des retraites, la position du gouvernement grec est argumentée et logique. La diminution cumulée des retraites en Grèce pendant les années du Mémorandum est de 20 % à 48 % : actuellement 44,5 % des retraités reçoivent une retraite inférieure au seuil de pauvreté relative et, selon les données de l’Eurostat, 23,1 % des retraités vivent dans des conditions de risque de pauvreté et d’exclusion sociale.

Cette situation, qui résulte de la politique du Mémorandum, ne peut être tolérable ni pour la Grèce ni pour aucun autre pays civilisé.

Il faut donc dire les choses comme elles sont : si nous ne sommes pas encore arrivés à un accord avec nos partenaires, ce n’est pas à cause de notre intransigeance ou de positions incompréhensibles. Cela serait plutôt à cause de l’obsession de certains représentants institutionnels qui insistent sur des solutions déraisonnables en se montrant indifférents à l’égard du résultat démocratique des récentes élections législatives en Grèce ainsi qu’à l’égard des positions d’institutions européennes et internationales qui se disent prêtes à faire preuve de flexibilité pour respecter le verdict des urnes.

Pourquoi cette obsession ? Une explication facile serait de dire qu’elle résulterait de l’intention de certains représentants institutionnels de couvrir l’échec de leur programme et d’obtenir en quelque sorte une confirmation de celui-ci. On ne peut pas d’ailleurs oublier que le FMI a publiquement reconnu, il y a quelques années, s’être trompé sur les effets dévastateurs des multiples coupes budgétaires imposées à la Grèce.

Je pense que cette approche ne suffit pas pour expliquer les choses. Je ne crois pas que l’avenir de l’Europe pourrait dépendre de cette obsession de quelques acteurs.

Les deux stratégies opposées de l’Europe

J’arrive à la conclusion que la question grecque ne concerne pas exclusivement la Grèce, mais se trouve au centre d’un conflit entre deux stratégies opposées sur l’avenir de l’intégration européenne.

La première vise l’approfondissement de l’intégration européenne dans un contexte d’égalité et de solidarité entre ses peuples et ses citoyens. Ceux qui soutiennent cette stratégie partent du fait qu’il est inadmissible de forcer le nouveau gouvernement grec à appliquer les mêmes politiques que les cabinets sortants, qui ont d’ailleurs totalement échoué. Sinon, nous serions obligés de supprimer les élections dans tous les pays qui sont soumis à un programme d’austérité.

Nous serions aussi obligés d’accepter que les premiers ministres et les gouvernements soient imposés par les institutions européennes et internationales et que les citoyens soient privés de leur droit de vote jusqu’à l’achèvement du programme. Ils sont conscients que cela serait l’équivalent de l’abolition de la démocratie en Europe et le début d’une rupture inadmissible au sein de l’UE. Enfin, tout cela aboutirait à la naissance d’un monstre technocratique et à l’éloignement pour l’Europe de ses valeurs fondatrices.

La deuxième stratégie conduit à la rupture et à la division de la zone euro et, de ce fait, de l’UE. Le premier pas dans cette direction serait la formation d’une zone euro à deux vitesses, où le noyau central imposerait les règles dures d’austérité et d’ajustement. Ce noyau central imposerait aussi un superministre des finances pour la zone euro, qui jouirait d’un pouvoir immense, avec le droit de refuser des budgets nationaux, même des Etats souverains, qui ne seraient pas conformes aux doctrines du néolibéralisme extrême.

Pour tous les pays qui refuseraient de céder à ce pouvoir, la solution serait simple, la punition sévère : application obligatoire de l’austérité et, en plus, des restrictions aux mouvements des capitaux, des sanctions disciplinaires, des amendes et même la création d’une monnaie parallèle à l’euro.

C’est de cette façon que le nouveau pouvoir européen cherche à se construire. La Grèce en est la première victime. Elle est déjà présentée comme le mauvais exemple que les autres Etats et peuples européens désobéissants ne devraient pas suivre.

Mais le problème fondamental est que cette deuxième stratégie comporte des grands risques et ceux qui la soutiennent ne semblent pas en tenir compte. Cette deuxième stratégie risque d’être le début de la fin, puisqu’elle transforme la zone euro d’union monétaire en simple zone de taux d’échange. Mais, en plus, elle inaugure un processus d’incertitude économique et politique qui pourrait aussi transformer de fond en comble les équilibres dans l’ensemble du monde occidental.

Aujourd’hui, l’Europe se trouve à la croisée des chemins. Après des concessions importantes du gouvernement grec, la décision repose, non plus entre les mains des institutions qui, à l’exception de la Commission européenne, ne sont pas élues et qui ne rendent pas des comptes aux peuples, mais entre les mains des leaders de l’Europe.

Quelle stratégie pourrait l’emporter ? Celle d’une Europe de la solidarité, de l’égalité et de la démocratie ou bien celle de la rupture et finalement de la division ?

Si certains pensent ou veulent bien croire que la décision que nous attendons ne concernera que la Grèce, ils se trompent. Je les renvoie au chef-d’œuvre d’Ernest Hemingway Pour qui sonne le glas ?

 

 

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6 février 2015 5 06 /02 /février /2015 11:28

La victoire de Syriza en Grèce le 25 janvier dernier est incontestable. Pour la première fois, un parti non aligné sur les conservateurs, les libéraux ou les sociaux-démocrates accède à la direction d'un État membre de l'Union européenne. La victoire de la « coalition de la gauche radicale », conduite par Alexis Tsípras, est bonne nouvelle pour les Grecs, c'est une bonne nouvelle pour l'Europe, c'est un espoir pour tous ceux qui défendent une alternative aux politiques d'austérité.

Elle doit néanmoins interroger les dirigeants et militants socialistes sur l'état de la gauche en Europe et sur les politiques défendues par la social-démocratie européenne.

Car la victoire de Syriza s'inscrit dans un contexte de profonde crise économique et sociale, aggravée par une série de cures d'austérité parfaitement ineptes, imposées de l'extérieur par la Troïka et appliquées puis soutenues par le PASOK, représentant local et traditionnel du socialisme européen. Le PASOK avait déjà connu de sévères défaites dans les précédents scrutins, il se retrouve désormais divisé, car Georges Papandréou, son ancien patron, toujours président de l'Internationale Socialiste par ailleurs, l'a quitté quelques semaines avant le scrutin. C'est désormais Syriza qui représente la Gauche en Grèce et le PASOK humilié paie de s'être rallié à la droite, à ses solutions et les politiques d'austérité ; il paie d'avoir renié ses propres principes et trahis la confiance de son peuple.

C'est un avertissement sérieux pour tous les partis socialistes et social-démocrates européens, dont le PS français évidemment.

Les élections se succèdent en Europe et confirment toujours la perte d'influence de notre famille politique. À de rares exceptions près, lorsqu'ils gagnent, les partis socialistes le font poussivement, mais leurs défaites sont de plus en plus souvent des déroutes. Dans de nombreux États membres, ils sont déjà réduits à des rôles de supplétifs dans des gouvernements à direction libérale ou conservatrice.

La stabilité du PSE et du groupe S&D au parlement européen en mai dernier, comparé à la forte baisse d'effectif du groupe PPE, est en trompe-l’œil : elle n'est dûe qu'au score inattendu du Parti Démocrate italien, conduit par son nouveau président du conseil Matteo Renzi, qui a focalisé la campagne sur la personnalité et des promesses de réformes mal définies à l'époque (sur fond de sortie du berlusconisme) et à la bonne tenue du SPD en Allemagne grâce à la candidature d'un des siens Martin Schulz à la présidence de la commission. Partout ailleurs, les résultats sont décevants, y compris lorsque nous sommes dans l'opposition à des gouvernements qui conduisent des politiques d'austérité, comme en Espagne et en Grande-Bretagne. En France, le PS a payé aux élections municipales et aux européennes l'incompréhension et le désaveu d'une partie conséquente de son électorat pour avoir conduit une politique économique et sociale en contradiction avec nos engagements.

En Roumanie et en Bulgarie, les partis socialistes sont minés par la corruption ; en Slovaquie, le SMER-SD n'avait pas hésité à pactiser avec l'extrême droite pour s'assurer une majorité parlementaire ; le PS bulgare a fait la même chose. Le MszP hongrois a perdu toute crédibilité voici plusieurs années en avouant qu'il avait délibérément trompé les citoyens ; c'est désormais tout le pays qui le paie en subissant un gouvernement ultraconservateur et autoritaire, soutenu par un parti fasciste le Jobbik ; il faudra sans doute une bonne génération avant que la gauche s'en remette dans ce pays. Bien moins grave, le Labour Party britannique ne paie plus ses cotisations à l'Internationale socialiste et le Parti travailliste néerlandais et le Parti démocrate italien n'en sont même plus membres. L'Internationale elle-même n'est pas exempte d'incohérences : incapable de convaincre le Parti des Travailleurs brésilien de la rejoindre ou d'engager un dialogue même critique avec les partis de gauche vénézuélien, équatorien et bolivien, elle compte en son sein des organisations qui assument explicitement une orientation néo-libérale, vient d'y accueillir le FLN algérien, après avoir tardé à exclure en 2011 les partis de Ben Ali et de Moubarak.

La famille socialiste et social-démocrate ne brille donc pas par la cohésion politique et stratégique ; elle ne semble pas non plus avoir retenu la leçon des années 1990 et 2000 durant lesquelles ses membres ont mené des politiques d'inspiration libérale, qui se sont révélées funestes tant du point de vue économique et social qu'électoral. Elle n'a pas été capable de reformuler un projet politique mobilisateur. Martin Schulz, notre candidat à la présidence de la commission européenne lors des dernières élections européennes, était supposé porter une exigence de réorientation de la construction européenne ; il est aujourd'hui Président du Parlement européen et a expliqué que le nouveau gouvernement grec serait obligé de faire des compromis : « Je lui ai dit (...) que je ne peux pas m'imaginer que les revendications radicales que lui et son parti ont émises jusqu'ici d'une part trouvent une majorité en Grèce, d'autre part que les partenaires de l'UE y souscrivent », c'est une négation de la nécessité du rapport de force, un oubli de ce que nous avons porté avec lui dans la campagne européenne.

Ainsi il n'est pas très étonnant de constater que lorsqu'il existe un dynamique à gauche, ce sont d'autres partis qui en profitent, surfant sur les compromissions des sociaux-démocrates ou sur leur incapacité à proposer une alternative crédible à la droite : Syriza en est le symptôme le plus prégnant, mais c'est aussi le cas de Podemos(promis à des scores mirifiques aux prochaines législatives) mais aussi d'Izquierda Unidaen Espagne. Au Portugal, la CDU communiste a plus progressé que le PS. En Irlande (nord et sud), c'est Sinn Féin qui est en dynamique alors que le Labour s'effondre. Pour compléter le tableau, plusieurs forces politiques siègent dans les groupes parlementaires européens écologistes ou GUE/NGL, alors qu'ils portent un discours socialistes assez « classiques », c'est le cas de Syriza (dont le leader Alexis Tsípras était le candidat du Parti de la gauche européenne, présidé par Pierre Laurent, à la présidence de la commission) ou de Sinn Féin à nouveau, mais aussi du Parti Socialiste néerlandais, du SNP écossais ou du Parti Socialiste Populaire danois.

Si les socialistes européens, et parmi eux en premier les socialistes français, veulent sortir de l'impasse politique, il est urgent d'engager un dialogue structurel avec ses forces nouvelles ou, pour celles qui sont entrées plus anciennement dans le paysage politique, ont su se renouveler alors que nous étions incapables de structurer une alternative à l'offensive libérale engagée depuis la fin des années 1970, au point d'intégrer de manière plus ou moins assumée une partie de ce discours dans son corpus programmatique.

Nous devons également mettre fin au compromis historique avec les anciens démocrates-chrétiens, devenus conservateurs. Il ne s'agit plus simplement d'assurer la co-gestion du Parlement européen, pour un bon fonctionnement des institutions communautaires, mais trop souvent les compromis s'étendent au fond des politiques et des délibérations et amènent les membres du groupe S&D à concéder trop de points au PPE et aux libéraux. Cela mine durablement la lisibilité et la cohérence de nos options politiques, et nous rend plus inaudible encore auprès des électeurs européens. Nous devons lui substituer un rapprochement avec le Parti de la Gauche européenne, dirigé par Pierre Laurent, et les Écologistes. Seule cette option nous permet de rendre crédible la perspective d'une alternative politique sur les enjeux de la construction européenne.

Nous devons dépasser les cadres d'un Parti des Socialistes Européens qui n'est absolument pas à la hauteur des enjeux du continent ; le PS français doit de nouveau assumer en son sein de porter les débats que les sociaux-démocrates n'osent pas affronter. Ce travail avait débuté sous la Présidence de Poul Nyrup Rassmussen, avec le soutien de Martine Aubry lorsqu'elle était Première secrétaire, elle a permis que s'impose enfin l'idée d'une candidature commune à la Présidence de la Commission, en appuyant une interprétation très généreuse des traités européens, afin de politiser les élections européennes. Depuis son départ, le PSE est redevenu un forum de dirigeants nationaux a minima qui ne produit plus rien et n'implique pas les militants socialistes européens. Les seules initiatives militantes européennes ont eu lieu hors du PSE, avec la plate-forme Européens contre l’Austérité initiée par l’aile gauche du SPÖ autrichien, repris en Allemagne, en France, en Italie, signée également par des élus de la Gauche Européenne et Ecologistes, avec la mobilisation des ailes gauches sociales-démocrates contre les accords de libre-échange transatlantiques, au côté du mouvement syndical européen.

Si l'Union européenne a vocation à renforcer son poids politique, alors les citoyens doivent être plus associés, alors les militants socialistes européens doivent être convoqués pour se prononcer sur l'orientation politique du PSE et ses dirigeants (c'est d'autant plus crucial que les fonctionnements de nos partis diffèrent profondément d'un pays à l'autre ; ainsi les délégations nationales dans les congrès du PSE ne reflètent absolument pas la réalité des sensibilités politiques qui s'expriment dans les partis).

Enfin, les socialistes français doivent ouvertement interroger le périmètre politique du PSE et de l'Internationale Socialiste, qui n'ont plus aucune cohérence interne et ne sont plus en mesure dans ces conditions de peser sur les débats internationaux. La dernière action réelle de l'IS a été l'accouchement des accords d'Oslo en 1993, en mettant autour de la table nos camarades du Fatah et du Parti travailliste israélien. Depuis plus rien !

Nous sommes socialistes, nous sommes donc favorable au projet européen et internationalistes. Ces questions sont donc incontournables et la résolution des enjeux qui y sont liés impérative.

Frédéric FARAVEL, membre titulaire du BNA, BF PS95, section de Bezons

Arnaud Delcasse, SF PS 06 – Maxime Lonlas, suppléant CNCF, CF PS 95 – Charlotte Picard, CFC PS57 - Brice Giacalone, SF PS14 et suppléant CN – Henri Le Lorrain, SF Europe PS93 – Sébastien Lombard, SF PS95, secrétaire de section du Haut-Val-d'Oise – David Cayla, supléant CN, PS49 – Gérald Elbaze, titulaire au CN, BF PS33  Dylan Boutiflat, SF PS95, titulaire CNCF – Martine Chantecaille, titulaire au CN, BF PS85 – Mathieu Pouydesseau, SF FFE – Élodie Schwander, titulaire au CN, BF PS07 – Adeline Lamberbourg, adjointe au Maire du 13e ardt, BF PS75 – François Rochon PS94  – Patrick Chasserio, CF78 – Jean-François Thomas, premier secrétaire fédéral de la Meuse, conseiller régional, BN

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20 mai 2014 2 20 /05 /mai /2014 19:17
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16 mai 2014 5 16 /05 /mai /2014 18:38

drapeaueuropeen.jpg

Les élections européennes qui se tiendront du 22 au 25 mai 2014 vont se dérouler dans un contexte particulier. Pour la première fois, le groupe parlementaire européen arrivé en tête sera prioritaire pour désigner le futur Président de la Commission Européenne, rare conséquence positive du Traité de Lisbonne.

Cependant, les multiples modifications institutionnelles et le discrédit croissant du Président sortant, le portugais José Manuel Durão Barroso, ont considérablement affaibli la Commission, passée au second plan derrière le Conseil européen et ses dirigeants conservateurs, qui ont mis en scène leur «lutte» contre la crise financière.

Dans le même temps, et conséquence des décisions prises en commun par la Commission et les gouvernements conservateurs, les citoyens européens n'ont jamais été autant distants de l'idée européenne. Cette défiance, cet euroscepticisme croissant, se traduit par la progression dans la quasi totalité des États membres des mouvements populistes et nationalistes, dans les élections nationales, les élections intermédiaires ou encore dans les enquêtes d'opinion en prévision du scrutin européen quand ce ne sont pas directement certains partis conservateurs membre du Parti Populaire Européen (PPE) qui jouent directement sur la xénophobie et/ou l'europhobie.

marine-le-pen-et-geert-wilders-ce-mercredi-a-la-haye-pour_1.jpgFN en France, UKIP en Grande-Bretagne, Aube Dorée en Grèce, AfD en Allemagne, Jobbik et Fidesz (PPE) en Hongrie, Forza Italia (PPE) et Lega Nord en Italie, PVV aux Pays-Bas, NVA et Vlaams Belang en Belgique, SD (anciens néonazis) en Suède, parti des Vrais Finlandais, etc. auxquels on peut ajouter l'ultra-conservateur PiS polonais. En Espagne, cela se traduit par le renforcement des égoïsmes régionaux (rien à voir entre la revendication d'une Catalogne républicaine revendiquée par l'ERC et une partie du PS catalan, d'une part, et la campagne pour une indépendance de repli plaidé aujourd'hui par le gouvernement CiU – membre du PPE – de la Généralité, d'autre part).

Certes, toutes les nations européennes traversent des interrogations sur leurs identités, bousculées par la globalisation. Mais jusqu'à la fin des années 1990, l'Europe avait été perçue comme une force face à la dérégulation présentée comme une conséquence irrésistible de la mondialisation libérale. Aujourd'hui, pour nombre de citoyens européens, l'Europe est considérée comme un «cheval de Troie» de cette mise en coupe réglée libérale.

La construction européenne s’est construite sur un rêve de prospérité partagée. Sous l'influence conjuguée et volontariste des gouvernements conservateurs et de la Commission Barroso, elle est aujourd’hui l’otage de politiques néo-libérales et de dérives technocratiques qui l’ont affaibli. On en connaît les conséquences : accroissement des inégalités, remise en cause en cause du modèle social acquis de haute lutte par les mouvements ouvrier et progressistes, démantèlement des capacités d’intervention de la puissance publique, réduction du périmètre des services publics.

Les peuples eux aussi sont mis en concurrence. Ils subissent l’austérité, inacceptable et dangereuse. Aucune solidarité effective, aucun projet commun ne donne sens à ce qui doit être la grande ambition progressiste du XXIème siècle.

Parallèlement, l’intégration politique fait du surplace. Les principes démocratiques de base sur lesquels l'Europe s'est fondée sont même remis en cause : la troïka, qui impose ses choix à une grande partie de l'Europe, sans aucune légitimité, sans rendre de comptes à quiconque, en est l'illustration la plus criante. La faiblesse persistante de la croissance, la désindustrialisation globale, la domination de la finance sur l’économie réelle ne tombent pas du ciel. Elles sont la conséquence de choix économiques et politiques impulsés par les conservateurs et les libéraux. Ils ont accéléré l’accumulation de la dette publique.

On nous avait promis l’Europe prospère, elle est austère. On attendait l’Europe démocratique, elle continue à être oligarchique. Quant à l’Europe sociale, elle est sortie des priorités.

Cette situation politique, économique et sociale explique ainsi largement le désamour croissant des citoyens européens avec l'Union Européenne, elle explique la progression des populismes et des replis xénophobes, mais aussi de l'abstention.

Cela dresse par ailleurs un triste constat : la gauche européenne, toutes sensibilités confondues n'apparaît pas de manière automatique comme un recours pour les classes moyennes et populaires face aux gouvernements conservateurs et à une Commission libérale.Les sociaux-démocrates ont eux-mêmes parfois accompagné la spirale qui a discrédité pour une part la construction européenne aux yeux des citoyens. Depuis nombre de partis travaillistes, socialistes ou sociaux-démocrates sont retournés dans l'opposition et ont commencé à réviser leur analyse sur les erreurs et les dérives commises au pouvoir. Le Parti Socialiste Européen lui-même a fait évoluer son approche politique – et le PS français y avait fortement contribué de du printemps 2009 à l'automne 2011 – et semble (enfin !) en avoir terminé avec l'habitude de la cogestion du Parlement européen avec des Démocrates-Chrétiens qui n'existent plus. Cela permettra sans doute de regagner les quelques points et sièges à Bruxelles et Strasbourg, qui avaient manqué en 2009 (année électorale historiquement basse pour le PSE) et qui avaient ainsi permis que le PPE distance largement le groupe S&D.

Il n'y a pas d'alternative efficace à gauche du PSE ; la gauche radicale européenne rassemblée (autant que possible, le parti de Jean-Luc Mélenchon a quitté les instances du Parti de la Gauche européenne présidé par Pierre Laurent, pour cause de désaccord aux municipales en France !?!) dans le PGE et le groupe Gauche unitaire européenne/Gauche verte nordique (GUE/NGL).Il n'y a guère que Siryza et Alexis Tsipras – qui flirtent avec les 30 % – qui sortent du lot, sur les ruines du PASOK et de leur pays, grâce à une ligne politique forte et difficilement réductible aux caricatures que Jean-Luc Mélenchon voudraient faire avaler aux téléspectateurs français.

Une alternative est possible. Pour réussir, le combat européen que nous menons doit être assumé politiquement. Il faut donc faire vivre un vrai clivage droite/gauche et non plus pro ou anti-Europe. Le choix qui s’offre aux électeurs est :

  • - soit de continuer avec l’austérité, un budget de l’UE en recul (-5% pour 2014-2020), aucun espoir de soutien pour les pays les plus touchés par la crise ;

  • - soit de faire un autre choix avec les socialistes, à condition qu'ils arrivent à réunir la gauche et les écologistes, incarné par Martin Schulz, et qui propose plus de solidarité entre les pays, une politique économique européenne, la création de vrais leviers financiers européens (ex : renforcement/création de fonds propres, capacité d’emprunt de l’UE, assurance chômage européenne, etc.).

François Hollande avait eu raison lorsqu’il se disait prêt à une "tension amicale" avec la droite allemande ; on aurait apprécié qu'il conserve le même allant. La confrontation avec les droites européennes est nécessaire. C’est aujourd’hui qu’il faut construire un rapport de force avec les conservateurs, et Martin Schulz par le programme qu'il porte incarne aujourd'hui ce rapport de force et cette volonté de rassemblement des progressistes qu'on aimerait voir portés au niveau national.

Martin_Schulz.jpgAvec un parlement européen dominé par la gauche et donc Martin Schulz comme Président de la Commission européenne, nous pouvons espérer avancer sur des sujet cruciaux pour réorienter de manière concrète la construction européenne et réconcilier les citoyens avec elle.

1. La question sociale avant tout : vers un Traité Social Européen.

L’emploi et le pouvoir d’achat sont la préoccupation première de nos concitoyens. Malheureusement, la question sociale est restée à la remorque de la construction européenne. La lutte contre le chômage et les inégalités doit être la priorité de la prochaine étape de la construction européenne. Le "traité social européen", notamment porté par la Confédération Européenne des Syndicats (CES) doit donner pour buts aux politiques communautaires l’amélioration des conditions de vie et de travail, la qualité des emplois, la lutte contre les discriminations à l’embauche et dans les rémunérations, le dialogue social, le développement durable. Il doit garantir à tous les salariés dans l’Union européenne les droits fondamentaux que sont les droits du travail et le niveau de protection sociale, et instaurer le principe de la clause la plus favorable.

Mais surtout, il doit fixer un cadre de convergences progressives vers le haut des standards sociaux les plus importants comme la durée légale du travail, le salaire minimum. La création d’un SMIC dans chaque pays est importante mais ne saurait suffire pour combattre le dumpingsocial. L’écart entre les SMIC doit être réduit pour se rapprocher du taux le plus élevé.

Dans le cadre des traités existants, il faut interdire les pratiques de rémunération selon le « principe du pays d’origine ». Il faut exiger l’application de la directive « travailleurs détachés » et fixer un principe clair : l’obligation de respecter les lois et conventions collectives du pays où s’effectue le travail.

2. Suspendre le pacte de stabilité : la croissance et l’emploi d’abord.

La priorité à la question sociale va de pair avec l’impératif de relance de l’économie. Le pacte de stabilité et le TSCG sont deux verrous qui interdisent désormais aux gouvernements de disposer des moyens d’action nécessaires pour faire face à la crise. Le pacte de stabilité doit être immédiatement suspendu. Le rythme de réduction des déficits imposé par la Commission européenne actuelle finirait par provoquer des coupes sombres dans des dépenses publiques et sociales essentielles. L'austérité a démontré son inefficacité: elle contribue à augmenter la dette, pas à la réduire. Les peuples, les États et l'Union ne survivraient pas à la poursuite de cette politique suicidaire.

Le pacte de stabilité doit ensuite être réformé. Les dépenses d'investissements doivent être exclues du calcul des déficits, son fonctionnement doit rejeter la logique de sanction et introduire celle de coopération. Le dogme du 3 %, chiffre sans aucune valeur économique, doit être aboli. Le calendrier de réduction des déficits doit être réaliste et tenir compte du cycle économique et de la nécessité de lutter contre le chômage.

3. La BCE doit prêter directement aux États

Dans tous les pays européens, la montée de la dette publique est en premier lieu liée au déploiement des politiques de l’offre, centrées sur la baisse conjointe des dépenses publiques et des impôts. Les mesures fiscales favorables aux plus aisés ont essentiellement favorisé l’épargne des riches et n’ont pas provoqué l’effet annoncé sur la croissance. Il en a résulté une baisse des recettes fiscales et une montée des déficits. La crise a en second lieu fait exploser la dette à partir de 2008. Renonçant à prêter directement aux États, les banques centrales ont prêté aux banques qui elles même ont prêté aux pays avec des taux d’intérêt exorbitants, s’enrichissant au passage sur le dos des contribuables et des citoyens. Ces taux d’intérêt particulièrement élevés ont été des éléments déterminants de l’explosion de l’endettement. Une large part des dettes souveraines peuvent être ainsi considérées comme «illégitimes».

Au-delà, Il faut distinguer la bonne dette, celle qui finance le modèle de développement durable, de cette mauvaise dette. Cela justifie que, dans de nombreux pays, il faille restructurer la dette pour libérer des ressources nécessaires au financement de l’économie réelle. Et en tout cas, le temps est venu d’imposer aux banques centrales et à la BCE de prêter à nouveau directement aux États.

Le sort réservé aux peuples grecs, irlandais, portugais et espagnols reste inacceptable. Les «plans de sauvetage» de ces pays ne sont que des plans de sauvetage des grandes banques européennes détentrices des titres de leurs dettes publiques. Ce sont les peuples qui paient la facture avec les véritables plans de destruction sociale que leur impose la Troïka (Banque centrale européenne, Union européenne et FMI).

4. Un véritable plan de relance européen

Les «réformes structurelles» prônées par les conservateurs et les libéraux sont impuissantes face à la récession. Elles ont même entretenu une logique de déflation salariale qui a tué la demande intérieure européenne. Un New dealeuropéen est désormais à l’ordre du jour. Il doit s’articuler de politiques de soutien à la reprise adaptées à chaque État et d’un plan de relance à l’échelle européenne. Le retour de l’intervention de la puissance publique à tous les niveaux est d’autant plus nécessaire pour financer et planifier la transition écologique.

Il faut permettre à tous les pays de la zone euro de s’orienter vers la relance en faisant sauter les verrous budgétaires qui enferment leurs moyens d’action. En étant coordonnées, les mesures de soutien dans chaque État seraient nettement plus efficaces.

La relance doit également opérer à l’échelle Européenne, pour financer la convergence vers le haut de tous les pays et relancer la croissance dans toute l’Union. Pour cela, des euro-obligations pour financer les investissements d'avenir doivent être mise en œuvre. Le capital de la Banque Européenne d'Investissement doit être augmenté, pour lui permettre de développer ses activités de financement de la croissance. L'UE doit pouvoir recourir à l'emprunt et profiter de l'épargne privée pour financer ses grands investissements, en particulier pour la transition énergétique, et lutter contre les inégalités territoriales et sociales. L'emprunt s'impose comme la contrepartie logique à la mise en œuvre de l'harmonisation fiscale et sociale.

5. Renégocier budget européen

Hollande Strasbourg 05-02-2013Nous regrettons fortement que le Président de la République ait cédé face à Barroso, Merkel et Cameron sur la baisse incompréhensible du budget européenne à court terme (2013) et à long terme (perspectives financières 2014-2020). Un veto français aurait alors rouvert la discussion sur la base du budget 2013, moins restrictif que celui actuellement proposé par le Conseil et imposé l’ouverture, dès le renouvellement du Parlement européen, du débat sur la levée de ressources propres nouvelles et pérennes, financées par des impôts européens, voire, ultérieurement par des emprunts fédéraux.

Malgré cet échec du 1er semestre 2013, s'ils sont dirigés par la gauche, le Parlement européen et la Commission européenne doivent remettre le travail sur le métier.

Le budget européen représente seulement 1% du PIB de l'UE. Àtermes, la construction d'une Europe de la croissance et de l'emploi implique la mise en place d'un vrai budget d’intégration solidaire, représentant au minimum 5% du PIB européen.

La taxe sur les transactions financières doit être le premier de ces impôts européens. Celle-ci doit être élargie à tous les pays. D’autres ressources propres doivent être créées. Ces dernières pourraient provenir de la lutte contre la fraude fiscale, de la taxation des kilomètres parcourus par les poids lourds, ou encore de la taxation carbone aux frontières de l’UE.

6. Mettre la Banque Centrale Européenne au service de l’économie réelle

Par la force des choses, la BCE est intervenue au cours de la crise, dans les limites autorisées par ses statuts, pour éviter une panne générale de liquidité et enrayer la spéculation sur les dettes souveraines. Pour autant, une réforme de la politique monétaire européenne et des statuts de la BCE doivent doit faire de la croissance et de l'emploi les objectifs prioritaires de la BCE, dans le respect de la recherche d'une inflation contrôlée. L'indépendance absolue de la BCE est sans aucun équivalent dans le monde. Les socialistes doivent promouvoir l'idée d'une BCE responsable devant des institutions communautaires démocratiques.

La BCE doit pouvoir acheter directement lors de leur émission les titres des dettes publiques des États-membres de l’Union européenne, sans que ces États aient à subir les «conditionnalités» prévues par le Mécanisme européen de stabilité, c’est-à-dire les plans de destruction sociale qui frappent la Grèce, l’Irlande, le Portugal, l’Espagne et demain Chypre. C’est ce que font d’ailleurs toutes les banques centrales dans le monde, la Réserve fédérale des États-Unis, la Banque du Japon comme la Banque d’Angleterre.

7. Mettre fin à l’euro surévalué

L’action de la BCE peut aussi influencer le taux de change de l’euro face au dollar. Pour autant, la politique de change ne relève pas du champ de compétence de la BCE. C’est aux États, au sein du Conseil, que revient la mission de fixer le taux de change de l’euro. Le débat sur la politique de change de l’Union est malheureusement resté interdit. Or la surévaluation de l’euro nuit à l’économie et à l’emploi dans la plupart des pays de la zone euro. L’euro ne saurait être une monnaie au service des seuls pays qui réalisent des excédents commerciaux et qui entendent préserver le patrimoine de leurs épargnants (en l'occurrence des retraités allemands, électeurs d'Angela Merkel, dont les pensions sont fondées sur la capitalisation) grâce à une monnaie trop forte.

8. Encadrer le libre-échange, refuser le traité transatlantique.

La politique de change est un instrument de politique commerciale, au même titre que Les barrières au libre-échange incontrôlé.

Le libre-échange sans précaution a accru le phénomène des délocalisations. Il entretient une pression à la baisse sur les salaires et mis en cause la protection sociale des pays où le modèle social est le plus avancé. Nous devons tirer les conséquences de cette concurrence déloyale. Il faut réaffirmer la nécessité d’un tarif extérieur commun aux frontières de l’Europe en définissant les critères sociaux et environnementaux nécessaires pour préserver notre modèle social, la qualité de la vie et des emplois rémunérés à leur juste valeur.

Il est temps de proposer un accord européen sur la régulation des échanges de l’UE avec ses partenaires qui permettent l’instauration d’écluses sociales et fiscales.

Il faut suspendre les négociations pour un accord transatlantique. L’industrie européenne n’a rien à y gagner et beaucoup à y perdre. Les États-Unis viennent d’injecter des fonds publics considérables pour soutenir certains de leurs secteurs industriels qui, une fois modernisés, seront prêts à conquérir le marché européen. Pendant ce temps-là, l’Europe interdit les aides directes aux entreprises.

La mise en œuvre de l’accord transatlantique va à l’encontre du projet d’une Europe forte et indépendante dans un monde multipolaire. Elle ne saurait tomber dans le piège d’une alliance dite occidentale en face des pays émergents.

D’autres voies de coopération avec les États-Unis peuvent être promues mais l’accroissement du tout-concurrence n’est pas acceptable.

9. Une Union démocratique, par et pour les citoyens

Aujourd’hui, la crise en Europe s’est muée en crise de l’Europe. Il faut d’urgence organiser le saut démocratique qui restaure une capacité réelle des peuples à peser sur les décisions. Il est donc essentiel de renforcer les pouvoirs du Parlement européen et de mieux associer les parlements nationaux.

Le parlement européen doit être représentatif de la réalité démographique des différents pays. On ne peut continuer. Le rôle de co-législateur du Parlement européen doit être étendu à tous les domaines, la règle de l'unanimité au Conseil des ministres abolie. Les Parlements nationaux doivent être pleinement associés aux décisions budgétaires majeures, telles que les programmes de stabilité et les programmes de réforme.

Les changements de traités doivent faire l'objet d'une Convention, dans laquelle les citoyens sont représentés par leurs élus directs au Parlement Européen. Les peuples doivent pourvoir les ratifier par référendum. L'Europe ne peut fonctionner comme un espace diplomatique, dans lequel les intérêts des Etats prévalent sur celui du peuple. La représentation populaire, tant au niveau national qu'au niveau européen, doit être renforcée.

* * * * *

Choisir notre Europe avec une majorité de gauche est à portée de main

Socialistes, nous n’avons pas renoncé à l'Europe démocratique et sociale, l'Europe des travailleurs que nous espérons. Celle qui privilégie la coopération à la compétition. Celle de la construction de «solidarités de fait». Celle qui investit et prépare l’avenir. Avec Martin Schulz et le PSE, pour la première fois, la gauche est dotée d'un véritable agenda qui – si elle est en tête aux élections européennes – n'en fera pas l'otage des jeux gouvernementaux aujourd'hui dominés par les conservateurs et les libéraux.

Qui peut croire qu'un compromis avec Jean-Claude Juncker, qui a été pendant 18 ans Premier Ministre du principal paradis fiscal d'Europe, ou avec un Libéral respectable mais assumé comme Guy Verhofstadt, puisse faire progresser aujourd'hui notre Europe. Accepter une politique néfaste «pour éviter d’ajouter la crise à la crise» non seulement n’évite pas la crise mais l’aggrave. C’est cela aujourd'hui l'enjeu des élections européennes de 2014 : la confrontation démocratique avec la droite européenne qui veut condamner l’Union à l’austérité sans fin.

France_Info_sondage_14-05-2014.jpgLes téléspectateurs français ont pu se faire jeudi 15 mai une idée du fossé qui séparent les candidats conservateur et libéral de la gauche européenne. Aujourd'hui, l'élection va se jouer d'un cheveu et il serait dommage d'échouer à quelques mètres de l'objectif. Au 14 mai, le groupe PPE pouvait espérer 212 sièges contre 209 aux sociaux-démocrates. Dans cette configuration, si la coalition la plus solide se trouve dans le rassemblement des gauches européennes, les gouvernements conservateurs européens n'hésiteraient pas à appeler à la Présidence de la Commission le représentant du groupe PPE (Juncker), ce qui plongerait la construction européenne face à deux dangers mortels :

  • -> le retour à l'impuissance et aux jeux intergouvernementaux avec le maintien de la cogestion PPE-PSE ;

  • -> le rapprochement des conservateurs européens avec plus à droite qu'eux.

socialistes_vs_austerite.pngC'est donc à 4 ou 5 sièges que va se jouer l'élection. Et disons le sans fard, le groupe S&D pourrait rater de passer en tête à cause d'un mauvais résultat du PS français. Martin Schulz en a conscience et c'est pourquoi il est très présent en France. Il a été particulièrement confronté à la difficulté lors de sa visite à Lampaul-Guimiliau en Bretagne où les salariés du groupe GAD sont venus lui reprocher la politique menée par François Hollande. Martin Schulz a été forcé de déconnecter sa campagne de la politique conduite en France, car effectivement il y a une différence notable entre les propositions du PSE et les mesures du gouvernement Valls qui tente de faire de la France le bon élève de la Commission Barroso. Certains soutiens indéfectibles du Président de la République expliquent aujourd'hui que seule la victoire de la gauche au Parlement Européen pourrait desserrer l'étau dans lequel notre pays est tenu, avouant par la même le caractère néfaste des politiques conduites depuis l'automne 2012.

Donner une majorité à Martin Schulz en faisant élire quelques eurodéputés PS en plus, c'est surtout à la fois construire enfin la réorientation de la construction européenne et donner de la force à des responsables comme Pervenche Bérès, Emmanuel Maurel, Isabelle Thomas ou Édouard Martin entre autres qui plaident pour une nouvelle politique. Ensemble, avec toute la gauche européenne, le sursaut, c’est urgent.

Frédéric FARAVEL

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13 juin 2013 4 13 /06 /juin /2013 08:05

mlgeurope-700x300.jpgLa commission des résolutions vient d’aboutir à un compromis politique dont nous avons été partie prenante.

L’aspiration majoritaire des militants à une réorientation de l’Europe qui s’est exprimée dans nos amendements a été entendue.

La commission a adjoint au texte final une résolution contenant “14 priorités socialistes pour réorienter l’Europe” à l’adresse de nos partenaires du Parti Socialiste Européen.

Parmi ces priorités adoptées par la Commission des résolutions figurent les messages politiques essentiels que nous avons portés avec les amendements de Maintenant la Gauche :

- “augmenter le budget européen par sa renégociation, en exigeant du Conseil Européen un cadre financier pluriannuel plus ambitieux permettant d’accroître les ressources en faveur de la croissance et de l’investissement” ;

- ” réviser le pacte de stabilité pour donner la priorité au soutien à la croissance dans chaque pays. L’Europe a besoin de croissance, pas d’austérité. Nous demandons un calendrier étendu, crédible et réaliste de réduction des déficits publics. Nous poursuivrons conjointement le soutien aux dépenses d’avenir indispensables.” ;

- “agir en faveur d’une parité plus équilibrée de l’euro, aujourd’hui surévalué par rapport au dollar américain, au yuan chinois et au yen japonais, en confiant la politique de change aux autorités politiques de l’union. Comme le prévoit le traité le conseil Europeen doit utiliser pleinement sa compétence en la matière. Nous demandons son inscription à l’ordre du jour du conseil européen” ;

- “les socialistes français sont extrêmement réservés sur l’opportunité des négociations commerciales USA-UE. En aucune façon, les socialistes ne pourront accepter de ratifier un traité qui mettrait en cause les intérets économiques, stratégiques et le modèle social de la France et de l’Europe”.

Nous nous satisfaisons de l’intégration des éléments majeurs que nous avons portés et que les militants ont soutenus très largement.

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11 juin 2013 2 11 /06 /juin /2013 07:16

MLG-95_2012-2013.jpgL’enjeu de la convention

La Convention Europe s’inscrit dans ce contexte particulier : à moins d’un an des élections européennes, et au moment où le gouvernement entend défendre des positions « offensives » face aux conservateurs majoritaires au niveau de l’Union Européenne, le PS se doit d’être en première ligne pour contester les politiques d’austérité qui plongent notre continent dans le chômage et la précarité. En effet, nous ne devons pas abandonner le combat internationaliste au nom des critères de convergences, de l’absurde règle des 3% et de l’intégration au forceps au « marché unique » et dérégulé. L’Europe sociale ne doit plus être un slogan, mais un programme politique.

Au moment où le président de la République annonce de nouvelles initiatives pour réorienter la construction européenne, c’était une nécessité démocratique de demander aux militants socialistes leur avis sur ce sujet décisif pour la vie quotidienne des Français.

Des conditions de débat peu favorables

Si la participation au vote sur le texte de la convention fut moyenne, il faut saluer les camarades qui se sont déplacés pour néanmoins défendre leurs convictions : les conditions du débat étaient en effet loin d’être optimales.

Comme nous l’avons vigoureusement dénoncé, il nous a été interdit de déposer un texte alternatif à celui de la direction nationale. Pour faire entendre notre voix, nous avons cependant déposé quatre amendements : deux signés par les animateurs de « Maintenant La Gauche », deux déposés en commun avec les camarades d’ « Un Monde d’Avance ».  Celles et ceux qui se reconnaissaient dans nos idées n’avaient pas d’autre choix… que de voter pour le texte de la direction… pour pouvoir l’amender ensuite !

Pas moins de 13 amendements étaient soumis aux adhérents : certains, de pure forme ou ne posant aucun problème de fond entre socialistes, avaient pour seule fonction de « noyer » les nôtres dans la masse.  Bref, plutôt qu’un débat clair et simple, le premier secrétaire a préféré compliquer la discussion au risque de démobiliser les socialistes.

Conscients de la forte attente d'un changement rapide d'orientations de l'Union Européenne et d'une volonté manifeste des militants socialistes relayant l'avis d'une grande majorité des français de voir s'engager une alternative à l'austérité, à la concurrence et aux libre échange généralisés; la direction actuelle du PS, embarrassée, à cru pouvoir éviter ou contourner une réalité politique qui s'impose toujours in fine à chaque échéance électorale et ce de plus en plus nettement. Cela fut un mauvais calcul, qui plus est dangereux.

europa logoUn résultat incontestable

Cela n’a pas empêché les militants de se prononcer en toute liberté. Et le résultat est sans appel.

Tous nos amendements ont recueilli davantage de votes « pour » que de votes « contre ». En toute logique démocratique, nos amendements, recueillant entre 60 et 73% des suffrages exprimés, devaient être considérés comme adoptés.

Une créativité bureaucratique sans limites...

alain_fontanel.jpgC’était sans compter sans la créativité bureaucratique de certains responsables de la direction! Additionnant les votes « contre », « abstention », « blancs » et « nuls », mais aussi les votes des militants ayant approuvé le texte sans se prononcer sur les amendements, le secrétaire national aux fédérations en conclut donc au rejet… des 13 amendements soumis aux militants! Ce mode de calcul aussi inédit que farfelu aboutit à un résultat politiquement absurde. Ainsi, l’amendement relatif aux droits des femmes n’est pas adopté, ne recueillant, selon la direction nationale, qu’un peu plus de…. 20% !

Alain Fontanel, celui qui tente d'expliquer comment la direction
nationale du PS veut compter l'abstention, les blancs
et les nuls avec les votes contre...

Nous avons évidemment contesté cette « nouvelle règle du jeu » (décidé par qui ? quand ? justifiée comment ?), suivi en cela par des dizaines de fédérations et des milliers de militants sincères qui  savent qu’on ne solde pas des problèmes politiques par de grotesques réponses bureaucratiques.

Et la politique dans tout cela ?

Car la polémique actuelle ne doit pas nous faire oublier l’essentiel. En votant pour la suspension du pacte de stabilité budgétaire, en plébiscitant l’idée d’une initiative en faveur d’une nouvelle politique monétaire au niveau de l’Union, en refusant fermement le traité transatlantique entre l’Europe et les Etats-Unis, les militants socialistes ont clairement indiqué l’objectif qu’ils assignaient au Parti.

Que souhaitent-ils ? Simplement et objectivement que le PS porte haut et fort, auprès de ses partenaires socialistes et sociaux-démocrates européens, une orientation plus offensive face aux conservateurs et aux libéraux européens. Car le PS français est le seul de ces partis au pouvoir, sans coalition avec les conservateurs. Aussi, il est attendu et doit se faire entendre en rappelant que l'élection de François Hollande a été acquise aussi et beaucoup sur son engagement à réorienter l'Union Européenne.

pselogo2Ils veulent surtout que les socialistes ne se contentent pas de belles paroles. Condamner l’austérité imposée par la droite européenne, refuser le dumping fiscal et social qui organise la concurrence entre les salariés de l’Union, regretter l’euro surévalué qui affaiblit nos entreprises à l’exportation, c’est nécessaire. Mais passer aux actes, c’est mieux. D’où nos propositions en faveur d’une feuille de route claire, de mots d’ordre précis, d’une véritable stratégie européenne et socialiste de sortie de crise susceptibles d’être repris par le parti dans les mois à venir.

C’est le sens du vote en faveur des amendements que nous avons déposés qui, sans dénaturer le texte adopté par les militants, énumèrent un certain nombre d’exigences concrètes.

Oui, des exigences, ou si l’on préfère des conditions, parce qu’on ne construit pas un rapport de forces sans poser clairement ce qui, pour nous, relève de l’essentiel.

La convention de dimanche doit prendre acte de la réalité , les amendements que "maintenant la gauche" a présenté doivent être pris en compte sur le fond, le texte doit être amendé en tenant compte de ce signal des militants socialistes.

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28 mai 2013 2 28 /05 /mai /2013 13:49

Suite à ma réunion de section d'hier et à nos débats pour la convention Europe du PS, je souhaite redonner quelques éléments qui précisent les enjeux du vote du 6 juin prochain.

banniere_convention_Europe_PS_2013.jpgLa convention Europe du Parti Socialiste se déroule dans un moment déterminant : la nécessité de réorienter la construction européenne, qui risque de se déliter dans l'impasse l'impasse austéritaire, apparaît plus clairement que jamais. Le PS se doit donc d'avoir une vision claire et un agenda précis ; c'est pourquoi le débat se devait d'être largement ouvert et la motion 3 "Maintenant la Gauche" avait préparé avec d'autres responsables socialistes un texte qui répondait à ces enjeux : «Europe : le sursaut, c'est urgent !» (télécharger le texte ici). La direction du Parti a pourtant décidé le 30 avril, à notre grand étonnement, d'interdire le dépôt de textes concurrents au sien.

Le débat n'en reste pas moins nécessaire. En effet, si nous pouvons nous réjouir que le texte du Parti s'articule autour de la nécessité d'une alternative à l'austérité et d'assumer la confrontation avec les partis et gouvernements conservateurs européens, il reste bien trop imprécis sur certains sujets majeurs et a été édulcoré après l'intervention du gouvernement entre la commission des résolutions et le bureau national de la fin du mois d'avril. Aussi, si certaines orientations du texte proposé aux militants par la direction du parti paraissent aller dans le bon sens, celui-ci reste désespérément silencieux sur les moyens à mettre en œuvre pour atteindre les objectifs que nous pouvons partager collectivement.

Maurel_Lienemann_une_autre_Europe_est_possible-copie-1.jpgDans ce contexte, 13 amendements nationaux ont été déposés. Avec mes camarades Emmanuel Maurel et Marie-Noëlle Lienemann, j'en défends 4, portés avec mes amis et déposés également pour certains avec des camarades qui ne sont pas tous de la même motion. Ces amendements – n° 4, 8, 10 et 13 – condensent les questions-clés : mettre la croissance et l’emploi avant la réduction des déficits, pour un véritable plan de relance européen, mettre la BCE au service de l’économie réelle, refuser le traité transatlantique (États-Unis d’Amérique / Union européenne). (cf. pièces jointes en PDF)

ATTENTION ! LE 6 JUIN, POUR VOTER NOS AMENDEMENTS IL FAUT VOTER EN FAVEUR DU TEXTE GÉNÉRAL

La convention Europe n'est pas une opportunité pour exprimer son désaccord avec la direction du PS, même si nous avons tous comme je l'ai entendu hier soir des sujets divers et légitimes de critiques. Le rejet du texte de la convention ne serait qu'une posture malheureusement inutile au moment où il convient plus que jamais de peser efficacement sur les orientations européennes du PS, et au-delà sur celles du PSE, à la recherche d'une boussole politique, qui doit dans quelques mois adopter son Manifeste pour les élections européennes.

Le Parti Socialiste doit donc pouvoir disposer à la fin de cette convention d'un discours offensif et constructif sur la réorientation de la construction européenne, au moment où les politiques conservatrices, centristes ou social-libérales conjuguées tuent l'idée européenne et nourrissent les souverainismes de droite et de gauche et les pires nationalismes.

Les amendements 4-8-10-13 peuvent être utiles car il peuvent rassembler largement ; en effet, ils répondent aux attentes qui s'expriment non seulement chez les militants et sympathisants socialistes, mais au-delà dans toute la gauche, pour un tournant politique tant au niveau européen que national.

europa_logo-copie-1.pngNos propositions trouvent échos au-delà de notre parti, chez nos partenaires politiques, ou encore chez divers collectifs comme Les Économistes atterrés ou Roosevet 2012. Nous sommes également capables de créer des dynamiques de rassemblement à gauche en Europe comme l'a démontré notre appel commun avec des responsables et parlementaires du SPD et de Die Linke (Allemagne), du SPÖ (Autriche) et du SEL (Italie) : « une autre Europe est possible » (signez le ici et faites le signer largement autour de vous).

La gauche du PS français n’est pas isolée en Europe et Maintenant la Gauche se réjouit qu’un nombre croissant de parlementaires et de responsables socialistes ou sociaux-démocrates dans les pays de l’UE, se mobilisent en commun pour infléchir les choix européens.

Notre responsabilité est donc claire : profiter de cette dynamique et l'amplifier pour créer le rapport de force nécessaire à la réorientation de la construction européenne.

Frédéric FARAVEL

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2 mai 2013 4 02 /05 /mai /2013 14:53

pselogo2Les préliminaires de la convention Europe du PS viennent de s'achever mardi 30 avril au soir en eau de boudin. Après s'être vertement fait corriger son texte par le chef du gouvernement qui a orchestré une campagne de dénigrement des socialistes les assimilants à des germanophobes, la direction du PS - Harlem Désir en tête - a interdit toute expression alternative à son orientation amputée.

Le_canard_enchaine_30-04-2013.jpgIl est pourtant plus que nécessaire d'assumer la confrontation politique et idéologique avec les conservateurs et les libéraux européens, menés par la CDU-CSU d'Angela Merkel et les Conservateurs britanniques de David Cameron. Cette option nécessaire est d'ailleurs partagée par le SPD et son Président Sigmar Gabriel, qui comme on le sait est un grand germanophobe...

Las, non seulement le bureau national a voté sur ordre l'interdiction de diffusion du texte "Europe : le sursaut, c'est urgent !" proposé par Maintenant La Gauche et Emmanuel Maurel, d'une part, et Un Monde d'Avance et Guillaume Balas, d'autre part, celui-ci a également interdit à ces derniers de déposer des amendements communs avec Maintenant la Gauche... ce qui aboutit à la situation ubuesque que les mêmes amendements seront soumis deux fois au vote des militants. Cette phase s'achève dans la tristesse et le ridicule.

Le débat sur la nécessité de réorienter la construction européenne, peu à peu asphyxiée par l'austérité généralisée et la montée des égoïsmes nationaux - nourrissant l'un et l'autre les populismes et les fascismes -, méritait pourtant mieux que cela. Maintenant la Gauche s'y était préparé avec conviction et j'ai eu le plaisir d'animer un groupe de travail qui a produit un certain nombre d'analyses sur ce dossier.

Vous trouverez ci-dessous la plupart des mes contribution au débat dans ce cadre. En espérant que la direction du PS et ceux qui pèsent sur elle retrouvent la raison avant la fin de la convention.

Frédéric FARAVEL

Réorienter la construction européenne,
c'est vital et c'est maintenant !

Les résultats des élections italiennes – pas si surprenant que cela – aurait dû être, pour les socialistes et sociaux-démocrates européens, le signal d'alarme définitif (après l'Espagne, le Portugal, la Grèce…) sur l'incohérence politique et économique qu'il y avait à soutenir et à mettre en œuvre des politiques d'austérité.

Ces élections sont venues dire à quel point les Européens rejettent l’austérité que tous les États de l'Union Européenne appliquent avec zèle, et à laquelle l’Europe est désormais identifiée au risque de se détourner même finalement du projet européen.

De tous les pays de l’Union, l’Italie était le plus europhile avec la Belgique. Signataire du traité de Rome, elle était le pays qui avait accepté presque comme une évidence de payer de nouveaux impôts pour pouvoir entrer dans l’euro et au sein duquel les enquêtes d'opinion, tout récemment encore, plébiscitait la rigueur de Mario Monti, érigé à Bruxelles et à Berlin en modèle du nouvel homme politique, par idéalisme européen. Dans l’Italie divisée, incertaine, toujours entre deux crises politiques, l’Europe était le socle commun, le seul vrai consensus national, mais ses électeurs viennent de donner plus de 50% de leurs voix à deux candidats qui avaient axé toute leur campagne sur la dénonciation de l’Europe. Silvio Berlusconi est ressorti de sa tombe politique en cognant systématiquement sur Mme Merkel et les choix qu’elle aurait imposés à l’Italie. Beppe Grillo, comique entré en politique, a assuré le triomphe de son Mouvement 5 étoiles en dénonçant les élites pro-européennes et proposant une sortie de l’euro.

L’Europe a réuni contre elle la seule vraie majorité qui se soit dégagée de ce scrutin, et cela alors même qu’un sondage vient de révéler que le pourcentage de Français voyant dans l’Union européenne une « source d’espoir » était tombé de 61% à 38% en dix ans.

Depuis longtemps évident, le divorce entre les Européens et l’Europe devient une réalité  qu’il faudrait être aveugle pour ne pas voir. L'idée d'une construction européenne porteuse de progrès devient minoritaire en Europe et cette défiance est autrement plus inquiétante pour elle que toutes les questions qui vont se poser sur l’avenir de l'euro. Si la gauche européenne ne sait pas vite faire entendre et comprendre que l’austérité n’est pas européenne mais de droite, que les politiques européennes ne sont pas décidées par l’Europe en tant que telle mais par les partis qui la dominent aujourd’hui, qu'il existe une réelle alternative politique, si elle ne propose pas au plus vite une réorientation profonde et radicale de la construction européenne, c’est l'unité européenne qui sera bientôt en danger.

Le danger serait qu'au nom des compromis européens et des traités déjà signés nous abandonnions tout combat politique face à la droite et toute tentative de réorientation des institutions européennes.

I-  Arrêtez les, ils sont en train de tuer l'Europe !

I.1.  Les occasions manquées et le dévoiement de la construction européenne :

UnionEuropeenneLa stratégie de Lisbonne (1999-2000), le Traité de Nice (2000-2001), la partie III du TCE (sanctuarisation de l'orientation libérale des politiques communes), le traité de Lisbonne (2007) ont engagé une logique de négation des souverainetés populaires dans la manière dont ils ont été élaborés (dans des cénacles restreints) et ratifiés (en faisant fi de la consultation populaire).

1.a-  L'impasse de la stratégies de Lisbonne :

Depuis 2000, les États membres de l'Union européenne se sont dotés d'une stratégie de développement économique, baptisée « Stratégie de Lisbonne » et révisée en 2004-2005, qui donne pour objectif à l'union « devenir l’économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde, capable d’une croissance économique durable accompagnée d’une amélioration quantitative et qualitative de l’emploi et d’une plus grande cohésion sociale » ; la politique de cohésion de l'union s'est donc coulé dans cette stratégie, qui privilégie compétitivité, recherche et innovation. Toutefois, le quatrième rapport d’étape de la Commission laisse apparaître l’importance des disparités qui séparent toujours les États membres et ralentissent la croissance.

Le quatrième rapport de la Commission européenne sur la politique de cohésion (30 mai 2007) conduit à s’interroger sur le caractère proportionné de ces moyens, eu égard à l’insuffisance de la croissance dans l’Union et au maintien de fortes disparités économiques et sociales entre les États membres, plus particulièrement avec les nouveaux adhérents.

les présupposés de la « stratégie de Lisbonne » contradictoires avec les objectifs des politiques de cohésion :

Les conclusions de ce 4ème rapport ne pouvaient corriger la dynamique en court pour deux raisons essentiels. D'abord, comme on l'a vu dans la partie précédente, les perspectives financières 2007-2013 marquent un tassement certain de l'effort financier de l'union en faveur de l'intégration européenne. Mais surtout, la traduction concrète de la « stratégie de Lisbonne » dans l'application de la politique de cohésion en a changé le sens durablement et a détourné l'effort de l'union de la réduction des disparités régionales sur le territoire communautaire.

En effet, en mettant l'accent sur la compétitivité, la « stratégie de Lisbonne » conduit à privilégier au sein même de la politique de cohésion le soutien à des projets élaborés dans des régions ou des États déjà hautement compétitifs ; l'accent est donc mis sur l'innovation et la recherche, les réseaux trans-européens (RTE), l'« adaptabilité des travailleurs » et la flexibilité du marché du travail. Les trois premiers termes sont évidemment nécessaires mais s'ils sont renforcés par une politique de cohésion déjà en repli par ailleurs le résultat de la stratégie de Lisbonne appliquée aux politiques de cohésion ne peut être que le renforcement des dynamiques pré-existantes et l'aggravation des disparités régionales.

les fondements de la stratégie de Lisbonne, illustration de l'idéologie libérale d'une division internationale du travail :

Cette stratégie de politique économique élaborée conjointement par des gouvernements libéraux et des gouvernements socialistes, qui avaient cédé sur leurs valeurs (comme le dit si bien Martine Aubry) illustre parfaitement ce que décrit l'introduction du texte de notre convention nationale : « La croyance en un système vertueux de progression sociale généralisée et de partage du travail harmonieux (les produits à faible valeur ajoutée pour les pays émergents, la frontière technologique pour les pays développés) a été balayée.», car la stratégie de Lisbonne est une tentative d'application concrète de cette croyance sociale-libérale.

La « stratégie de Lisbonne » a, de fait, renforcé une situation antérieure déjà déséquilibrée que l'Union européenne paie aujourd'hui lourdement dans le contexte de la crise économique. La République fédérale allemande fait près de 50 % de son PIB à l'exportation, en grande partie dans l'UE ; de ce fait elle écrase les productions et les exportations des autres États membres, alors que dans le même temps le consommateur allemand consomme peu et a eu tendance à moins consommer encore après les politiques d'adaptabilité et de flexibilité du marché du travail élaborées par les gouvernements Schröder puis Merkel. D'une certaine manière la stratégie de Lisbonne transpose au niveau européen et la logique de la mondialisation et encourage en son sein les pratiques de dumping que l'on reproche à la Chine.

la stratégie de Lisbonne à nouveau révisée :

La stratégie de Lisbonne a été adoptée au Conseil européen de mars 2000 en vue de faire de l’Europe « l’économie de la connaissance la plus compétitive du monde en 2010 ». Centrée sur la compétitivité, ses lacunes en matière de cohésion sociale et d’environnement ont conduit à l’adoption, au Conseil de Göteborg en 2001, d’une stratégie complémentaire, dite de développement durable. Considérant à la fin 2004 qu’elle ne remplissait pas ses objectifs (rapport Kok), la stratégie de Lisbonne a été recentrée en 2005 sur la croissance économique et l’emploi par la Commission Barroso (rapport Cohen-Tanugi).

En 2006, puis à nouveau en 2008, les objectifs ou priorités ont été redéfinis, rendant difficile l’identification sur le long terme des principaux objectifs de la stratégie. D'autre part, bien que le gouvernement français prétende que cette stratégie est aujourd'hui présentée comme un succès, nous avons vu que la Commission elle-même s'interroger sur les résultats contradictoires avec les objectifs affichés que cette stratégie impliquait pour la politique de cohésion de l'union, pilier de la construction européenne qui fait de l'Union autre chose qu'une simple zone de libre-échange.

Cependant la stratégie de Lisbonne révisée pour 2020 est marquée par l'opposition de plusieurs lignes politiques contradictoires, qui conduit au renvoi de son application par les États membres et amoindrit toute coopération européenne renforcée.

1.b-  Une accumulation de traités successifs qui ont éloigné les Européens de la construction européenne :

C'est par la volonté conjointe de François Mitterrand et d'Helmut Kohl que la construction européenne est sortie de l'impasse dans laquelle elle s'était enlisée depuis la fin des années 1970. L'Acte unique fixe pour objectif l’achèvement du marché intérieur (l'effectivité des libertés de circulation accordées en droit depuis 1957 sous le nom de marché commun) à la fin de 1992. La Commission prévoyait en ce sens l'adoption d'environ 300 directives pour démanteler les barrières physiques, politiques et fiscales faisant obstacle à la libre circulation des marchandises, des services, des capitaux et des personnes (les quatre libertés fondamentales). Il introduit une procédure de décision pour l'harmonisation relative à l'établissement du marché intérieur par un vote à la majorité qualifiée du Conseil des ministres, à l'exclusion des questions fiscales et sociales. C'est le dernier traité européen à n'avoir connu aucun « incident » de ratification.

Dès le Traité de Maastricht dont la voie avait été ouverte par l'Acte Unique et qui ouvrait la voie à l'union économique et monétaire et à la citoyenneté européenne, les électeurs danois refuseront la ratification et le traité n'entrera en vigueur qu'après l'adoption de clauses opt-out pour le Danemark et la Grande-Bretagne.

Le Traité de l'Union Européenne sera plusieurs fois révisée par la réunion de conférences inter-gouvernementales (CIG), qui représentaient évidemment les intérêts des différents gouvernements nationaux (et donc en théorie leurs citoyens), mais introduisaient de fait pour les citoyens une distance avec les processus successifs de révisions, d'autant distant que toutes ces révisions s'illustraient par leur complexité technique.

Cette complexité technique, étrangère à la nécessité de transparence qui rend possible l'exercice de la souveraineté populaire, se doublait par ailleurs de choix politiques qui restreignaient chaque fois les champs d'action monétaires puis budgétaires des États-Nations, sans que jamais la légitimité politique ne se retrouve au niveau européen.

Dès le traité d'Amsterdam, les principes de convergences pour accomplir la monnaie unique sont inscrits comme carcan des budgets européens ; le Parti Socialiste s'était d'ailleurs prononcé contre sa ratification en mars 1996, mais déjà le gouvernement de Lionel Jospin s'était plié, dès sa constitution, aux engagements pris peu de mois avant par le gouvernement Juppé.

L'élargissement accéléré au États d'Europe centrale et orientale nécessitait une nouvelle révision pour adapter les institutions européennes ; mais la CIG (1999-2000) qui aboutit au traité de Nice accoucha d'une souris qui fut rejeté en tant que tel par les Irlandais, avant qu'ils ne soient forcés de revoter.

L'impasse démocratique était évidente et la nécessité d'y répondre et de rendre intelligible conduisit à la réunion d'une Convention pour l'avenir de l'Europe (2002-2003). Mais là-encore, ce fut une occasion manquée. Présidée par Valéry Giscard-d'Estaing, elle avait pour net handicap d'avoir été constituée de bric et de broc et de ne représenter les citoyens que de manière très indirecte. Là où une assemblée constituante, réclamée de nombreuses fois par les socialistes, aurait sans doute apporté des résultats, cette convention à la faible légitimité déboucha sur un nouveau texte complexe, auquel son président ajouta sans débat une IIIème partie qui inscrivait dans le long terme l'orientation néo-libérale donnée aux politiques communes. Cet abus fut avalisé par les gouvernements européens.
Tout le processus fut sanctionné par les référendums négatifs en France et au Pays-Bas (2005) ; ce sont majoritairement les électeurs de la gauche française qui s'opposèrent d'ailleurs le plus fortement au TCE le 29 mai 2005. Incapable d'envisager un plan B, les gouvernements conservateurs s'accordèrent sur le traité de Lisbonne copie conforme du TCE en lui faisant éviter au maximum les voies référendaires. Ainsi, le Parlement français ratifia-t-il en 2008 un traité européen que les Français avaient rejeté 3 ans plus tôt.

Il n'est pas étonnant dans ces conditions – quelle que soit l'analyse que l'on porte sur ces deux derniers textes et quels qu'aient pu être les votes des uns et autres le 29 mai 2005 – que les citoyens européens se sentent de plus en plus éloignés de la construction européenne. Les Français mais nombre d'Européens considèrent désormais que l'Europe se bâtit dans leur dos, sur des bases dont ils discutent le bien fondé, avec le sentiment de plus en plus net que quel que soit leur choix politique dans leur pays, la voie actuelle de la construction européenne contrecarrera toute volonté de changement.

Cette prise de distance est très nette à gauche et elle renforce également les impostures politiques portées par les partis populistes xénophobes.

Loin de chercher à dépasser par le haut cette situation, alors que la crise financière qui menaçait de mettre à bas l'union monétaire aurait nécessité une rupture avec les erreurs du passé, Nicolas Sarkozy, Angela Merkel et José Manuel Barroso ont préféré renforcer les modes de fonctionnement inter-gouvernementaux qui avaient déjà échoué en rédigeant et signant le TSCG.

[...]

3.d-  Le cas de Chypre, une Europe qui n'a pas encore tiré enseignement de ses erreurs ?

L'affaire de Chypre est particulièrement grave à nos yeux. Pour la première fois, le soutien de l'Union Européenne est soumis à la taxation des avoirs des déposants chypriotes, sans que soient forcément garantis comme cela a été annoncé pour toute l'UE les dépôts en dessous de 100 000 €. Il y a eu deux poids deux mesures, n'en déplaisent à ceux qui ont argumenté sur le fait qu'il s'agissait de fiscalité nationale, prétextant également après coup que c'était une première étape dans la lutte contre les paradis fiscaux et le blanchiment ; s'il ne s'était agi que de cela nous aurions applaudi tant l'Europe a tergiversé dans ce domaine.

Le coup était trop rude et le coût imposé aux citoyens chypriotes étaient insupportables, ne pouvant qu'encourager en leur sein des opinions europhobes, risquant également de jeter un État membre de l'Union Européenne dans les bras de la Russie de Poutine, visée par le plan et prête à subventionner Chypre plutôt que de voir amoindrir ses intérêts.

Mario Draghi a choisi la force, avec l'accord de l'Eurogroupe, pour obliger le gouvernement, le parlement et le peuple chypriotes à accepter le plan de sauvetage de l'UE et du FMI.

Après avoir «pris acte» du rejet du plan d'aide par Nicosie, la BCE a sorti son arme de dissuasion massive: le blocus monétaire. Une arme encore jamais utilisée dans la crise de l'euro. L'institution monétaire a prévenu qu'elle n'alimenterait plus les banques chypriotes en liquidités tant que le plan de sauvetage UE-FMI ne serait pas accepté.

C'est la première fois que la BCE brandit ouvertement cette arme de l'asphyxie financière pour faire accepter un plan de sauvetage européen. Face à un tel déploiement de force, le ministre des Finances chypriote et le gouverneur de la banque centrale de l'île n'ont pas d'autre choix que de laisser les banques fermées jusqu'à nouvel ordre… car S'ils ouvraient les banques maintenant, alors que la BCE bloque l'accès aux liquidités, les gens se rueraient sur les guichets. Mais faute de billets suffisants, ils risquent de ne pouvoir retirer leurs avoirs.

Le plan B chypriote est une grande illusion : il est fondé sur l'illusion d'obtenir un nouveau prêt gagé que les actifs existants de l'île (entreprises publics, biens de l'église...) et sur les actifs futurs incertains (ressources gazières). Tout cela pour 6 milliards d'euros (1/3 du PIB). Or, la dette publique de Chypre est déjà à un niveau équivalent à son PIB (17 milliards d'euros). A cela se rajoute les 10 milliards de prêt de l'UE. Chypre aurait donc un endettement de 200 % de son PIB. Un tel niveau d'endettement implique que tous les actifs de l'île sont déjà mis en gage. Il n'y a donc pas de ressources nouvelles à exploiter. Quant au gaz, encore faudrait-il que son exploitation génère une véritable nouvelle ressource publique, ce qui n'est pas garanti, à moins d'un taux de taxation qui risquerait de rendre l'exploitation gazière non rentable.

Au total, le plan B du gouvernement chypriote revient à faire payer la faillite de son secteur bancaire par les contribuables au lieu de faire payer les créanciers. Ceci afin de sauver un modèle économique insoutenable fondé sur une hypertrophie de son secteur financier. Il paraît clair que si ce plan était adopté par le Parlement, Chypre serait amené à sortir de la zone euro et à procéder à une dévaluation... ce qui entraînerait immédiatement une perte pour les épargnants supérieure à celle qui était envisagée par le plan A négocié avec l'UE. En voulant éviter la peste, Chypre risque de choisir le choléra.

Le plan finalement adopté par le Parlement chypriote sous pression de la Commission peut être considéré comme un plan C. Il consiste à préserver les épargnants qui possèdent un compte de moins de 100 000 euros et à faire porter sur les gros épargnants (souvent étrangers) une partie du sauvetage du système bancaire chypriote pour un montant de 6 à 7 milliards d'euros. Cependant, il ne faut pas oublier que l'essentiel de l'effort sera fait par les contribuables, les salariés du privé et des fonctionnaires, puisque la majorité du plan de sauvetage (10 milliards d'euros) sera financé par la dette publique.

In fine, la séquence chypriote est un désastre. Même si le système bancaire de ce petit pays tient debout, on n’a pas fini de mesurer les effets secondaires: l’Union européenne noyée dans l'improvisation, la montée d'un ressentiment anti-allemand en Europe, Berlin qui s’énerve de payer pour les petits, et puis le fossé béant entre les peuples et les gouvernants…

Mais l'affaire chypriote, c'est aussi un festival de mauvaise foi. A Bruxelles d’abord. On nous a parlé de « plan d'urgence » pour une « économie casino », comme Pierre Moscovici le 24 mars. Mais on connaît depuis longtemps les travers de Chypre, ses banques gonflées à l’hélium ! La vérité, c'est que ce pays n'aurait jamais dû entrer dans l'Union européenne. Seulement, faute d'une vraie intégration bancaire et fiscale, on a fermé les yeux sur ce paradis toxique. Et la situation s’est encore aggravée à cause de la crise grecque voisine.

C’est à cause de cette tolérance passée que le gouvernement chypriote a aussi été de mauvaise foi. Il a foncé à Moscou pour réclamer des fonds. Comme si personne n'avait prévenu Nicosie : l'Union européenne, ce n'est pas à la carte. On est dedans ou dehors.

Et puis, il y a la Russie.

Dernière mauvaise foi olympique ! Ses dirigeants sont en colère car on ne leur avait pas annoncé la taxe sur les dépôts. Mais encore heureux ! Sinon, les 20 milliards de dollars russes déposés à Chypre se seraient envolés vers un autre refuge, et il y en a plein ! Et puis, on n'a pas toujours connu Vladimir Poutine aussi passionné par la défense de la propriété privée. Par exemple, lorsque le groupe pétrolier Ioukos a été dépecé et son patron, Mikhaïl Khodorkovski, emprisonné.

Les intentions de Bruxelles étaient correctes : assainir le système bancaire chypriote, éviter une contamination à d’autres pays, et faire contribuer les gros épargnants était nécessaire. Mais la méthode est indéfendable. C’est une contre-publicité terrifiante pour l'UE, alors que les observateurs vantaient une sortie de la tempête financière. Dans sa formule initiale, le plan de l’UE visait l'épargne des petits épargnants, et pas seulement les grandes fortunes étrangères.

Peu importe au fond si l’idée venait de Bruxelles ou de Nicosie. Elle aurait dû être écartée tout de suite. L'UE a ébréché d'un seul mouvement deux de ses piliers : la confiance et le droit de propriété. La confiance vient du fait que nos sociétés européennes sont bâties sur l'État de droit, et non sur l’arbitraire. Ça veut dire les mêmes droits pour tous. Or on porte un coup à cette confiance en violant le droit de propriété, une sécurité fondamentale qui nous différencie, par exemple, de la Russie. C'est une atteinte à notre culture juridique. Le dimanche 24 mars, Pierre Moscovici parlait de mauvaise communication. C’est malheureusement bien plus grave que ça. L’Europe a trahi sa parole et affecté sa crédibilité.

I.4.  La construction européenne est en train de perdre la « bataille culturelle » :

Plus que jamais les peuples et les citoyens considèrent que la construction européenne se fait au mieux sans les consulter, mais de plus en plus fréquemment emprunte des voies auxquelles ils sont opposés ou qu'ils considèrent comme contraire à leurs intérêts (c'est d'ailleurs souvent le cas).

Conjugué à la durée et la dureté des crises financières, économiques et sociales, auxquelles font face presque tous les pays de l'Union, les solutions proposées par les gouvernements, la Commission et la BCE aggravant par ailleurs le mal, les réflexes populistes, mais plus souvent encore nationalistes et xénophobes prennent le dessus.
À moyen terme, c'est l'idée même de construction européenne qui va être mise en cause par les Européens eux-mêmes, avec le risque évident que « le bébé soit jeté avec l'eau du bain » et que le continent entre dans une période de tensions politiques, économiques et sociales jamais connue depuis les années 1930.

II-  Pour sortir de l'impasse, osons une stratégie de rupture !

II.1.  La crise de la sociale-démocratie européenne :

PSElogoLa sociale-démocratie européenne est en crise. Les partis socialistes, sociaux-démocrates ou travaillistes dans l'Union Européenne étaient majoritaires dans les gouvernements européens à la fin des années 1990 ; ils sont aujourd'hui une poignée et les possibilités de voir les gouvernements français, belge (coalition baroque) et danois être rejoints dans un proche avenir sont faibles.

1.a-  Un modèle théorique épuisé :

Mais cette bérézina électorale a été précédée de l'épuisement d'un modèle et d'une pensée. On a toujours opposé la tradition du socialisme républicain français au modèle social-démocrate européen nordique, supposé plus efficace. Pourtant, il comporte en son sein les éléments de rebond efficaces pour sortir de la crise actuelle, concomitante de l'épuisement de ce fameux modèle. Le discours qui a voulu imposer l'idée que le socialisme français – appuyé sur le rôle de l’État, des services publics et de l'intervention plus ou moins directe de la puissance publique dans l'économie – était caduque ou archaïque correspond également à cette période d’affaiblissement majeur du mouvement socialiste et social-démocrate en Europe.

Cette crise est lourde et durable car structurelle.

Le projet social-démocrate nordique est né dans l'immédiat après-guerre, anticipé de peu par les sociaux-démocrates suédois. Il a été triomphant à la fin des années 1960 et dans les années 1970, en Allemagne et en Europe du Nord, avec des formes différentes adaptées à chaque États-Nations. Or ce n'était pas un modèle idéologique autonome, mais un entre-deux, un juste milieu, la réponse que ces pays d'Europe occidentale avaient trouvé entre le modèle capitaliste américain et le modèle totalitaire soviétique. Dans les débats qui ont pu opposer socialistes français et sociaux-démocrates nordiques, ils ne revendiquaient d'ailleurs pas l'idéologie : nous étions les idéologiques et eux les « pragmatiques », ceux qui défendaient le juste équilibre, l'idée française d'une autonomie politique vis-à-vis des États-Unis apparaissant par ailleurs comme une aberration.

Le congrès de Bad Godesberg a cependant esquissé la théorisation de ce pragmatisme : il s'agissait de construire un compromis entre le monde du travail et celui du capital, détenteur du pouvoir dans l'entreprise, de privilégier la négociation sociale (contrat) à l'intervention directe du politique (loi) dans le champ économique et social. L’État était donc réduit à un rôle de régulateur, prélevant et redistribuant (et la force du modèle nordique est évidemment l'ampleur de cette redistribution sociale organisée), plutôt qu'un État acteur et organisateur de l'économie. La régulation du marché était par ailleurs légère. Cette économie sociale de marché, ce compromis bâti avec la démocratie chrétienne n'était pas une alternative au modèle dominant mais une évolution plus sociale du modèle dominant et inégalitaire.

Ce modèle ne peut plus fonctionner. Il s'était construit et fonctionnait dans un équilibre, à la suite d'un rapport de force au sein de l'État-Nation, lorsque les résultats électoraux en leur sein participaient également des variations du rapport de force capital-travail. Cadre dans lequel le « rapport de classes », le rapport de force dans l'entreprise était organisable sans que l'on ait besoin d'être détenteur du capital.

Le socialisme jauressien découle lui du fait républicain qui est un fait politique avant d'être un fait social, qui pose l'égalité des citoyens comme principe du contrat politique et social. Le grand apport du socialisme, qui n'est pas opposable mais complémentaire de la sociale-démocratie nordique, était d'expliquer que ce concept d'égalité civique n'était pas limité au politique mais devait s'étendre au social : ainsi le socialisme républicain est rédhibitoire avec tout ce qui organise l'exploitation ou justifie les inégalités. L’État / la puissance publique doit être l'incarnation de l'intérêt général : doit être car il ne l'est pas spontanément et cela dépend du rapport de force politique et social. L'intervention économique de la puissance publique ne saurait être le seul levier mais saurait être disqualifiée en soi : c'est notre conception des services publics et de l'économie mixte, qui n'est pas l'économie sociale de marché… dans ce cadre, le capital est parfois public, parfois socialisé, coopératif ou mutualiste, parfois privé.

La crise du capitalisme mondialisé, qui découle de la vision libérale de la mondialisation, doit nous inciter à revenir sur la question de l'économie mixte, de la capacité et de la pertinence à nous réinvestir sur le capital et la nature de la propriété de certains moyens de production, pour reconstruire un rapport de force nouveau, alors que la sociale-démocratie n'est plus en mesure de répondre avec ses modèles historiques.

La grande force de la sociale-démocratie – notre grande faiblesse – a été d'incarner le rapport de force social : c’était le parti des syndicats, parfois issu des syndicats (le Labour Party) et du monde du travail unifié dans de grandes organisations syndicales, corollaires des grandes organisations de production, des grandes structures industrielles – dont nous n'avons jamais vraiment eu d'équivalent en France. Or l'émiettement du monde du travail percute de plein fouet la sociale-démocratie dans son rapport à celui-ci. Elle n'est plus en mesure de le représenter et il ne se reconnaît plus dans nos partis nationaux.

C'est aussi la conséquence de choix politiques concrets plus encore que de questions idéologiques. Quand les sociaux-démocrates assuraient ce «juste milieu» entre la peur du communisme soviétisé et la pression «amicale» du capitalisme américain, l'équilibre pouvait fonctionner. Mais la Chute du Mur et la disparition de la menace militaire soviétique a fait enfourcher à toute la sociale-démocratie européenne, en partie par tropisme atlantiste, l'idéologie néo-libérale, que nous avons rebaptisé pudiquement social-libéralisme. La transformation des anciens partis communistes d'Europe de l'Est a été encore plus radicale, n'ayant aucune autre référence historique qu'un modèle discrédité, qui n'a jamais été du socialisme. L'effet sur des sociétés blessées n'en a été que plus grave encore.

tony-blair-2-sized.jpgLes plus âpres défenseurs de l'entrée de la capitalisation dans les systèmes de retraite par répartition étaient dans nos rangs. Blair, après avoir rompu avec les Trade Unions pour séduire une partie des classes moyennes supérieures thatchériennes, a théorisé tous les renoncements, sur fond de caricature collectiviste du socialisme français, promouvant l'individu qui n'avait pas pourtant jamais été absent de la réflexion socialiste.

Il nous faut aujourd'hui porter des ruptures pratiques avec les 20 ans de social-libéralisme ; les méthodes peuvent être rénovées (primaires) mais cela ne suffit pas pour remobiliser les catégories populaires et moyennes dans un projet positif de conquêtes.

Une étude du milieu des années 2000 de la Friedrich-Ebert Stiftung, qui n'est pourtant pas connu pour son côté populiste et révolutionnaire, décrivait le caractère « arrivé » des responsables SPD. Issus de trois générations militantes, ils auraient oublié leurs racines ouvrières, bardés de diplômes, que n'avaient pas forcément leurs prédécesseurs, ils y sont décrits comme ne considérant plus indispensable toute une série de solidarités collectives ; La société des socialistes (2006, Sawicki-Lefebvre) décrit également les travers comparables un appareil sclérosé et peuplé de cadres politiques qui n'ont plus forcément d'expérience sensible de la réalité et des difficultés vécues par nos concitoyens des classes populaires et moyennes que nous sommes censés défendre et représenter. Le discours entendu sur la valorisation de l'individu dans ce cadre est biaisé car on n'oublie qu'elle est possible uniquement possible dans un cadre où les solidarités collectives et les droits fondamentaux sont forts et garantis.

Illustrons notre propos par deux exemples essentiels au cœur des débats de la sociale-démocratie européenne.

1) la sécurité sociale professionnelle :

Tout le monde vante les mérites du système danois, ce qui n'a pas empêché nos camarades sociaux-démocrates d'essuyer de nombreuses défaites dans les années 2000 et de n'aboutir qu'à une victoire étriquée en 2011. Il faut prendre en compte ce que rapportent les syndicalistes danois : l'alternative entre indemnisation et travail attaque l'identité profonde du travailleur danois, qui votait social-démocrate, car il se conçoit d'abord comme un travailleur là où un Français se conçoit prioritairement comme un citoyen). Lorsqu'il est indemnisé, il perd son identité sociale, d'acteur de l'entreprise et du progrès collectif, capable de négocier sa force de travail, pour n'être plus qu'une fonction dont on use uniquement lorsqu'on en a besoin. Son existence sociale n'est plus reconnue en tant que telle.

Nous ne pouvons plus continuer dans l'idée que l'indemnité et la survie physique est suffisante pour compenser l'identité et le rôle social des travailleurs et de tous ceux qui aspirent à l'être. D'une certaine manière, nous avons été confrontés à un phénomène comparable avec le RMI puis le RSA. La solidarité et l'assistance sociale sont nécessaires mais il est indispensable de construction une société et des rapports de production qui assurent le travail et l'emploi. Sarkozy a su parfaitement surfer lors de la campagne électorale de 2007 sur notre incapacité d'alors à produire de la reconnaissance sociale de la place de l'individu dans le monde de la production, comme dans celui de la citoyenneté.

220px-Gerhard_Schroder_-cropped-.jpg2) la construction européenne :

Le drame de la construction européenne est que rien n'a remplacé les États-Nations comme cadre du compromis social, ou de l'intervention de la puissance publique dans l'économie. L'espace politique européen est totalement insuffisant face au grand marché et alors que l'on nous demande toujours d'attendre une Europe sociale qui ne vient pas. Cette Europe sociale ne peut émerger spontanément car les formes de la régulation sociale sont devenues antinomiques avec les solutions prônées par les troisièmes voies libérales et sociales-libérales : retraites par répartition, assurance maladie solidaire, droit du travail forcément protecteur des salariés pour contraindre le patronat… Depuis les mesures Schröder, l'essentiel des cadres syndicaux ont quitté le SPD ; il n'y a plus un seul délégué syndical dans le groupe parlementaire SPD ; ces derniers ont d'ailleurs quasiment disparu de l'appareil politique.

Schröder et  ont théorisé la baisse des indemnités chômage pour « lutter contre l'assistanat ». Depuis que la gauche a inventé ce type de critiques contre elle-même, les droites européennes ne font que les répéter et les décliner.

Si les partis sociaux-démocrates d'Europe centrale se sont par ailleurs tous effondrés c'est qu'ils ont été les plus actifs et les plus radicaux pour mettre en œuvre cette troisième sociale-libérale, dans des pays où ils représentaient finalement une certaine modération après les « thérapies de choc » du début des années 1990. Sauf qu'ils ont été les plus frappés dès que les premiers bugs de la mondialisation financière sont intervenus et que l'alternative n'était plus composée que de partis conservateurs, parfois nationalistes et crypto-fascisant comme en Hongrie.

Il y a donc urgence à reconstruire un projet commun qui tranche avec ce modèle social-démocrate épuisé et dévoyé en social-libéralisme. Ne donnons pas de leçons, mais revendiquons fièrement notre modèle républicain pour créer avec nos camarades une nouvelle synthèse dynamique qui permettra de sortir de la crise.

1.b-  Une stratégie politique dans l'impasse :

La construction européenne s'est historiquement construite sur un compromis entre une démocratie chrétienne qui avait accepté la nécessité du compromis social, pour éviter les conflits intérieurs qui furent source des fascismes, et une sociale-démocratie qui se concevait comme le « juste milieu » entre les modèle soviétique et américain. La reconstruction européenne s'est déroulée dans ce cadre, avec l'idée qu'il fallait réconcilier des peuples qui s'étaient violemment affrontés à plusieurs reprises, en créant au sein d'une de ses nations les plus avancées et les plus cultivées les ferment de la barbarie nazie et d'une déshumanisation totale.

La paix et le développement était le ciment de la construction européenne ; le compromis et la coalition entre sociaux-démocrates et démocrates chrétiens en étaient le moteur politique. Ce compromis s'illustrait par l'alternance des présidences du parlement européen. Cette alternance s'est maintenue, alors qu'elle est politiquement anachronique et contre-productive.

Or, après près de 70 années de paix à l'ouest, 24 ans après la chute du Mur et malgré les guerres yougoslaves, tout ne peut pas être sacrifié sur l'autel de la «Paix européenne» ; c'est une réalité vécue par des millions de citoyens qui sont nés avec et qui ne peut pas maquiller les sacrifices économiques et sociaux qu'on leur impose aujourd'hui. C'est bien là toute l'ambigüité du prix Nobel qui a été accordée à l'Union Européenne.

Les droites européennes se sont transformées sous l'effet de la mondialisation libérale et de la révolution reagano-thatchérienne, en parallèle avec l'épuisement du modèle social-démocrate nordique. Les chantres du social-libéralisme ont pêché par naïveté, leur ligne politique les incitait à s'entendre avec ceux dont ils partageaient le discours économique néo-libéral. Les conservateurs et les néo-conservateurs ont poussé leur avantage au maximum.

Le PPE ce n'est plus les « gentils » démocrates-chrétiens des années 50-70 avec qui la sociale-démocratie avait conclu un compromis pour permettre la construction européenne. Le PPE, s'il n'est pas plus uni que le PSE, c'est aujourd’hui un rassemblement de conservateurs qui impose ses conditions et parfois couve en son sein des acteurs particulièrement réactionnaires et nationalistes.

Gauchir artificiellement les discours pré-électoraux n'est pas en soi une solution, on le voit bien avec le décrochage dans les intentions de vote de Peer Steinbrück, candidat SPD à la chancellerie. Les électeurs allemands ne peuvent avoir confiance en un candidat qui n'est pas en phase avec le programme de son parti et qui n'est pas clair non plus sur la stratégie d'alliance qu'il adoptera.

Si la gauche européenne veut être en mesure de proposer une alternative sérieuse aux libéraux et aux conservateurs, elle doit analyser sincèrement les raisons de son échec et résoudre la question de sa ligne politique et de sa stratégie d'alliance. Affirmons donc clairement qu'il n'est plus possible de cogérer le Parlement européen avec le PPE, qu'il n'est plus possible de s'entendre avec les gouvernements conservateurs pour avaliser une Commission européenne mi-chèvre, mi-chou où notre naïveté et parfois notre abdication politique servent de caution à un agenda économiquement néo-libéral et socialement conservateur si ce n'est réactionnaire.

Nos alliés naturels sont ceux de la gauche européenne et des écologistes, c'est avec eux qu'il faut tenter de construire une majorité au parlement européen et de porter un candidat à la Présidence de la commission, qui sera capable de présenter une équipe de Commissaires politiquement cohérente.

II.2.  On ne peut plus dire : « Et maintenant, l'Europe sociale ! » :

Le PS ne peut pas raconter une nouvelle fois aux Français que l'Europe sociale sera la prochaine étape et qu'il faudra encore une fois être patient, que les efforts consentis une fois encore vers plus de rigueur économique, de libéralisation des marchés, de pertes de souveraineté populaire nationale non compensées au niveau européen, seront récompensés par une nouvelle étape plus juste (Les Français ne sont plus des serfs médiévaux crédules).

Le socialistes qu'ils soient au gouvernement ou qu'ils exercent des responsabilités partisanes doivent cesser de porter le complexe du minoritaire :

  • quand on est au gouvernement avec nos interlocuteurs intergouvernementaux : le « discours de Strasbourg » n'était qu'un prélude à l'acceptation du mauvais compromis budgétaire du sommet de Bruxelles ;
  • quand on est avec nos camarades du PSE, la délégation du PS français considérant que nous serons de toute façon minoritaires et préfère adopter ce qu'elle croit être la posture du compromis pour reculer à nouveau. Nous avions quelque peu rompu avec cette mauvaise pratique sous la direction de Martine Aubry, ce qui avait conduit à une évolution certaine des positions du PSE sous la présidence de Poul Nyrup Rassmussen. Il n'est pas possible de reprendre une attitude effacée, alors que les enjeux n'ont jamais été aussi fort.

Hollande conference presse 13-11-2012On peut avoir plusieurs lectures du discours que François Hollande a prononcé mardi 5 février pour la première fois devant le Parlement européen de Strasbourg, deux jours avant le sommet de Bruxelles où l'adoption du budget de l'UE pour la période 2014-2020 a conduit à un budget de récession.

D'aucuns y verront la poursuite de la stratégie des petits pas qu'il aurait commencé à mettre en œuvre depuis son élection le 6 mai dernier pour la réorientation de l'Europe et qui a abouti au Pacte de Croissance, complément qui aurait à lui seul justifier que la France ratifie le traité Merkozy et qu'on force les députés socialistes à voter un texte qu'ils avaient combattu pendant la campagne des élections législatives... au demeurant, on peine toujours à identifier la concrétisation du pacte en question...

A l'appui de cette thèse, plusieurs passages de son allocution, qui expliquent que la généralisation et la stratification des politiques d'austérité vont mettre à mal la construction européenne en en éloignant les citoyens :

  • "L'intérêt national est en train de prendre le pas sur l'intérêt européen. (...) S'il est vrai que la crise de la zone euro est désormais largement derrière nous, nous sommes loin d'en avoir tiré toutes les conséquences. Ce qui nous menace n'est plus la défiance des marchés mais c'est celle des peuples."
  • "Faire des économies oui, affaiblir l'économie non !"
  • "L'Europe laisse sa monnaie, l'euro, vulnérable à des évolutions irrationnelles dans un sens ou dans un autre (...) Une zone monétaire doit avoir une politique de change sinon elle se voit imposer une parité qui ne correspond pas à l'état réel de son économie".
  • "Pour l'avenir, de véritables ressources propres seront indispensables, sinon c'est la construction européenne qui se trouvera remise en cause."

Certains voient également dans son intervention la démonstration que la France rentrera avec détermination dans le débat de l'intégration politique et l'efficacité européenne :

  • "Depuis trop longtemps, l'Europe doute d'elle-même, hésite sur ces choix. Elle met trop de temps à prendre des décisions majeures", il serait donc temps d'ouvrir un "grand chantier de la réforme de la politique économique et monétaire dans l'UE".
  • "L'Europe met trop de temps à prendre les décisions majeures, et trop peu à réfléchir à ses orientations et à son architecture d'ensemble", la solution serait donc dans les coopérations renforcées transcendées par le concept d'"une Europe différenciée qui ne serait pas une Europe à deux vitesses, ni une Europe à la carte."

Pourtant, sur ce dernier sujet, si la "défiance des peuples" est enfin clairement dite par un chef d’État devant le Parlement européen, on peine à identifier précisément qu'elle est la pensée institutionnelle du Président de la République et où est réinsérer le nécessaire rétablissement de la souveraineté populaire dans la construction européenne.

Mais surtout, François Hollande étaye de peu de choses concrètes son intervention et donc le cœur de son propos ne peut qu'être renvoyé à l'urgence du moment qui est la négociation des perspectives financières 2014-2020 et du budget européen. Or, si on lit bien son discours, le Président retombe dans la naïveté ou la pusillanimité qui a trop souvent affecté les socialistes français lorsqu'ils doivent se confronter à des gouvernements européens libéraux-conservateurs ou à leurs propres camarades socialistes européens : un complexe du minoritaire tellement intégré, qu'ils vont à la négociation en proposant ce qui leur paraît être déjà un compromis, et donc contraints tôt ou tard de reculer sur le compromis.

Ainsi, alors que le budget européen - qui implique une partie de la réussite de la construction européenne (politique de cohésion, investissements d'avenir, politique agricole...) et s'incarne dans des programmes "populaires" comme Erasmus - est sous pression des suédois, des allemands, des néerlandais et des britanniques, qui exigent des coupes radicale, le Président Hollande accepte de fait le terrain de ces adversaires.

Que vaut la revendication "de véritables ressources propres" à l'avenir pour le budget communautaire face à un "Faire des économies oui" ? Comment ne pas comprendre que cette affirmation "Un compromis sur le budget européen est possible mais il faudra raisonner les pays européens qui veulent aller au-delà de ce qui est raisonnable dans les coupes." implique qu'il a accepté des coupes budgétaires, dont il ne s'agit plus que de discuter du caractère raisonnable.

Non, au milieu de la crise économique, alors que la cohésion européenne est en cause, le budget européen devrait augmenter pour ne pas aggraver les logiques d'austérité partout à l’œuvre à l'échelle nationale. Il n'est pas cohérent, il n'est pas politiquement efficace car illisible, de dénoncer l'austérité d'une main, pour s'y résoudre de l'autre dans la négociation budgétaire...

III-  L'Europe que nous voulons et qui ne peut plus être reportée à des lendemains qui chantent

III.1.  Créer les conditions pour sortir de la crise :

1.a-  Un budget européen pour la croissance :

L'Union ne passera pas de cap nouveau à budget européen constant. Elle doit se donner les moyens de ses ambitions. Le budget européen doit devenir fédéral, pouvoir recourir à l'emprunt, et ses recettes ne peuvent pas continuer à être constituées des seules contributions des États.

Sans refondation complète de l'instrument budgétaire, sans reconquête politique et démocratique de cet instrument, il n'existe pas de perspective d'une «Europe non libérale».

Le budget de l'UE (2011) représente 1,01% du PIB de l'Union européenne (inférieur aux prévisions du cadre financier 2007-2013). C'est inférieur au budgets européens des années 2000-2006 alors que l'UE a dû faire face à un élargissement bien plus important que les précédents en 2004 puis 2007.

La France et d'autres États n'ont cessé de le conduire dans une logique de réduction en renationalisant l'essentiel des politiques économiques (jusqu'à la crise des dettes souveraines et de l'euro) et des grandes politiques communes. Cette orientation absurde met en cause notre avenir ; le budget actuel est trop réduit pour prétendre financer l'élargissement.

Bien au contraire, nous nous prononçons pour une augmentation de ce budget européen.

L'élément central d'une telle reconquête doit être la création d'un impôt européen, voté par le Parlement Européen, pour que se substitue à la logique des transferts entre pays celle des transferts entre contribuables (entreprises et citoyens).

Le maintien de politiques fiscales nationales au sein de la zone euro est une spécificité économique : il n'existe aucun autre exemple de zone monétaire sans règle commune. De ce fait, les États de l'UE s'inscrivent dans une logique de défiscalisation compétitive. Les Socialistes doivent initier un projet européen fiscal, fondé sur la détermination de règles d'harmonisation et sur le transfert des impôts nationaux vers des impôts européens, au service d'un budget européen.

L'UE doit recourir à l'emprunt pour financer ses grands investissements, l'élargissement, et lutter contre les inégalités territoriales et sociales. L'emprunt, comme instrument majeur du développement et de la croissance en Europe, s'impose comme la contrepartie logique à la mise en œuvre de l'harmonisation fiscale et sociale.

L'UE doit d'autant plus s'engager sur cette voie que l'endettement de nombre des États a considérablement limité leur capacité d'intervention pour qu'ils puissent sauver le système bancaire entre 2008 et 2010 et faire face aux conséquences économiques et sociales de la crise.

1.b-  Assumer clairement et institutionnellement le changement de priorités et d'orientations de la BCE :

L'Europe doit constituer le cadre des socialistes pour promouvoir la lutte contre le règne du marché et du libéralisme économique. De ce point de vue, le statut de la BCE est pour nous une aberration. En guise d'indépendance, la BCE fait aujourd'hui allégeance aux dogmes libéraux. A travers ses objectifs et son statut, elle est l'outil du marché et non l'outil du politique. La réforme de la politique monétaire européenne et des statuts de la BCE doivent devenir un objectif majeur des socialistes européens. La croissance et l'emploi doivent être les objectifs prioritaires de la politique monétaire dans le respect de la recherche d'une inflation limitée. Il doit être mis fin à des modalités d'indépendance de la BCE, sans aucun équivalent dans le monde. Les socialistes doivent promouvoir l'idée d'une BCE responsable devant les institutions communautaires.

La BCE doit se comporter comme une banque centrale et ne pas s'interdire d'agir comme ses homologues américaines et chinoises pour faire de la monnaie un outil économique : la BCE rachèterait-elle également des titres publics, comme l’a fait récemment la Banque centrale américaine ? Il s’agit sans doute du moyen le plus efficace pour détendre sérieusement les tensions sur les taux sur le marché des emprunts d'État.

1.c-  des politiques communes au service du développement et de la solidarité européenne (politique de cohésion, PAC) :

Restaurer l'efficacité de la politique de cohésion

Les élargissements ont été mal accompagnés par un affaiblissement de la politique de la cohésion. Or cette politique était un outil fondateur de la construction européenne qui permet de réduire les disparités sociales et territoriales de l'Union. Sans cet effort fondamental le fonctionnement du marché européen ne peut qu'aggraver les inégalités, mettre en concurrence territoires et travailleurs et in fine nourrir la défiance des populations à l'encontre du projet européen.

L'échec annoncé de la stratégie de Lisbonne appliquée à la politique de cohésion impose donc une refondation majeure de ce pilier des politiques de l'Union.

La politique de cohésion doit retrouver son orientation originelle, en conformité avec les principes établis dans les traités européens. L'objectif est bien de « réduire l'écart entre les niveaux de développement des diverses régions et le retard des régions les moins favorisées ». La contradiction avec la stratégie de Lisbonne est évidente puisque celle-ci parie sur le seul renforcement de la compétitivité. Les fonds de la politique de cohésion ne sauraient être mise au service d'une telle stratégie, mais doivent s'orienter clairement dans une mission de rattrapage économique. Les régions compétitives peuvent renforcer leurs atouts sans l'intervention de la politique de cohésion qui doit au contraire nourrir un développement endogène durable, qui profiterait en retour à l'ensemble des populations et des territoires de l'Union.

Une politique de cohésion refondée doit pouvoir s’appuyer sur de nouvelles perspectives financières plus ambitieuses (les crédits étaient à la baisse de 2007 à 2013), une coordination des politiques économiques, un renforcement de l’administration européenne et un renforcement des pouvoirs d’initiative et de contrôle du Parlement européen.

Pour une réforme progressiste de la PAC

Aucune politique agricole depuis que l’Europe existe n’a inversé la tendance à la diminution des emplois. Est-ce à dire pour autant que nous nous résignons à la disparition d’un pan entier de notre civilisation ? Ce choix, subi ou voulu, va-t-il permettre à d’autres pays dans le monde de se positionner utilement dans le commerce international ? Quelle est notre stratégie pour l’autosuffisance alimentaire des pays en développement ? Que devient notre sécurité alimentaire ?

L’agriculture européenne est confrontée à une grave alternative : poursuivre son industrialisation, faire de la production un « minerai » exploité à bas prix ; ou bien s’intégrer dans un projet de société au service des personnes et des territoires. Le temps joue en faveur du 1er scénario.

L’Europe tourne le dos à son agriculture. Les prix à la production sont en chute libre et la compensation publique n’est que partielle.

Le revenu d’un agriculteur sur deux n’atteint pas le niveau du SMIC. Les marges de manœuvre pour de nouveaux investissements sont nulles. Le double effet de la concentration des élevages et de la concurrence déloyale ne met pas la production à l’abri des délocalisations.

La PAC a été progressivement détricotée depuis les années 1980 ; en 2013, sa réforme sera l’un des dossiers européens les plus urgents. Les socialistes européens doivent travailler à des propositions politiques fortes :

  • À budget constant, l'UE ne peut faire une réforme positive de la PAC. Le poids de la PAC dans le budget communautaire (45%) est un héritage à dépasse
r, sans le faire au détriment des politiques communes qui participent de la réduction des inégalités et de la qualité du mode de vie des Européens. Le budget global de l'UE doit augmenter, en baissant proportionnellement la part de la PAC en son sein ;
  • S'appuyer sur le principe de la souveraineté alimentaire, impliquant une régulation concertée des échanges internationaux, sous l’autorité des Nations Unies. La stabilisation des cours mondiaux et la garantie de prix intérieurs stables reflétant les coûts réels de production devraient impliquer un renforcement des conditions sociales et environnementales de production, une maîtrise des volumes et une redistribution des aides entre agriculteurs ;
  • Exiger l’abandon des accords de libre-échange au profit d’accords préférentiels renforcés, l’augmentation de l’aide publique au développement agricole et l’abandon de toute production d’agro-carburants entrant en concurrence avec les productions vivrières ;
  • Mettre l'accent comme le propose le rapport de l'Évaluation internationale des sciences et technologies agricoles au service du développement (EISTAD) sur le développement de l’agro-écologie, des circuits courts entre producteurs et consommateurs, et sur la valorisation des connaissances paysannes et locales.
  • 1.d-  une stratégie pour la défense et l'innovation de l'industrie européenne :

    L'Union doit également investir puissamment dans les secteurs d'avenir, en particulier dans les activités à haute valeur ajoutée de la nouvelle économie de la connaissance et développer une politique industrielle. Elle doit définir et adopter, en lien avec les partenaires sociaux, des lignes directrices pluriannuelles en matière de politique industrielle. Celles-ci devraient comprendre des propositions d'action par secteur (création de synergies, de pôles de développement, spécialisation particulières..) Le programme Airbus et le lanceur Ariane ont fait de l'Union Européenne une des grandes puissances de l'aérospatiale. Nous pouvons espérer rééditer la performance avec le programme Galileo. Par ailleurs, une véritable politique industrielle doit également assurer une bonne gestion des secteurs plus traditionnels afin d'anticiper les restructurations et mettre en place à temps des programmes de reconversion des bassins industriels, en associant tous les acteurs concernés.

    Donner un rôle économique et social à l'Europe lui permettra de faire un bond de géant en direction de la création d'une entité fédérale et permettra de relancer le moteur de la construction européenne.

    1.e-  poser les bases du «juste échange», arrêter d'être les dindons de la farce de la «mondialisation libérale» :

    [...]

    III.2.  Remettre les citoyens au cœur de la construction européenne :

    • Une intégration politique plus importante doit nécessairement être précédée d'un travail sur les valeurs communes et l'intérêt général entre Européens, ce qui ne peut se faire sous la pression d'une crise économique organisée ;
    • La méthode intergouvernementale qui a échoué a été renforcée avec l'adoption du traité Merkozy ; la réaction du parlement européen sur le budget doit ouvrir d'autres perspectives permettant la restauration de la souveraineté populaire.
    • Créons les conditions pour bâtir des majorités progressistes à l'échelle européenne, ne nous trompons pas sur la désignation de notre candidat à la Présidence de la Commission Européenne.
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    26 février 2013 2 26 /02 /février /2013 08:17

    Le score des élections italiennes, qui se sont déroulées les 24  et 25 février 2013, sidère une partie des commentateurs politiques européens.

    bersani.jpgLa victoire du Parti Démocrate (centre un peu à gauche) est réelle à la chambre des députés : La coalition de "gauche" de Pier Luigi Bersani, qui remporte 29,5% des voix, s'adjuge la majorité des sièges à la Chambre (340 des 630 sièges), grâce à un système qui accorde 54% des fauteuils à la formation arrivant en tête.

    Mais au Sénat, où la prime de majorité est accordée par région, les résultats donnent le centre gauche très loin de la majorité absolue des 158 sièges. En termes de voix, la gauche en remporte 31,63% et la droite 30,71%.

    beppe_grillo.jpgLa remontée spectaculaire de Silvio Berslusconi et de sa coalition de droite ou le très mauvais score des listes centristes de droite de Mario Monti (9%) ne sont pourtant pas les véritables révélations de ce scrutin. S'il est vrai que Berlusconi doit une bonne partie de son bon résultat à une campagne démagogique, le véritable vainqueur des élections est le mouvement 5 étoiles de Beppe Grillo, ancien comique, reconverti dans un rôle tribunicien très vaguement de gauche (salaire minimum, écologie, ...) si l'on considère que son discours s'appuie sur des boucs émissaires (le "système", les immigrés, l'Europe en soi).

    Selon les résultats officiels, il obtient aux alentours de 25 % dans chacune des deux chambres, devenant la troisième force politique du pays et devançant même le Parti Démocrate en tant que tel.

    Victoire très relative du centre gauche, défaite avérée et sévère du Président du Conseil qui a fait avaler aux Italiens la potion amère de l'austérité, remontée d'un Berlusconi démagogique et victoire d'un populiste inclassable : au-delà de l'ingouvernabilité de l'Italie (il faut disposer de la majorité à la chambre et au sénat, et Grillo refuse toute discussion avec le centre gauche), ce sont les politiques d'austérité qui continuent d'être violemment sanctionnées aujourd'hui en Italie, hier lors des autres scrutins récents dans les Etats de l'Union Européenne.

    Jusqu'ici rien de catastrophique ne s'est électoralement produit en Europe :

    • les Danois ont donné une majorité relative aux sociaux-démocrates,
    • les Belges ont réussi à trouver un compromis fédéral pour que le gouvernement soit dirigé dans un contexte très complexe par le socialiste Elio Di Rupo,
    • au Pays-Bas les libéraux ont réussi à entrainer les très centristes travaillistes néerlandais avec eux en coalition sur leur base programmatique,
    • les conservateurs grecs ont devancé d'un cheveu Syriza (gauche radicale, mais favorable au maintien de l'euro, n'en déplaise aux Echos et à Dominique Seu) ce qui leur donne - grâce au mode de scrutin - une majorité parlementaire qui leur évite de subir l'éventuel chantage des néo-nazis d'Aube Dorée...

    Quel sera le coup suivant ? En Espagne, le rejet du gouvernement conservateur ne donnera pas forcément une chance aux socialistes qui avaient été également rejetés pour les mêmes raisons, le mouvement des indignés n'offrant jusqu'ici aucun débouché politique. Au Portugal, la droite libérale pourrait être pareillement rejetée mais il n'existe pas dans ce pays de tradition d'union de la gauche qui pourrait offrir une véritable majorité alternative. Et le pire est à venir quand les électeurs européens constatent scrutin après scrutin que les orientations fondamentales de la politique économique et financière n'évoluent pas avec les changements de majorité : l'austérité semblant être l'unique horizon des gouvernements qu'ils soient de centre-droit ou de centre-gauche.

    La majorité de gauche en France est issue d'une conjonction de phénomènes politiques : rejet du sarkozisme, montée de la candidature du Front de Gauche avec Jean-Luc Mélenchon, campagne de François Hollande marquée par le volontarisme du discours du Bourget qui a fait un temps oublié la ligne qu'il avait défendue lors des primaires citoyennes. Depuis le tournant social-libéral impulsé par l'Elysée a été extrêmement rapide et renvoie une bonne partie de l'électorat de François Hollande aux désillusions de la rigueur et de l'austérité : ratfication du traité Merkozy, Pacte de compétitivité, soutien inconditionnel à l'accord national interprofessionnel MEDEF-CFDT, "couleuvre avalée" sur le budget européen...

    1489157 3 0fb0 marine-le-pen-a-lille-le-5-mars-2011Les élections locales de 2014 et 2015 pourrait s'avérer plus difficile qu'un simple rééquilibrage politique en général défavorable... Si en Italie c'est le populisme version Grillo, ambigu certes mais qui ne remet pas en cause les fondements démocratiques italiens, en France c'est vraisemblablement le Front National et les franges les plus réactionnaires de l'UMP qui profiteront de la poursuite de politiques de rigueur qui ne résolvent en rien la question de la dette publique et continue de dégrader la situation économique et sociale. Au-delà des prochaines élections locales, c'est évidemment l'élection de 2017 qui risque d'être dramatique si un tournant de la relance n'est pas rapidement opéré.

    La question est également posée à l'échelle de l'Union Européenne. Les politiques libérales, conservatrices, sociales-libérales imposées aux Européens, tant au niveau national qu'au niveau européen depuis plus de 15 ans, sont en train de tuer doucement l'idée généreuse et progressiste de la construction européenne, dont les citoyens s'éloignaient déjà par manque de fonctionnement démocratique et l'absence de prise en compte de la souveraineté populaire.

    La gauche européenne a en la matière une énorme responsabilité : si elle n'est pas capable de rompre avec les impasses libérales qui n'ont abouti qu'à l'échec, si elle n'est pas capable de dire que l'austérité ce n'est pas l'Europe en soi mais des choix politiques effectués par des gouvernements et des forces politiques que l'on peut parfaitement déconstruire, si elle n'est pas capable d'offrir une alternative européenne à ces orientations politiques, c'est l'Union Européenne qui finira par sombrer dans les populismes et la récession, avec toutes les nations qui la composent.

    Frédéric FARAVEL

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    7 juin 2012 4 07 /06 /juin /2012 14:55

    Le Parti socialiste européen (PSE) s’est dit favorable à ce que les euro-obligations soient inscrites parmi les priorités du prochain sommet européen (28 juin). À la veille du sommet européen informel du 23 mai, les Premiers ministres et dirigeants du PSE se sont réunis à Bruxelles afin de discuter des moyens de promouvoir leur programme de croissance.

    Le Président du PSE, Sergei Stanishev, a déclaré: «Le sommet informel aurait dû être un moment décisif pour l’Europe, montrant qu’elle s’engageait résolument dans une politique de croissance progressiste. Si nous voulons rétablir la confiance en Europe, nous devons nous atteler ensemble à l’élaboration d’un programme de croissance durable qui tienne compte de chaque État membre. Les euro-obligations sont conformes à ce principe démocratique fondamental, et sont un outil précieux pour sortir de la crise de la dette». Il a ajouté: «Ces obligations, combinées à une taxe sur les transactions financières et à un renforcement de la Banque européen d’investissement, peuvent contribuer à stabiliser l’UE, à générer de la croissance et à créer des emplois».

    S’agissant du débat sur la Grèce, M. Stanishev a souligné que: «Le projet européen est fondé sur la solidarité. Nous nous devons dès lors d’apporter un soutien inconditionnel au peuple grec et d’appuyer le plan d’Evangelos Venizelos, afin de permettre une sortie de crise responsable et progressiste. Maintenant que l’Europe s’engage enfin dans une politique progressiste et qu’une nouvelle dynamique s’installe, la Grèce ne doit pas rater sa chance».

    Hannes Swoboda, Président du groupe S&D au PE, a ajouté: «Le Conseil européen du 28 juin doit être décisif pour l’Europe, lui donner une nouvelle orientation fondée sur des politiques alternatives. Des politiques de croissance, d’investissement et d’emploi. Le niveau élevé du chômage dans tous les pays d’Europe, en particulier chez les jeunes, n’est pas seulement inacceptable, il est aussi socialement injuste. La semaine dernière, l’OCDE a approuvé notre appel à des mesures en faveur du renforcement de la croissance et a souligné qu’il était indispensable de procéder à des réformes sociales, de renforcer la BCE et d’investir davantage dans l’éducation et la R&D. Il est de notre devoir de poursuivre sur la voie d’une solution alternative à la crise, et le soutien à notre approche se renforce un peu plus chaque jour».
    Les dirigeants du PSE sont convenus de préparer un programme global de croissance et d’investissement en prévision du Conseil européen du 28 juin.

    Attendees at the PES Prime Ministers and leaders meeting 23 May 2012:
    • Werner Faymann (SPÖ, Austria)
    • Elio di Rupo (PS, Belgium)
    • Bruno Tobback (SP.A, Belgium)
    • Sergei Stanishev (BSP, Bulgaria)
    • Hannes Swoboda (leader of S&D EP)
    • Zoran Milanovic (SDP, Croatia)
    • Yiannakis Omirou (EDEK, Cyprus)
    • Bohuslav Sobotka (CSSD, Czech Republic)
    • Jean-Marc Ayrault (PS, France)
    • Sigmar Gabriel (SPD, Germany)
    • Evangelos Venizelos (PASOK, Greece)
    • Attila Mesterházy (MSZP, Hungary)
    • Laszlo Kapolyi (MSZDP, Hungary)
    • Eamon Gilmore (LP, Ireland)
    • Pier Luigi Bersani (PD, Italy)
    • Riccardo Nencini (PSI, Italy)
    • Alex Bodry (LSAP, Luxembourg)
    • Jean Asselborn (LSAP, Luxembourg)
    • Diederik Samsom (PvdA, Netherlands)
    • Alasdair McDonnell (SDLP, Northern Ireland)
    • António José Seguro (PS, Portugal)
    • Robert Fico (SMER-SD, Slovak Republic)
    • Alfredo Pérez Rubalcaba (PSOE, Spain)
    • Hannes Swoboda (S&D Group in the EP)
    • Karl-Heinz Lambertz (PES Group in the CoR)
    • Martin Schulz (President of the European Parliament)
    • Maria Damanaki (European Commissioner)
    • Zita Gurmai (PES Women President)
    • Kaisa Penny (ECOSY President)
    • Philip Cordery (PES General Secretary)
    • Massimo D’Alema (FEPS)
    • George Papandreou (PASOK & Socialist International)

     

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