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Le PRI réussira-t-il, dimanche 15 octobre, à conserver le poste de gouverneur qu'il a occupé sans discontinuer depuis 77 ans ? Il a en face de lui un redoutable adversaire : Andres Manuel Lopez Obrador, dit "Amlo", coiffé au poteau lors du scrutin présidentiel du 2 juillet mais leader d'une gauche décidée à accélérer le changement. Le candidat en titre du Parti de la révolution démocratique (PRD), Raul Ojeda, n'est qu'un figurant dans cette bataille éclipsé par la personnalité de son chef, "Amlo", qui joue là son destin politique.
Natif de la région, ce dernier y a construit son image de lutteur social. En 1994, il a perdu l'élection au poste de gouverneur contre Roberto Madrazo, un cacique du PRI donné gagnant après une campagne émaillée d'incidents et de fraudes. En 1996, il a fait bloquer pendant des semaines, par 40 000 paysans et pêcheurs des régions les plus pauvres de l'Etat, les puits et bureaux de la Pemex afin de protester contre des dommages écologiques. Ce fut le début d'une carrière nationale qui l'a mené à la mairie de Mexico, en 2000, puis à 2 doigts de la présidence.
"Le Tabasco est le principal bastion du "lopezobradorisme" après la capitale fédérale", souligne l'éditorialiste Miguel Angel Granados. "Une défaite aurait un rude impact sur la stratégie nationale de Lopez Obrador ", ajoute-t-il, car il verrait s'éloigner les courants du PRD qui ont fait front avec lui pour contester le résultat de l'élection présidentielle, mais n'approuvent pas forcément sa stratégie de rupture avec le président élu, le conservateur Felipe Calderon. Si, au contraire, il remporte cette nouvelle manche, "Amlo" pourra relancer sa "résistance civile pacifique" et trouvera dans les caisses de l'Etat de Tabasco de quoi encourager des mobilisations à travers le pays.
La bataille aura des retombées pour la Pemex, qui a établi au Tabasco deux de ses rouages essentiels (exploration-production et pétrochimie de base). "Ce qui est en jeu, c'est la privatisation, à laquelle nous sommes opposés", déclare au Monde le président du PRD, Leonel Cota.
Le climat est très tendu. Les affrontements entre "priistes" et "pérédistes" se sont multipliés. Des armes à feu ont été saisies par la police. Pour M. Cota, "le Tabasco prend le même chemin qu'Oaxaca", cet autre Etat du Sud qui est depuis 4 mois en rébellion ouverte contre son gouverneur priiste. Le PRD contrôle déjà 11 des 17 circonscriptions du Tabasco, et le 2 juillet "Amlo" y a fait un triomphe.
Il reçoit en outre l'appui inespéré du plus puissant groupe médiatique de la région, le quotidien Tabasco hoy. "La grande majorité des gens sont aujourd'hui pérédistes", explique le patron de Tabasco Hoy, Miguel Canton.
Dans les cités pétrolières comme Ciudad Pemex, on ne voit que les affiches jaunes du PRD. Mais à Villahermosa, le candidat du PRI, Andres Granier, s'est forgé une réelle popularité durant sa gestion municipale. "Et le PRI a mis le paquet, offrant aux électeurs de l'argent liquide, du ciment, des vélos, des moulins pour moudre le maïs, mettant la pression sur tous les groupes corporatifs", témoigne Julio Cesar, chauffeur de taxi.
Autant de pratiques illégales dûment répertoriées par les pérédistes, qui préparent déjà, en cas de défaite, un recours devant les tribunaux.