8 avril 2007
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La droite française s’enfonce dans le Populisme et la Réaction
L’élection présidentielle du printemps 2007 – on votera dans 14 jours – fait partie de ses scrutins qui font tournant dans l’histoire politique de notre pays.
Mais malgré ses dévoiements, la campagne électorale aura à ce stade mis en lumière un bouleversement majeur du corpus politique français, à savoir le basculement complet de la droite française dans le populisme et la réaction, emportant tous les principes républicains qui s’étaient imposés jusqu’ici à la droite parlementaire.
Que Le Pen, Mégret et Villiers fussent populistes et réactionnaires, c’était chose entendue, et les faits ont démontré à quel point ils représentaient un danger réel qui nécessitait en réponse tout autre chose qu’une stratégie de containment d’un vote protestataire.
Le danger aujourd’hui se diffuse à la droite républicaine, car si on savait que Chirac pouvait être démagogique et souverainiste, Giscard aristocratique et méprisant, Poher et Barre fades et insipides, ils étaient les représentants légitimes et nécessaires d’une droite qui avait définitivement accepté le fait républicain au moins depuis la Libération et l’action de Charles De Gaulle.
Aujourd’hui, il nous faut combattre un Bayrou populiste et un Sarkozy réactionnaire, et il n’apparaît pas aujourd’hui d’expression pleinement républicaine à droite, ce qui déséquilibre durablement le champ politique national.
Bayrou populiste
Et c’est bien la première des surprises et des supercheries… Et Madame Simone Veil a finalement raison de dire que des 12 candidats qui se présentent à la charge suprême c’est finalement «le pire de tous». Le Président de l’UDF ne manque pas d’air, voici un responsable politique qui peut s’enorgueillir d’un sacré CV :
Voilà le pire des populismes, du Le Pen dans le texte prononcé par un tête d’angelot béarnais.
Sarkozy réactionnaire
La polémique initiée par le candidat de l’UMP sur le «ministère de l’immigration et de l’identité nationale» qu’il souhaite créer, si par malheur il accédait à la présidence de la République, a eu au moins un mérite, celui de forcer les candidats à préciser les contours de leur définition de l’identité nationale. Car les interrogations sont toujours légitimes et les difficultés que traversent la France dans un contexte de mutations profondes et multiples peuvent légitimement inquiéter les plus exposés de nos concitoyens (à ce rythme, ils sont près de devenir la majorité).
Les définitions se sont succédés mais une seule est restée et permet d’affronter l’avenir et de rassembler les Français et au-delà. L’identité nationale n’a d’existence que dans le cadre de la République dont les valeurs essentielles fondent sa devise : LIBERTÉ, ÉGALITÉ, FRATERNITÉ.
Or justement quelle a été l’action de Nicolas Sarkozy et quelles sont ses propositions au regard de la Liberté, de l’Égalité et de la Fraternité ?
Liberté
Le ministre d’État à l’intérieur, à l’aménagement du territoire et aux cultes a fait voter à 18 mois de distances deux lois différentes sur l’entrée et le séjour des étrangers (RESEDA, CESEDA). Outre que ce type de pratique marque en soi l’échec d’une politique et l’incompétence de celui qui l’a conduit (qui devrait donc en tirer en tirer les conséquences et prendre du recul plutôt que de solliciter les suffrages des électeurs), ces deux lois ont accru l’insécurité pour toute une partie de la population qui vit en France, réduisant de fait les libertés publiques, fabriquant des sans-papiers et les instrumentalisant au passage. Nicolas Sarkozy nous en promet une troisième, votée prioritairement dès qu’il accèdera au pouvoir, marquant à la fois l’échec des deux précédentes qu’il a lui-même élaborées et mises en œuvre et le mirage dans lequel il conduit les Français de réduire tous les problèmes de la France à une immigration qui est la plus faible d’Europe.
Plus grave, sous le prétexte de lutter contre la criminalité et le terrorisme, Nicolas Sarkozy a contribué comme ministre de l’intérieur à criminaliser une partie des Français : à titre d’exemple, le fichier des empreintes génétiques - qui ne concernaient au départ que les auteurs présumés ou avérés de crimes sexuels - a été étendu à des catégories pour le moins improbables ; en effet, les faucheurs d’OGM sont désormais contraints de se soumettre à cette identification génétique, sous peine de poursuites supplémentaires pouvant entraîner des peines de prisons fermes. Que l’on puisse considérer comme répréhensible les fauchages d’OGM en plein champ peut à la rigueur se discuter, mais cette dérive sarkozienne démontre à quel point le danger existe de fragiliser durablement les libertés publiques par la pratique généralisée du fichage des individus, sous le prétexte de la tranquillité publique.
Égalité
Nicolas Sarkozy a démontré comme ministre de l’intérieur et comme ministre de l’économie et des finances, quelle conception il avait de l’égalité. Suspendant la double peine au début de la législature – il ne l’a pas abrogé comme il a voulu le faire croire aux habitants des quartiers populaires quand il draguait électoralement les enfants et petits-enfants d’immigrés – il l’a aussitôt rétabli à l’occasion des émeutes urbaines de la Toussaint 2005 qu’il avait lui-même contribué à allumer. Ainsi en France, l’égalité devant la loi n’existe pas et pour une même faute certains peuvent payer deux fois plus que les autres, en fonction du seul intérêt stratégique du moment d’un futur candidat à la présidence de la République.
Ministre de l’économie, il a procédé aux baisses d’impôts promises par Chirac en direction des catégories les plus privilégiées du pays, demandant et obtenant avec le soutien de son parti le « bouclier fiscal » qui favorise les plus riches des Français.
Ministre de l’intérieur, il a élaboré avec Jean-Pierre Raffarin et Patrick Devedjian de nouvelles lois de décentralisation, qui ont consisté en un dramatique transfert de charges de l’État vers les collectivités locales, contraignant Départements et Régions à augmenter les impôts pour faire face à la rénovation des réseaux ferrés et du matériel roulant, la réfection des réseaux routiers et le financement du RMI, dont le chiffre des bénéficiaires explose du fait de la politique menée depuis 2002 par Chirac, Raffarin, Sarkozy et Villepin. C’est dans les départements les plus populaires que les charges les plus lourdes ont été reportées. On voit bien qu’elle est ici la conception de l’égalité territoriale et de l’équité sociale chez Monsieur Sarkozy.
Candidat à la présidence, Sarkozy propose de «travailler plus pour gagner plus», supprimant de nouvelles cotisations sociales pour les entreprises et oubliant par la même que la participation de celles-ci à la solidarité nationale concourent au fait qu’elles disposent de salariés en bonne santé (par exemple), oubliant qu’aucun employés ou ouvriers n’a jamais vraiment eu le choix de ses heures supplémentaires, que bien des femmes préfèreraient effectivement travailler plus si leur patrons ne leur imposaient pas un temps partiel, et que sa proposition revient tout bonnement à légaliser le travail au noir. Belle perspective pour l’égalité avec le candidat Sarkozy.
Fraternité
On a vu déjà que la définition de l’identité nationale chez Nicolas Sarkozy ne répondait pas à celle de la République, puisque mêler dans un même ministère immigration et identité nationale dévoile la conception ethnique qu’a le candidat de la nation française. Simone Veil a encore le temps de se ressaisir et de lâcher avant le 22 avril cet individu qui fait du mal à la Fraternité avec cette simple proposition. Car la Fraternité est cette partie de l’identité nationale qui fait qu’en France vous êtes citoyens non pas en fonction de là où vous venez mais de là où vous voulez aller avec vos concitoyens.
Mais avec Nicolas Sarkozy, il faut s’attendre à trouver toujours plus ailleurs que là où on l’attend ; ainsi comme Kennedy l’avait lancé à Nixon «Ce que vous êtes crie plus fort que ce que vous dites», et bien ce qu’il dit – son programme présidentiel officiel – résonne finalement bien moins fort que ce qu’il démontre être dans une conversation philosophique avec le libertaire et athéologiste Michel Onfray (en photo), rapportée par Philosophie Magazine. Ainsi pour l’homme Sarkozy l’on naît pédophile, et si certains jeunes se suicident c’est qu’ils y étaient prédisposés génétiquement. Cette prédétermination génétique n’est aujourd’hui défendue que dans les milieux conservateurs et fondamentalistes anglo-saxons, mais elle résonne désormais dans la bouche d’un responsable politique français qu’il faut bien qualifier de premier plan. En choisissant de s’afficher sur ce terrain, Nicolas Sarkozy remet en cause l’universalité de l’être humain, il fait rompre la droite avec l’universalisme et la Fraternité.
La gauche et les socialistes, seuls garants de la République
Face à ce basculement, qu’on n’ose croire définitif, de la droite française vers ses vieux démons du populisme et de la réaction, la gauche française doit impérativement réaffirmer les valeurs républicaines pour permettre aux Français de se rassembler et reconstruire ensemble un droit à l’avenir pour tous…
Aucun mouvement politique n’arrive à conquérir et à conserver durablement le pouvoir pour réformer ou transformer la société, sans avoir imposé ses thèmes et ses valeurs au sein du corps social. Antonio Gramsci, leader des communistes italiens emprisonné par Mussolini, avait appelé cette option «l’hégémonie culturelle du prolétariat», le mouvement ouvrier devait conquérir la domination culturelle de la société avant d’accéder à la direction des affaires. Aujourd’hui, celui qui a durablement compris cette réalité politique est Jean-Marie Le Pen ; ce dernier a par ailleurs clairement exprimé l’intégration de cette tactique dans son corpus politique dès les années 1990 et Robert Badinter avait d’ailleurs mis en garde les Français et leurs responsables politiques sur la traduction concrète de cette stratégie dans la «lepénisation des esprits». Tentation à droite, cette lepénisation l’a désormais conquise.
La gauche doit prendre conscience que la bataille culturelle - que nous livre l’extrême droite, la droite et ses relais industrialo-médiatiques – a connu une première phase et que désormais une contre-offensive est à mener. Ségolène Royal a choisi de ne laisser aucun champ à la démagogie de la droite et d’y réinsérer les valeurs de la République, c’est une bonne chose ; mais il est temps dans les 14 jours qui restent avant le 1er tour de rétablir dans l’esprit de la population que ce n’est pas en marchant sur celui qui partage la même peine et les mêmes difficultés que soi qu’on permettra de résoudre la grave crise sociale et politique de traverse le pays et que subissent les exclus, les couches populaires et moyennes. Il faut rétablir l’espoir chez nos concitoyens, leur volonté d’agir collectivement contre les égoïsmes et l’accaparement de la richesse nationale, européenne et mondiale par quelques privilégiés qui aujourd’hui comme hier cherchent également à confisquer le pouvoir.
Liberté, Égalité, Fraternité, ces valeurs de la République sont au cœur du combat de la gauche française et l’unifie depuis 1848. Elles sont la démonstration du message d’universalité de la République française (débarrassée désormais du dévoiement colonial) et dépassent même la notion de nation française. Rappelons que la déclaration de principes du Parti des socialistes européens (qui rassemblent les partis socialistes, sociaux-démocrates et travaillistes des 27 États membres de l’Union européenne et au-delà) est fondée sur ce même triptyque, Liberté, Égalité, Fraternité. Il reste des débats à mener avec nos camarades européens, mais en France avec Ségolène Royal et en Europe avec les socialistes européens c’est à gauche et à gauche seulement que peuvent être défendues et étendues les valeurs de la République française et le dépassement positif de sa nation.
L’élection présidentielle du printemps 2007 – on votera dans 14 jours – fait partie de ses scrutins qui font tournant dans l’histoire politique de notre pays.
- - 1965 a été la première élection présidentielle au suffrage universel direct et a démontré que la gauche pouvait mettre en ballottage jusqu’au Général De Gaulle pour peu qu’elle s’unisse ;
- - 1981 a consacré la conquête du pouvoir par la gauche, identifiant selon le mot de François Mitterrand la majorité sociale à la majorité politique ;
- - 2002 a été un séisme avec l’accès de Jean-Marie Le Pen et de l’extrême droite au 2nd tour du scrutin, devançant une gauche en perte de repère et un candidat socialiste qui n’avait pas su mobiliser son électorat derrière son absence de programme.
Mais malgré ses dévoiements, la campagne électorale aura à ce stade mis en lumière un bouleversement majeur du corpus politique français, à savoir le basculement complet de la droite française dans le populisme et la réaction, emportant tous les principes républicains qui s’étaient imposés jusqu’ici à la droite parlementaire.
Que Le Pen, Mégret et Villiers fussent populistes et réactionnaires, c’était chose entendue, et les faits ont démontré à quel point ils représentaient un danger réel qui nécessitait en réponse tout autre chose qu’une stratégie de containment d’un vote protestataire.
Le danger aujourd’hui se diffuse à la droite républicaine, car si on savait que Chirac pouvait être démagogique et souverainiste, Giscard aristocratique et méprisant, Poher et Barre fades et insipides, ils étaient les représentants légitimes et nécessaires d’une droite qui avait définitivement accepté le fait républicain au moins depuis la Libération et l’action de Charles De Gaulle.
Aujourd’hui, il nous faut combattre un Bayrou populiste et un Sarkozy réactionnaire, et il n’apparaît pas aujourd’hui d’expression pleinement républicaine à droite, ce qui déséquilibre durablement le champ politique national.
Bayrou populiste
Et c’est bien la première des surprises et des supercheries… Et Madame Simone Veil a finalement raison de dire que des 12 candidats qui se présentent à la charge suprême c’est finalement «le pire de tous». Le Président de l’UDF ne manque pas d’air, voici un responsable politique qui peut s’enorgueillir d’un sacré CV :
- - il est parlementaire depuis plus de 20 ans,
- - il est engagé depuis son plus jeune âge au sein d’une famille politique inscrite dans le paysage depuis 1944 avec le MRP, le CDS et l’UDF,
- - il a dirigé durant plusieurs années d’une main de fer le Conseil général des Pyrénées-Atlantiques conduisant une majorité de droite UDF-RPR, secondé par Michèle Alliot-Marie,
- - il fut ministre de l’Éducation Nationale durant 4 ans (1993-1997) des gouvernements Balladur et Juppé, parmi les plus à droite depuis 1945,
- - il a été membre de la majorité parlementaire de 2002 à 2006, trouvant que la réforme Fillon sur les retraites n’était pas encore assez radicale et encourageant ses députés UDF à l’aggraver et à aggraver la loi sur « l’égalité des chances » en abaissant jusqu’à 13 ans l’âge de la scolarité obligatoire quand l’UMP se « limitait » à 14 ans…
Voilà le pire des populismes, du Le Pen dans le texte prononcé par un tête d’angelot béarnais.
Sarkozy réactionnaire
La polémique initiée par le candidat de l’UMP sur le «ministère de l’immigration et de l’identité nationale» qu’il souhaite créer, si par malheur il accédait à la présidence de la République, a eu au moins un mérite, celui de forcer les candidats à préciser les contours de leur définition de l’identité nationale. Car les interrogations sont toujours légitimes et les difficultés que traversent la France dans un contexte de mutations profondes et multiples peuvent légitimement inquiéter les plus exposés de nos concitoyens (à ce rythme, ils sont près de devenir la majorité).
Les définitions se sont succédés mais une seule est restée et permet d’affronter l’avenir et de rassembler les Français et au-delà. L’identité nationale n’a d’existence que dans le cadre de la République dont les valeurs essentielles fondent sa devise : LIBERTÉ, ÉGALITÉ, FRATERNITÉ.
Or justement quelle a été l’action de Nicolas Sarkozy et quelles sont ses propositions au regard de la Liberté, de l’Égalité et de la Fraternité ?
Liberté
Le ministre d’État à l’intérieur, à l’aménagement du territoire et aux cultes a fait voter à 18 mois de distances deux lois différentes sur l’entrée et le séjour des étrangers (RESEDA, CESEDA). Outre que ce type de pratique marque en soi l’échec d’une politique et l’incompétence de celui qui l’a conduit (qui devrait donc en tirer en tirer les conséquences et prendre du recul plutôt que de solliciter les suffrages des électeurs), ces deux lois ont accru l’insécurité pour toute une partie de la population qui vit en France, réduisant de fait les libertés publiques, fabriquant des sans-papiers et les instrumentalisant au passage. Nicolas Sarkozy nous en promet une troisième, votée prioritairement dès qu’il accèdera au pouvoir, marquant à la fois l’échec des deux précédentes qu’il a lui-même élaborées et mises en œuvre et le mirage dans lequel il conduit les Français de réduire tous les problèmes de la France à une immigration qui est la plus faible d’Europe.
Plus grave, sous le prétexte de lutter contre la criminalité et le terrorisme, Nicolas Sarkozy a contribué comme ministre de l’intérieur à criminaliser une partie des Français : à titre d’exemple, le fichier des empreintes génétiques - qui ne concernaient au départ que les auteurs présumés ou avérés de crimes sexuels - a été étendu à des catégories pour le moins improbables ; en effet, les faucheurs d’OGM sont désormais contraints de se soumettre à cette identification génétique, sous peine de poursuites supplémentaires pouvant entraîner des peines de prisons fermes. Que l’on puisse considérer comme répréhensible les fauchages d’OGM en plein champ peut à la rigueur se discuter, mais cette dérive sarkozienne démontre à quel point le danger existe de fragiliser durablement les libertés publiques par la pratique généralisée du fichage des individus, sous le prétexte de la tranquillité publique.
Égalité
Nicolas Sarkozy a démontré comme ministre de l’intérieur et comme ministre de l’économie et des finances, quelle conception il avait de l’égalité. Suspendant la double peine au début de la législature – il ne l’a pas abrogé comme il a voulu le faire croire aux habitants des quartiers populaires quand il draguait électoralement les enfants et petits-enfants d’immigrés – il l’a aussitôt rétabli à l’occasion des émeutes urbaines de la Toussaint 2005 qu’il avait lui-même contribué à allumer. Ainsi en France, l’égalité devant la loi n’existe pas et pour une même faute certains peuvent payer deux fois plus que les autres, en fonction du seul intérêt stratégique du moment d’un futur candidat à la présidence de la République.
Ministre de l’économie, il a procédé aux baisses d’impôts promises par Chirac en direction des catégories les plus privilégiées du pays, demandant et obtenant avec le soutien de son parti le « bouclier fiscal » qui favorise les plus riches des Français.
Ministre de l’intérieur, il a élaboré avec Jean-Pierre Raffarin et Patrick Devedjian de nouvelles lois de décentralisation, qui ont consisté en un dramatique transfert de charges de l’État vers les collectivités locales, contraignant Départements et Régions à augmenter les impôts pour faire face à la rénovation des réseaux ferrés et du matériel roulant, la réfection des réseaux routiers et le financement du RMI, dont le chiffre des bénéficiaires explose du fait de la politique menée depuis 2002 par Chirac, Raffarin, Sarkozy et Villepin. C’est dans les départements les plus populaires que les charges les plus lourdes ont été reportées. On voit bien qu’elle est ici la conception de l’égalité territoriale et de l’équité sociale chez Monsieur Sarkozy.
Candidat à la présidence, Sarkozy propose de «travailler plus pour gagner plus», supprimant de nouvelles cotisations sociales pour les entreprises et oubliant par la même que la participation de celles-ci à la solidarité nationale concourent au fait qu’elles disposent de salariés en bonne santé (par exemple), oubliant qu’aucun employés ou ouvriers n’a jamais vraiment eu le choix de ses heures supplémentaires, que bien des femmes préfèreraient effectivement travailler plus si leur patrons ne leur imposaient pas un temps partiel, et que sa proposition revient tout bonnement à légaliser le travail au noir. Belle perspective pour l’égalité avec le candidat Sarkozy.
Fraternité
On a vu déjà que la définition de l’identité nationale chez Nicolas Sarkozy ne répondait pas à celle de la République, puisque mêler dans un même ministère immigration et identité nationale dévoile la conception ethnique qu’a le candidat de la nation française. Simone Veil a encore le temps de se ressaisir et de lâcher avant le 22 avril cet individu qui fait du mal à la Fraternité avec cette simple proposition. Car la Fraternité est cette partie de l’identité nationale qui fait qu’en France vous êtes citoyens non pas en fonction de là où vous venez mais de là où vous voulez aller avec vos concitoyens.
Mais avec Nicolas Sarkozy, il faut s’attendre à trouver toujours plus ailleurs que là où on l’attend ; ainsi comme Kennedy l’avait lancé à Nixon «Ce que vous êtes crie plus fort que ce que vous dites», et bien ce qu’il dit – son programme présidentiel officiel – résonne finalement bien moins fort que ce qu’il démontre être dans une conversation philosophique avec le libertaire et athéologiste Michel Onfray (en photo), rapportée par Philosophie Magazine. Ainsi pour l’homme Sarkozy l’on naît pédophile, et si certains jeunes se suicident c’est qu’ils y étaient prédisposés génétiquement. Cette prédétermination génétique n’est aujourd’hui défendue que dans les milieux conservateurs et fondamentalistes anglo-saxons, mais elle résonne désormais dans la bouche d’un responsable politique français qu’il faut bien qualifier de premier plan. En choisissant de s’afficher sur ce terrain, Nicolas Sarkozy remet en cause l’universalité de l’être humain, il fait rompre la droite avec l’universalisme et la Fraternité.
La gauche et les socialistes, seuls garants de la République
Face à ce basculement, qu’on n’ose croire définitif, de la droite française vers ses vieux démons du populisme et de la réaction, la gauche française doit impérativement réaffirmer les valeurs républicaines pour permettre aux Français de se rassembler et reconstruire ensemble un droit à l’avenir pour tous…
Aucun mouvement politique n’arrive à conquérir et à conserver durablement le pouvoir pour réformer ou transformer la société, sans avoir imposé ses thèmes et ses valeurs au sein du corps social. Antonio Gramsci, leader des communistes italiens emprisonné par Mussolini, avait appelé cette option «l’hégémonie culturelle du prolétariat», le mouvement ouvrier devait conquérir la domination culturelle de la société avant d’accéder à la direction des affaires. Aujourd’hui, celui qui a durablement compris cette réalité politique est Jean-Marie Le Pen ; ce dernier a par ailleurs clairement exprimé l’intégration de cette tactique dans son corpus politique dès les années 1990 et Robert Badinter avait d’ailleurs mis en garde les Français et leurs responsables politiques sur la traduction concrète de cette stratégie dans la «lepénisation des esprits». Tentation à droite, cette lepénisation l’a désormais conquise.
La gauche doit prendre conscience que la bataille culturelle - que nous livre l’extrême droite, la droite et ses relais industrialo-médiatiques – a connu une première phase et que désormais une contre-offensive est à mener. Ségolène Royal a choisi de ne laisser aucun champ à la démagogie de la droite et d’y réinsérer les valeurs de la République, c’est une bonne chose ; mais il est temps dans les 14 jours qui restent avant le 1er tour de rétablir dans l’esprit de la population que ce n’est pas en marchant sur celui qui partage la même peine et les mêmes difficultés que soi qu’on permettra de résoudre la grave crise sociale et politique de traverse le pays et que subissent les exclus, les couches populaires et moyennes. Il faut rétablir l’espoir chez nos concitoyens, leur volonté d’agir collectivement contre les égoïsmes et l’accaparement de la richesse nationale, européenne et mondiale par quelques privilégiés qui aujourd’hui comme hier cherchent également à confisquer le pouvoir.
Liberté, Égalité, Fraternité, ces valeurs de la République sont au cœur du combat de la gauche française et l’unifie depuis 1848. Elles sont la démonstration du message d’universalité de la République française (débarrassée désormais du dévoiement colonial) et dépassent même la notion de nation française. Rappelons que la déclaration de principes du Parti des socialistes européens (qui rassemblent les partis socialistes, sociaux-démocrates et travaillistes des 27 États membres de l’Union européenne et au-delà) est fondée sur ce même triptyque, Liberté, Égalité, Fraternité. Il reste des débats à mener avec nos camarades européens, mais en France avec Ségolène Royal et en Europe avec les socialistes européens c’est à gauche et à gauche seulement que peuvent être défendues et étendues les valeurs de la République française et le dépassement positif de sa nation.
Frédéric FARAVEL