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sur l'auteur

Je m'appelle Frédéric Faravel. Je suis né le 11 février 1974 à Sarcelles dans le Val-d'Oise. Je vis à Bezons dans le Val-d'Oise. Militant socialiste au sein de la Gauche Républicaine & Socialiste. Vous pouvez aussi consulter ma chaîne YouTube. J'anime aussi le groupe d'opposition municipale de gauche "Vivons Bezons" et je suis membre du groupe d'opposition de gauche ACES à la communauté d'agglomération Saint-Germain/Boucle-de-Seine.
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Gauche Républicaine & Socialiste

13 février 2012 1 13 /02 /février /2012 09:13

AthenesEmeutes.jpgLes émeutes de dimanche à Athènes – alors que les députés grecs étaient sommés d'adopter un nouveau plan d'austérité, dont on sait par avance qu'il ne produira aucun résultat – devraient faire réfléchir nombre de nos dirigeants politiques. S'il existe bien des dérives financières et budgétaires anciennes et durables dans la conduite des affaires publiques grecques – que ces dérives donnent prétextes à un discours de la droite sur la faute originelle de la gauche qui aurait fait entrer la Grèce dans l'euro –, c'est aujourd'hui le peuple grec qui est saigné à blanc alors que la stratégie économique imposée à ce pays par l'Union Européenne, la Banque Centrale Européenne et le Fonds Monétaire International, l'enfonce très clairement et plus durement jour après dans la récession… Une solution qui empêche de fait le rétablissement des comptes grecs et le remboursement de la dette de l’État hellène ; une solution qui empêche le retour de la croissance économique, qui accroit le chômage, qui abaisse comme jamais les salaires et ainsi n'autorise pas les citoyens grecs à s'acquitter des nombreuses taxes dont leur gouvernement les accable depuis 2 ans.

Une spirale infernale qu'une centaine de députés grecs a refusée hier, pendant que la population excédée répondait à la violence policière par le déclenchement d'une émeute, qui a provoqué l'incendie de la Bibliothèque nationale et de nombreux bâtiments symboles de l'Amérique et de l'Union Européenne. Plusieurs dizaines d'entre eux étaient membres du PASOK, le parti socialiste grec, parfois issus du précédent gouvernement Papandréou ; ils ont été exclus alors qu'ils ont sauvé l'honneur de leur pays et de leur famille politique. Le Parti Socialiste Européen, et en son sein le Parti Socialiste français, ne peut rester indifférent à cette sanction injustifiable.

Sarkozy-Barroso-MerkelLa logique politique qui préside à la tête des institutions européennes, sous la férule d'Angela Merkel, Nicolas Sarkozy et José Manuel Durao Baroso, peut mener à des spirales similaires au Portugal (qui n'arrive pas à se sortir de la récession), et éventuellement en Italie et en Espagne. Le traité, initié par la Chancelière allemande et le Président français, le 9 décembre dernier, avec son carcan économique, ses sanctions automatiques et l'abaissement du Parlement européen [cliquer ici pour retrouver l'analyse du projet de traité] implique une généralisation de l'austérité économique, qui approfondira la récession, porte en son sein la négation de la souveraineté populaire et dénie toute possibilité de mise en œuvre d'une réelle solidarité européenne. À ce régime, l'Italie et la France pourraient bien connaître les mêmes heurts sociaux, sans possibilité d'y répondre et de faire face à la récession.

C'est une pensée qui devrait habiter nos dirigeants, de droite comme de gauche : non, Papandréou n'a pas fait preuve d'une excessive "mansuétude" vis-à-vis de la dette grecque ; au regard de la structure profonde de l’État grec, il n'avait pas les moyens d'y répondre. Il n'avait pas les moyens de corriger plusieurs décennies d'errements qui n'ont rien à voir avec des choix de politiques économiques mais tiennent surtout à l'absence d'une administration – notamment fiscale – solide et à la généralisation de la corruption. Il pouvait d'autant moins répondre à l'état de la dette grecque, que l'Union Européenne ne fixait pas comme objectif de résoudre les problèmes structurels de l’État grec (aucune demande sérieuse sur l'administration et la corruption), mais au contraire conditionnait sa « solidarité » au fait de trancher dans tous les secteurs de l'activité, sans distinction, et je ne crois pas possible de recouvrer des impôts et de lutter contre la corruption quand votre administration fiscale et votre justice sont anémiées à la demande de vos créanciers et de vos partenaires. L’État grec avait, pour finir, d'autant moins les moyens d'affronter sa dette abyssale, que l'Union Européenne n'a jamais substitué à son niveau en terme financier et monétaire les outils politiques que les États membres ont abandonné en opérant les précédents transferts de souveraineté.

claud-gueant-sarkozy 9881Celui qui fait aujourd'hui campagne pour sa réélection grâce aux fonds publics, et n'a de ce fait aucune leçon de morale à adresser aux États du sud de l'Europe supposés laxistes, propose de revenir à une pratique plus fréquente des référendums. Mais, malheureusement pour lui, si l'annonce médiatique de référendums stigmatisant chômeurs et immigrés peut flatter quelques instincts primaires dans l'électorat sur fond de droitisation du discours de l'UMP, les thèmes choisis par le locataire de l’Élysée n'entrent vraisemblablement pas dans le champ prévu par la constitution pour les soumettre au peuple français par Référendum.

Suggérons-lui un sujet plus conséquent au regard des enjeux que constituent pour la souveraineté populaire, l'avenir de la France et de la construction européenne, les mesures contenues dans le projet de traité Merkel-Sarkozy. Ce nouveau projet de traité européen ne saurait sérieusement être ratifié sans que les citoyens français se prononcent dessus directement.

La gauche en général et les socialistes en particulier doivent adopter une stratégie très claire sur la question. Leurs parlementaires doivent voter contre le texte lorsqu'il sera présenté prochainement au parlement. Le candidat socialiste doit impérativement abandonner sa posture actuelle de ne soumettre le texte qu'il aurait préalablement renégocié qu'au Congrès. La gauche, revenue au pouvoir, ne peut pas décemment agir de la même manière que les conservateurs et mépriser les citoyens. Si François Hollande est élu, le projet de traité doit être rejeté par l'exécutif s'il reste en l'état et soumis à référendum s'il a été entre temps renégocié.

Mais encore faut-il s'entendre sur les termes de la renégociation. Car il est deux écueils que la gauche doit éviter :

  • considérer qu'il suffira de revendiquer et d'obtenir un référendum sur un mauvais traité ;

  • oublier de proposer une alternative politique et institutionnelle pour la construction, car l'UE ne peut pas décemment continuer à fonctionner avec les traités actuels.

FrancoisHollandeOr il ne suffit pas d'annoncer sa volonté de renégocier le texte actuel pour lui adjoindre un chapitre sur la « croissance ». Ce n'est pas en ajoutant un tel chapitre – autant dire qu'il s'agirait de déclamer que la situation serait meilleure s'il faisait beau quand le ciel est couvert – que l'on corrigera les graves erreurs déjà énoncées plus haut. Ajouter un chapitre « croissance » équivaut à accepter de fait l'économie globale du projet de traité Merkel-Sarkozy ; et rédiger et adopter un nouvel accord franco-allemand, baptisé « second traité de l’Élysée » ne changera rien à cela.

La gauche française et européenne doit réaffirmer son projet européen. Il n'existe pas réellement, sauf pour quelques groupuscules politiques et quelques grognards au sein du MRC, de véritables anti-européens au sein de la gauche française. Le clivage qui existe est entre ceux qui veulent affirmer qu'il y a un projet européen de gauche et un projet européen de droite et ceux – les sociaux-libéraux – prêts à accepter n'importe quel texte européen, même inspiré par les conservateurs et les ultra-libéraux au prétexte qu'un rejet détruirait la construction européenne. C'est pourtant ces politiques conservatrices et ultra-libérales, ces compromis institutionnels inspirés par elles qui sont en train de tuer l'idée européenne, en dressant les peuples européens contre elles.

PSElogo.jpgSi nous voulons sauver la construction européenne et si nous voulons rétablir la souveraineté populaire, la gauche doit présenter son alternative au projet de traité Merkozy.

  • Nous devons établir non pas une gouvernance mais un gouvernement économique européen. Le débat porte sur son périmètre, ses fonctions, son architecture institutionnelle :

    • Le périmètre devrait concerner idéalement tous les États de l’Union, et pas juste ceux de l’Eurogroupe. Les États les plus «eurovolontaires» doivent pouvoir le faire dans le cadre des « coopérations renforcées » et des accords intergouvernementaux. La progression de la construction européenne se fera de façon différenciée, par cercles concentriques. Avec l’ambition d’accueillir à terme tous les États membres dans le cercle le plus intégré.

    • Les fonctions se résument à trois : coordination des politiques budgétaires des États membres, mise en œuvre des politiques communes, conduite d’une politique active des changes.

    • L’architecture institutionnelle doit respecter la spécificité de la construction européenne : il s’agit d’une «fédération d’États-nations». Les trois piliers de l’autorité européenne doivent être simultanément renforcés.

      • La Commission européenne doit être le siège du gouvernement économique. Garante des traités, elle examinerait les budgets nationaux, communiquerait ses recommandations aux États membres, et demanderait des sanctions au Conseil européen. La commission européenne doit également privilégier la compétence politique sur la représentativité nationale et technocratique. Le commissaire aux affaires économiques et financières doit devenir le ministre de l’Économie et des Finances de l’UE : à la fois vice-président de la Commission, président de l’Ecofin (Conseil européen des 27 ministres de l’Économie et des Finances des États membres) et président de l’Eurogroupe, participant de droit avec le président de la commission au Conseil européen. Pour assumer cette position, la Commission européenne doit impérativement gagner en légitimité démocratique.

      • Pour gagner en légitimité démocratique, le Président de la Commission doit être élu par le Parlement Européen, parmi les têtes de liste des partis européens (PSE, PPE, Verts…). Ces derniers doivent aller aux élections européennes, non seulement avec un programme de législature pour l’UE, mais aussi avec un candidat à la présidence de la Commission pour incarner ce programme. Fort de la légitimité que lui donnera son élection au suffrage universel indirect, comme n'importe quel chef de gouvernement à l'échelle nationale, le président de la Commission pourrait se doter de vice-présidents, de rang ministériel. Le Parlement européen devrait pour sa part pleinement intégrer le processus décisionnel de la gouvernance économique européenne, grâce à l’adoption de la procédure de codécision pour les grandes orientations de politiques économique et budgétaire. Les Parlement nationaux devraient y être associés, via leurs commissions compétentes.

      • Le Conseil des chefs d’État et de gouvernement joue un rôle irremplaçable de chambre haute, représentant les nations. Les sujets sur lesquels il décide à la majorité qualifiée doivent être étendus, la périodicité de ses réunions augmentée.

  • Nous devons mutualiser la dette des États européens : nos pays ont un impératif, celui de disposer de ressources nécessaires pour améliorer leur compétitivité. A cet effet, les missions du Fonds européen de stabilité financière doivent être étendues ; il doit pouvoir recapitaliser les banques, notamment celles qui participeraient à la restructuration de la dette grecque. Le FESF doit pouvoir émettre des euro-obligations pour mobiliser l’épargne excédentaire, et l’affecter aux dépenses d’investissement des États membres. Pour prévenir d’éventuelles tensions sur les taux de ces euro-obligations, la Banque Centrale Européenne elle-même doit être autorisée à les racheter.

pselogo2.jpgCette question du gouvernement économique et du contrôle démocratique des outils de politique économique et monétaire est devenue la clé de voûte de la crise européenne, c’est elle qui conditionne la politique de mutualisation et de monétisation des dettes souveraines. L’option intergouvernementale choisie par Sarkozy débouche sur un directoire franco-allemand, marque un recul démocratique jamais vu en Europe, et accouche de l’Europe « austéritaire » et disciplinaire voulue par Mme Merkel et ne manquera pas d'emmener l'Europe à sa perte. C'est donc les fondements que l'accord du 9 décembre 2011 qu'il faut renverser, sous peine de ne même pas avoir la capacité de mettre en oeuvre le programme de François Hollande. La gauche européenne doit impérativement profiter du fait que tous les gouvernements européens sont dos au mur pour imposer son agenda.


Frédéric Faravel
Secrétaire fédéral du PS Val-d'Oise aux relations extérieures

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